FCO et MHE : « Vacciner son troupeau dès que possible »
On ne pourra pas arrêter les culicoïdes, moucherons piqueurs vecteurs de la FCO et de la MHE. Des leviers peuvent cependant être actionnés pour aider son troupeau face à ces maladies et en même temps ralentir leur progression sur le territoire. Le point avec Emmanuel Garin, vétérinaire de GDS France.
On ne pourra pas arrêter les culicoïdes, moucherons piqueurs vecteurs de la FCO et de la MHE. Des leviers peuvent cependant être actionnés pour aider son troupeau face à ces maladies et en même temps ralentir leur progression sur le territoire. Le point avec Emmanuel Garin, vétérinaire de GDS France.
Pourquoi ne faut-il pas céder à la résignation ou au fatalisme face aux épisodes de maladies vectorielles qui touchent les troupeaux de bovins de façon récurrente ?
Emmanuel Garin - Les éleveurs peuvent agir sur plusieurs fronts pour soutenir leurs troupeaux face à ces virus. Le premier conseil porte sur la vigilance : il s’agit d’observer deux fois par jour - matin et soir - ses animaux pour détecter le plus tôt possible des éventuels symptômes, qui sont les mêmes pour la FCO-3 que pour la FCO-8 et leur cousine germaine la MHE. Et en cas de détection, il ne faut pas attendre une demi-journée pour prévenir son vétérinaire : une thérapie de support, en général composée d’anti-inflammatoires, est plus efficace quand elle est démarrée tôt. De son côté, le vétérinaire pourra ainsi déclarer plus rapidement les cas à la DDecPP.
Depuis une zone atteinte par l’un de ces virus, limiter et sécuriser les mouvements des animaux participe par ailleurs à ralentir la propagation de la maladie sur le territoire.
La vaccination dès que possible est fondamentale pour réduire l’impact clinique des sérotypes 3 et 8 de la FCO et de la MHE pour les bovins. D’autant qu’il n’y a aucune protection croisée entre la FCO-3, la FCO-8 et la MHE. Les bovins peuvent déclarer les trois maladies successivement. On a la chance de disposer de vaccins pour ces trois maladies (celui pour la MHE est attendu courant septembre 2024).
Les vaccins contre la FCO-8 et celui contre la MHE empêchent totalement la virémie : les animaux vaccinés ne sont plus contagieux. En plus de réduire les symptômes chez les animaux, ils permettent de ralentir la circulation de la maladie.
Est-il encore temps de vacciner ?
E.G. - Chaque éleveur échange avec son vétérinaire pour décider de sa stratégie, et définir quelles sont les catégories d’animaux à vacciner et à quel moment. D’après l’expérience acquise les années précédentes, la circulation de ces virus démarre en juin, et elle est maximale de mi-août à fin octobre.
Dans un troupeau correctement vacciné contre le sérotype 3, des animaux peuvent être malades voire mourir, mais c’est bien plus rare qu’en cas d’infection. Hors contexte d’une circulation importante sur le cheptel, si un ou deux animaux commencent à présenter des signes cliniques, la vaccination, si elle est réalisée rapidement, peut également avoir un intérêt en réduisant la sévérité des symptômes et le nombre de cas au sein du troupeau.
L’immunité commence à s’installer dans un délai de quelques jours après la première injection même si elle n’est complète qu’au bout de trois semaines après la 2ème injection (ou une injection pour le vaccin en une seule injection).
Quelle doit être la place de la désinsectisation dans la protection des troupeaux ?
E.G. - La désinsectisation reste un outil complémentaire, et n’est pas un instrument de lutte collective contre la maladie. Pour certaines situations, elle réduit les risques de piqûres par les moucherons sous condition d’une application régulière et d’une concentration suffisante pour atteindre les parties fines du corps qui sont les plus ciblées. Mais elle ne peut pas être utilisée de façon continue et régulière. L’approche « one health » et son coût engagent à réduire l’usage des produits de désinsectisation.
D’autres voies d’action pour maîtriser les maladies vectorielles sont-elles en vue ?
E.G. - Des recommandations pour la gestion des populations de culicoïdes en élevage bovin sont déjà formulées. Les litières et zones de stockage des fumiers et lisiers sont à gérer de façon à limiter les endroits favorables à la ponte des culicoïdes. Des moustiquaires à maille très fine (les culicoïdes mesurent de 1 à 3 mm) pourraient aussi protéger des animaux en bâtiment.
L’impact sanitaire de ces moucherons piqueurs sur les troupeaux dépend de la topographie, de l’altitude, de la température. D’une espèce de culicoïde à l’autre, ils sont plus ou moins susceptibles de transmettre tel ou tel virus, et même tel ou tel sérotype du virus. On estime qu’ils se déplacent de 2 à 3 km par jour en moyenne, mais ça peut aller jusqu’à 10 à 15 km par jour en zone de plaine.
L’ensemble des professions agricole et vétérinaire milite pour que soient attribués des fonds à la recherche scientifique sur ces insectes qui, sur un temps long, pourrait apporter des solutions pour les éleveurs.
D’autre part, un outil de surveillance des signes cliniques analogue à Omar, celui qui fonctionne déjà pour la mortalité, aiderait à alerter « en temps réel » (avec un délai de quelques semaines) sur ce type d’épisodes et à anticiper les décisions.
La vaccination est fondamentale pour réduire l’impact clinique sur les bovins.
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