Abricot : un modèle moniliose en construction
L’Inra travaille à la création d’un modèle prédictif du risque monilia sur abricot afin de mieux cibler les périodes à risque et donc potentiellement diminuer l'usage des produits phytosanitaires.
L’Inra travaille à la création d’un modèle prédictif du risque monilia sur abricot afin de mieux cibler les périodes à risque et donc potentiellement diminuer l'usage des produits phytosanitaires.
Cibler ses traitements contre le monilia lorsque le risque de contamination est présent : voilà l’un des objectifs du projet Climarbo (Changement climatique et maladies cryptogamiques émergentes en arboriculture en Rhône-Alpes). Au cours des deux dernières années, l’Inra a commencé un travail de suivi épidémiologique pour déterminer les périodes de sensibilité et les facteurs de risque climatique du développement du monilia fleurs sur abricotier. « Pour comprendre le pathogène, nous avons installé au verger des abricotiers en pot de la variété sensible Bergarouge. Chaque pot était sorti pendant quelques jours, à un moment de la floraison. L’objectif était d’exposer les arbres à divers épisodes climatiques contrastés, explique Laurent Brun de l’Inra de Gotheron. Ils ont ensuite été rentrés sous une serre sans inoculum. Lors de leur entrée, les différents bourgeons et fleurs ont été étiquetés selon leur stade. Au bout de trois jours, le nombre de fleurs moniliées était compté et le pathogène identifié. » Le croisement du rapport nombre de fleurs avec symptômes sur le nombre de fleurs total et les conditions climatiques ont permis de déterminer les périodes de sensibilité et les conditions climatiques qui favorisent cette maladie. La calibration du modèle s’est faite en observant une dizaine d’arbres de la variété Bergeron par parcelle dans un réseau en comprenant 15 en Ardèche et dans la Drôme. Sur chaque arbre, ont été notés la proportion de fleurs aux différents stades au cours de la floraison, la floribondité, l’inoculum, et les dégâts sur rameaux, fleurs et fruits.
Evaluer l’impact du changement climatique sur les monilioses
« Ainsi, nous avons pu déterminer que la température et la pluviométrie sont les deux facteurs majeurs qui influencent le développement de cette maladie », rapportait Baptiste Labeyrie lors de la Séance Arbo de la Sefra, fin septembre. Avec ces deux données et le pourcentage de fleurs ouvertes aux stades D, E + F et G, le premier prototype du modèle détermine un risque fleur lors de chaque épisode de pluie en l’absence de protection fongique. A la fin de la période de contamination, le risque fleur cumulé permet d’estimer le pourcentage potentiel de rameaux desséchés par la moniliose. « Pour le moment, le modèle qui se présente sous forme d’un petit tableau, n’a été calibré que pour monilia laxa sur Bergeron mais ce n’est qu’un premier jet », souligne avec enthousiasme le responsable scientifique à la Sefra (Drôme). L’objectif est dans un premier temps de prévoir les périodes à risque. A terme, le but serait de déterminer le risque monilia selon les variétés avec le changement climatique. « L’intérêt est de voir si cette maladie va plus ou moins se développer à l’avenir. Mais il reste encore beaucoup d’incertitudes sur les tendances du climat, commentait Baptiste Labeyrie. Si on sait que les températures vont augmenter, nous n’avons aucune idée des changements de la pluviométrie localement. » Le modèle doit être amélioré en intégrant d’autres variables : comme la sensibilité variétale, les autres souches de monilia, l’inoculum qui ne varie pas à l’échelle d’une parcelle mais qui est influencée par le paysage ou encore le passage du monilia des fleurs aux rameaux.
Un modèle espagnol sur la pêche
« Les chercheurs de l’Irta en Espagne disent avoir développé un modèle similaire sur pêche pour la moniliose, continuait Baptiste Labeyrie. En utilisant ce modèle, les producteurs espagnols auraient diminué les traitements sur les maladies de conservation de moitié. » Nous allons essayer de rencontrer cette équipe de recherche pour échanger sur nos travaux. Ce modèle sur abricot n’est qu’un pendant du projet Climarbo qui regroupe neuf partenaires techniques et financiers. L’ambition est aussi de travailler sur le Colletotrichum de la noix, dans la vallée de l’Isère. Sur cette maladie, l’objectif est le même avec une approche méthodologique similaire : mieux déterminer les périodes sensibles et les facteurs de risque climatique.