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Innovation variétale
Banane durable : vers une variété résistante à la fusariose TR4 ?

La variété Pointe d’Or du Cirad/IT2 n’a pas eu le succès escompté et l’UGPBAN l’a arrêté. Mais les producteurs de bananes de Guadeloupe et de Martinique continuent d’innover et de tester. En cours : trois variétés prometteuses, tant en esthétique qu’en goût. Et sur le plan agronomique, elles pourraient présenter des tolérances à la cercosporiose et surtout une résistance à la fusariose TR4.

Ceci est le cinquième et dernier épisode de la saga "Banane durable" que FLD rapporte des Antilles.

 

Sur l’exploitation de Jean-Louis Butel à Saint-Sauveur en Guadeloupe, des bananiers d’apparences et de tailles différentes côtoient les traditionnelles parcelles de bananes Cavendish. Il s’agit de trois nouvelles variétés, en test depuis un an afin d’en évaluer l’aptitude en production et en commercialisation. Les variétés 964, 965 et 966 (le “9” faisant référence à la station de recherche du Cirad de Neufchâteau à Capesterre, en Guadeloupe) sont issues du projet variétal Cirad/IT2.

Obtenues en croisant des variétés ancestrales (donc avec encore des graines), elles ont été sélectionnées pour leur bon comportement vis-à-vis des maladies, notamment la cercosporiose, la fusariose TR4 ou encore les maladies post-récolte. « Compte-tenu de leurs parents, nous sommes en droit de penser qu’au moins une ou deux de ces trois variétés aura un bon comportement vis-à-vis des maladies avec une tolérance à la cercosporiose noire et peut-être une résistance totale à la TR4 », espère Frédéric Salmon, chercheur et sélectionneur au Cirad.

 

 

Testées en conditions contrôlées… et chez les producteurs, elles semblent prometteuses

Les Antilles étant pour le moment exemptes de la TR4, les trois variétés sont actuellement testées en conditions contrôlées (sous serres) à Montpellier. Les premiers résultats indiquent que parmi les trois variétés, certaines ne meurtrissent pas, d’autres ne noircissent pas. Elles ont une bonne tolérance à la cercosporiose noire avec moins de pression du champignon sur le feuillage. « A voir en conditions réelles… Dernier point à vérifier : les consommateurs », souligne Frédéric Salmon qui précise que des dégustations ont été faites en interne, ainsi que lors d’événements publics en Guadeloupe. De la taille d’une Freycinette, la 964 semble présenter un goût et une texture crémeux. Les 965 et 966 sont plutôt sur une taille de 15-16 cm, comme l’était feu 925 (Pointe d’Or).

 

Les trois variétés sont testées à la station du Cirad de Neufchâteau, conduites en conventionnel agroécologique. Le projet DIVAC (“Développer et transférer des Innovations Variétales en réponse à la lutte contre la Cercosporiose noire aux producteurs de bananes dessert destinées aux marchés locaux et export” Cirad-IT2) implique aussi trois producteurs guadeloupéens qui ont planté ces variétés afin de les tester en conditions réelles. Première étape : s’approprier le matériel végétal. Deuxième étape : fixer l’itinéraire technique. Une de ces exploitations est l’exploitation Butel, qui a mis en terre 80 plants par variété. « Nous sommes sur le deuxième cycle. L’itinéraire technique n’est pas encore optimisé et nous y travaillons », précise le directeur d’exploitation Jacques Suzanon. Deux autres producteurs guadeloupéens l’ont planté, également en bio, une dizaine de plants pour chaque variété chez chacun d’eux.

Un partenariat pourrait aussi être mis en place pour tester en plantation en Colombie, où la TR4 a fait son apparition en 2019. « Il est important de tester les variétés sur d’autres régions du monde afin de voir si la résistance tient et s’il y a un potentiel sur les marchés local et régional », rappelle Frédéric Salmon.

 

L’échec de la 925, une mine d’or de connaissances

Mathieu Lechaudel, physiologiste Qualité des fruits au CIRAD, rappelle : « Notre objectif premier, c’est la qualité opérationnelle c’est-à-dire commerciale. Nous regardons le “dégrain” [est-ce que les bananes se détachent trop facilement de leur main], la facilité à meurtrir ou à brunir. Les trois variétés semblent meilleures que la 925 mais aucune des trois n’a tous les “bons” comportements. »

La 925 (Pointe d’Or) semblait très prometteuse sur le plan agronomique (elle se destinait au bio) et sur le plan gustatif. Mais elle avait une tendance un brunissement qui a empêché son déploiement commercial. L’exploitation Butel l’avait notamment plantée. « Nous voulions continuer la 925, nous en avions 300 pieds, relate Jacques Suzanon. Mais nous n’arrivions pas à l’écouler sur le marché local. Il aurait fallu de la communication, du marketing. »

Il faut 10 à 12 ans entre l’hybridation d’une variété en station et la proposition aux producteurs. Puis la phase de développement variétale permet de tester en conditions réelles les aptitudes agronomiques et commerciales de la variété et d’affiner les itinéraires techniques, ce qui prend encore des années (et qui ne s’arrête, en réalité, jamais). Mais l’histoire des variétés testées précédemment, comme la 925, permet d’aller plus vite. « La Pointe d’Or a été une belle expérience », résument les chercheurs du Cirad et de l’IT2 et le directeur d’exploitation de Butel.

Jacques Suzanon estime encore : « Aujourd’hui avec la conjoncture économique et sociale et la pression des ravageurs, il faut que l’on évolue. On ne peut pas se contenter de faire que de la Cavendish. Donc on fait les essais, toujours sur de petites surfaces et de nouvelles techniques culturales émergent, nouvelles techniques que l’on peut parfois adapter à la Cavendish. Par exemple, sur les engrais organiques, la 925 a été moteur. »

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