Comment améliorer la conservation de l’ail
Les derniers résultats d’expérimentation sur les cultures d’Alliacées ont été présentés à la journée Alliacées organisée par le CTIFL en présence d’une centaine de participants. Une enquête sur les pratiques des producteurs révèle des pistes pour améliorer la conservation de l’ail.
Après la récolte, l’ail fait face à l’apparition récurrente de dégradations. Celles-ci entraînent parfois la non-commercialisation de volumes considérables : la moitié des lots produits peuvent être touchés, dont certains dans des proportions supérieures à 60 %. Les dégradations apparaissent pendant les deux premiers mois de conservation et varient selon les années. « En 2022 notamment, il y a eu de gros soucis de conservation de l’ail liés au Waxy Breakdown et à la fusariose, précise Juliette Pellat, du centre CTIFL de Balandran. Cela nous a amenés à mettre en place une enquête auprès des producteurs et des metteurs en marché. L’objectif était d’étudier les pratiques de séchage et de conservation de l’ail, afin de repérer des liens éventuels entre ces pratiques et le développement des dégradations. »
Des cultures plus ou moins irriguées
Quatre metteurs en marché et 38 producteurs pour 74 lots d’ail ont répondu à l’enquête : 27 répondants étaient localisés en Occitanie, dont 59 % dans le Tarn, le reste dans la Drôme (10) et le Nord (1). Sur les 74 lots de la campagne 2021-2022 pour lesquels les producteurs ont répondu, 37 % étaient de l’ail blanc (dont 78 % de Messidor et Messidrôme), 32 % de l’ail rose (dont 87 % d’Ibérose et Edenrose), 27 % de l’ail violet (Germidour) et 4 % de l’ail vert primeur. L’enquête a montré que dans le Tarn, la majorité de l’ail cultivé est de l’ail rose, avec peu ou pas d’irrigation. Dans le Gers et la Haute-Garonne, c’est essentiellement l’ail violet qui est cultivé, avec une irrigation moyenne à forte.
Dans la Drôme, l’ail cultivé est en majorité de l’ail blanc, avec une irrigation forte à très forte. Le mode de séchage le plus répandu sur l’ensemble des régions est le palox dynamique (63,5 %), suivi du séchage à la barre (17,6 %), puis des caillebotis dynamiques, des caisses dynamiques et des chambres de séchage. La température de séchage cible est de 24 °C à 25 °C pour 49 % des lots, de moins de 24 °C pour 35 % des lots. Plus de la moitié des producteurs (54 %) mesurent l’hygrométrie. Mais seulement 9 sur 34 de ceux qui mesurent l’hygrométrie régulent l’hygrométrie de séchage, avec un déclenchement à plus de 60 % d’humidité relative. La moitié des producteurs qui mesurent l’hygrométrie régulent par contre l’hygrométrie pendant le stockage.
Jusqu’à 60 % des volumes touchés par des dégradations
Sur la campagne 2021-2022, 47 % des producteurs ont eu des pertes, ce qui représente plus de 3 % des volumes, dues au Waxy Breakdown, défaut physiologique dont l’origine reste inexpliquée, la principale hypothèse est qu’il serait lié à la mauvaise assimilation du calcium. En moyenne, 10 % des volumes ont été touchés par le Waxy Breakdown.
Pour 17 %, les pertes représentaient plus de 20 % des volumes et pour 1,5 % plus de 60 %. Près de la moitié des producteurs (49 %) ont eu des dégradations dues à la fusariose, liée à la présence de champignons du genre Fusarium. En moyenne, 8 % des volumes ont été touchés. Et pour près de 15 % des producteurs, 20 à 60 % des volumes avaient des dégradations liées à la fusariose.
Enfin, 34 % de l’ail a été impacté par des chocs, avec en moyenne 5 % des volumes touchés. Malgré le petit nombre de répondants, l’analyse détaillée semble montrer que les types blanc et violet sont globalement plus touchés par le Waxy Breakdown que le rose, avec peut-être une influence de l’irrigation, peu développée en ail rose et plus importante en ail blanc et violet. Aucune tendance nette ne se dégage par contre pour la fusariose et les chocs selon le type d’ail. Une température élevée à la récolte pourrait aussi favoriser le Waxy Breakdown, puisque l’enquête révéle plus de volumes touchés quand la température de récolte était supérieure à 35 °C. « L’année 2022, très chaude, a vu un record de développement du Waxy Breakdown », note Juliette Pellat. Là encore, il n’y a pas eu d’effet visible de la température de récolte sur la fusariose et les chocs.
Impact de la température à tous les stades
L’enquête révèle aussi que les dégâts liés au Waxy Breakdown et à la fusariose ont été moins élevés quand la température de séchage cible était inférieure à 25 °C, sans effet visible sur les dommages mécaniques. « Une température de séchage cible supérieure à 25 °C pourrait favoriser le développement du Waxy Breakdown et de la fusariose. » L’enquête n’a pas permis en revanche de mettre en évidence l’influence positive de la réfrigération pendant le stockage, pourtant fréquemment citée pour ralentir le développement de la fusariose. « Même si le trop petit nombre de réponses ne permet de mettre en évidence de relation avérée entre les paramètres enquêtés, il semble que la température à tous les stades, récolte, séchage et conservation, soit un critère d’influence sur la dégradation post-récolte, résume Juliette Pellat. D’autres facteurs comme le type d’ail, l’irrigation, la durée de séchage et de conservation et l’hygrométrie pourraient aussi jouer un rôle. » Des expérimentations devraient être engagées sur ces thèmes en 2025 et 2026.
Le vinaigre contre la fusariose
Suite au retrait du thiophanate-méthyl utilisé en trempage des échalotes pour lutter contre la fusariose, des essais de trempage à 42 °C avec du vinaigre alimentaire pendant deux heures ont été menés au Caté : ils montrent qu’en cas de forte attaque, le vinaigre à 2 % réduit significativement la présence de fusariose, sans risque pour l’applicateur. Les effluents peuvent être traités en station d’épuration en élevant le pH à au moins 5,5 ou épandus au champ à 20 m3/ha, sur orge au stade tallage ou sur le chou-fleur d’automne qui suit. Les études vont se poursuivre en 2024 et 2025 sur l’épandage au champ. Des essais de trempage au vinaigre ont aussi été engagés pour lutter contre la pourriture blanche et la fusariose de l’ail.