L’Australie, territoire de la noix de macadamia
La filière australienne de la noix de macadamia souhaite continuer à se développer, mais doit adapter ses pratiques comme sur la ferme de Ross Arnett pour faire face au changement climatique .
La filière australienne de la noix de macadamia souhaite continuer à se développer, mais doit adapter ses pratiques comme sur la ferme de Ross Arnett pour faire face au changement climatique .
L’Australie est le deuxième producteur au monde de noix de macadamia avec un peu plus de 20 % de la production mondiale en 2020. Plus de 80 % de cette production est destinée à l’export. Le pays compte environ 800 producteurs et totalise 38 000 hectares de vergers dont 26 600 sont en production. L’objectif de la filière est d’atteindre les 46 000 ha de vergers en 2025, pour une production estimée à 70 000 tonnes contre 48 000 tonnes aujourd’hui. Avec pour cible de tripler la production à l’horizon 2030.
Ross Arnett est l’un des producteurs de cette noix endémique à l’Australie, très nutritive et consommée par le peuple aborigène. Il la cultive depuis douze ans dans sa ferme de Malua au nord de la Nouvelle-Galles du Sud. Il a l’agriculture dans le sang : la ferme qu’il exploite appartient à sa famille depuis 5 générations. Ross gère celle-ci depuis 2010 et possède 2 000 noyers du Queensland, âgés de 7 à 17 ans, répartis sur dix hectares. Ce sont des arbres jeunes dans le monde de la noix de macadamia qui peuvent atteindre les 100 ans.
Lorsque le verger sera mature, il devrait produire cinq tonnes à l’hectare, contre trois tonnes pour l’instant. « J’ai quatre variétés différentes réparties dans mes vergers. Cela me permet d’améliorer la pollinisation et de sécuriser mes rendements », explique le producteur. Majoritairement produits sur la côte est de l’Australie, dans le Queensland et la Nouvelle-Galles du Sud, les noyers fleurissent d’août à septembre. D’octobre à janvier, les noix se forment sur l’arbre en grappes. La récolte se fait de février à août, lorsque les noix matures tombent au sol.
Une production résiliente au sein d’un climat variable
Après avoir vécu une sécheresse record en 2019 et des inondations destructrices en 2022, Ross Arnett est très conscient de l’importance de préserver et de protéger l’équilibre biologique et la structure des sols de son verger pour maintenir une production résiliente au sein d’un climat devenu très variable. Comme tous les agriculteurs, le changement climatique a eu des répercussions directes sur son exploitation. « Tout est plus intense. Quand il fait chaud, il fait très chaud et très sec. Idem lorsque la météo est humide, l’hygrométrie explose », reconnaît Ross. Et lorsque le climat change d’un extrême à l’autre, les défis augmentent.
La hausse des températures accroît la pression des insectes ravageurs sur la ferme de Malua. Encore cantonnée aux régions situées plus au nord de sa ferme, la menace de voir de nouveaux ravageurs apparaître est toujours plus grande pour Ross. La sécheresse de 2019 a laissé des traces dans ses vergers, pourtant situés dans une zone subtropicale. Bien que les arbres fleurissent encore, les bourgeons tombés ont réduit le rendement et engendré une perte de productivité. La qualité, tout comme la taille et la teneur en huile des noix, a également été compromise.
Des catastrophes climatiques en cascade
« 2019, c’était l’année la plus sèche jamais enregistrée ici: en regardant par la fenêtre de mon bureau, on ne voyait plus du tout de verdure. Le couvre-sol était mort. Une allumette et tout partait en fumée », témoigne le producteur. Ces conditions de sécheresse étaient déjà difficiles, mais les inondations de 2022 sont venues accentuer les difficultés. Elles ont causé l’érosion des premières couches du sol. Ross a perdu beaucoup de terre végétale et d’engrais par lessivage et ruissellement. La pluie a été si intense qu’elle a compacté le sol.
Les fortes quantités de pluie ont également réduit l’activité des insectes pollinisateurs, ce qui a impacté directement le rendement. Pour s’adapter à ces nouveaux extrêmes climatiques, Ross a intégré des pratiques de gestion agroécologique dans la structure de sa ferme. La densité de plantation est très faible (200 arbres par hectare) pour permettre la pénétration de la lumière jusqu’au sol. Ross pratique une taille sélective qui permet à la lumière d’entrer au cœur de l’arbre et au vent de sécher le feuillage. Un autre avantage de l’élagage est la création de déchets ligneux compostables, qui améliorent la structure du sol et la teneur en éléments nutritifs et réduisent le besoin d’engrais chimiques.
Des pratiques agroécologiques qui fonctionnent
Ross utilise des engrais verts et mélanges fleuris dans l’inter-rang pour amener de la biodiversité fonctionnelle et améliorer la structure du sol ainsi que sa teneur en matière organique. Sur la ligne et à proximité du rang, il sème un couvert végétal qui comprend du Dichondra rampant ou Axonopus compressus. « Le but est de créer un tapis qui ne gêne pas la récolte mécanique et qui empêche l’érosion autour des troncs. Pour l’inter-rang, je sème deux couverts différents dans la saison, que j’ai adaptés au fur et à mesure des années », explique Ross. Le producteur réalise des analyses de sol tous les ans pour ajuster ses besoins en fertilisation.
Il réalise également des analyses de feuilles pour gérer les applications foliaires et aider au développement des noix. « J’ai été assez constant au cours des dernières années avec les intrants organiques, et le taux de matière organique de mon sol a commencé à augmenter à plus de 12 % », se réjouit le producteur. « La santé du sol est la clé pour développer des pratiques agricoles vertueuses. J’utilise du compost pour améliorer la biologie de mon sol et rétablir ainsi sa santé, ce qui permet d’avoir des arbres en bonne santé également. Et ces arbres sont plus résistants face aux maladies et aux attaques de ravageurs », conclut Ross.
L’informatique au service du rendement
Dr Inigo Auzmendi est chercheur à l’université du Queensland. Ses travaux portent sur l’utilisation de modèles et de simulations informatiques pour comprendre et anticiper les modalités qui influent sur la croissance et le rendement des vergers de noix de macadamia. « La modélisation et la simulation de la croissance végétale prennent de plus en plus d’importance comme outils de recherche en agriculture », explique le chercheur. « C’est un outil utile pour tester les idées rapidement au lieu de prévoir des essais à long terme qui sont coûteux et difficiles à mettre en place », renchérit le spécialiste.
Les chercheurs utilisent par exemple un modèle de simulation pour tester l’influence de la densité sur le rendement, en « faisant pousser » un arbre virtuel dans des conditions programmées pour être au plus près du monde réel. Le modèle simule des processus influencés par des facteurs externes tels que l’environnement lumineux de chaque feuille et des processus végétaux internes, la photosynthèse ou la distribution des glucides. Les résultats montrent qu’augmenter la densité de plantation n’entraîne pas toujours une augmentation du rendement, et met en valeur la combinaison complexe de facteurs influant sur le rendement dans un verger. Les chercheurs compareront les résultats de la simulation avec ceux d’essais sur le terrain afin d’optimiser leur méthode.
Une noix endémique de l'île
Riche en vitamine B1, B6, manganèse, fer, magnésium et phosphore, la noix de macadamia est consommée depuis au moins 5 000 ans par certains peuples aborigènes. Elle a ensuite été décrite en 1858 par deux botanistes anglais venus faire des recherches au nord-est de l’Australie. Son nom lui a été donné en hommage au scientifique australien d’origine écossaise, John Macadam. Désormais cultivée, il s’agit de l’une des très rares plantes endémiques de l’Australie à avoir été domestiquée. Elle est produite également en Nouvelle-Zélande, en Thaïlande, en Afrique du Sud, au Costa Rica, au Brésil et aux États-Unis, ainsi qu’à Hawaï qui a importé des arbres dès 1887. On retrouve une production marginale en Espagne et en Afrique du Nord.
EN CHIFFRES
1er pays consommateur de noix de macadamia par personne devant les États-Unis et l’Allemagne
2e pays producteur derrière l’Afrique du Sud
Deux bassins de productions, Nothern Rivers et Bundaberg, qui représentent respectivement 32 % et 46 % de la production nationale
5 millions de dollars australiens investis dans la recherche et le développement de la noix de macadamia par an
2,5 millions de dollars australiens investis dans le marketing par an