[ESSAI] - Kubota M6-142 – « Tous les attributs d’un tracteur de tête »
Loïc Toullier, agriculteur à Juvigny-le-Tertre dans la Manche, a testé le Kubota M6-142 équipé du chargeur LK2400H. Il nous livre ses impressions après 25 heures aux commandes de ce tracteur de 143 chevaux.
Loïc Toullier, agriculteur à Juvigny-le-Tertre dans la Manche, a testé le Kubota M6-142 équipé du chargeur LK2400H. Il nous livre ses impressions après 25 heures aux commandes de ce tracteur de 143 chevaux.
Au sommaire de cet essai
- Les conditions du test
- Les plus / Les moins
- Au travail – "Stable et précis avec le chargeur frontal"
- En cabine – "Bonnes habitabilité et visibilité"
- Entretien – "Filtre à air et radiateurs bien accessibles"
- Fiche technique
Développant de 123 à 143 ch, les trois tracteurs de la série M6002, fabriqués au Japon, s’adressent aux exploitations de polyculture élevage. D’un poids à vide de 6 t, ils se complètent d’un chargeur frontal à parallélogramme mécanique ou hydraulique, fourni par l’équipementier breton MX aux couleurs de Kubota. Le M6-142 essayé, le plus puissant de la gamme, loge, comme les deux autres modèles, un moteur quatre cylindres maison de 6,1 l de cylindrée. Il développe 143 ch et bénéficie d’un boost de 20 ch s’activant uniquement au transport.
Huit vitesses powershift
La transmission semi-powershift 24/24 comprend huit rapports sous charge et trois gammes robotisées. Elle propulse le tracteur à 40 km/h au régime moteur de 1 650 tr/min et se complète en option de huit vitesses rampantes (0,2 à 0,9 km/h). Le Kubota bénéficie du passage automatique des huit powershift, ainsi que du réglage de la souplesse de l’inverseur et du passage des vitesses. Il est équipé de la fonction Xpress Restart permettant de stopper l’avancement en appuyant uniquement sur la pédale de frein. Le pont avant suspendu, de type portique, améliore la garde au sol (56 cm). Il intègre le dispositif Bi-Speed accélérant la rotation des roues avant pour réduire le rayon de braquage à 4,50 m. Il est préférable de l’activer uniquement au champ, car sur les bétons, le risque est grand d’user prématurément les pneus.
Les conditions du test
Testé mi-octobre, le Kubota M6-142 a surtout réalisé du transport d’ensilage de maïs avec une benne monocoque à deux essieux. L’éleveur l’a aussi utilisé avec le chargeur frontal pour la confection d’un silo, le curage de la fumière et la distribution du fourrage.
Les plus
+ Stabilité
+ Confort
+ Visibilité
+ Arrêt à la pédale de frein
Les moins
- Toit ouvrant
- Position du frein à main
- Ouverture du capot
- Pas de rangement réfrigéré
Au travail – "Stable et précis avec le chargeur frontal"
Lesté à l’arrière avec une masse d’une tonne, le Kubota M6-142 se révèle très stable avec le chargeur frontal. Chaussé de roues avant en 24 pouces, il se montre également maniable. Cependant, son gabarit m’est apparu un peu trop imposant pour évoluer dans les bâtiments exigus. Le capot moteur au nez proéminent cache la visibilité sur l’outil et ne permet pas de voir correctement l’interface porte-outil lors de l’attelage. Au curage de la fumière, les huit rapports sous charge de la deuxième gamme M, qui procurent une plage de vitesse allant de 3,9 à 15,6 km/h, m’ont permis de travailler sans changer de gamme. La fonction stoppant l’avancement en appuyant sur la pédale de frein s’avère très agréable à la manutention, aussi bien pour remplir la fourche de fumier que pour approcher la benne.
À la confection du tas d’ensilage, le Kubota, qui pèse 6 tonnes à vide, s’est avéré agréable et sécurisant. Son levier d’inverseur est souple et très ergonomique. Il se règle en agressivité pour manœuvrer avec précision. L’arrêt uniquement avec la pédale de frein s’est ici aussi révélé intéressant, car il facilite le tassage des bords du silo. Mon gros reproche porte sur le levier basse pression de commande du chargeur. Il est dur et prend place au bout de la console de droite. Je préférerais un joystick électrique solidaire de l’accoudoir, afin de bénéficier d’une position plus confortable du bras. J’ai par ailleurs constaté que ce levier reste actif moteur arrêté. Cela présente l’avantage de pouvoir baisser le chargeur sans démarrer le moteur, mais il faut prendre l’habitude de stocker le tracteur avec la fourche en bas, afin d’écarter tout risque d’accident en cas de manipulation inopinée du joystick. Il y a bien une molette à son embase pour le verrouiller, mais elle n’est pas très pratique à actionner. Le relevage avant dépasse beaucoup à l’avant et a tendance à se remplir d’ensilage.
Sur la route, le tracteur est confortable, grâce notamment à son pont avant suspendu, dont la souplesse s’ajuste facilement à l’aide d’un bouton en cabine. Les rétroviseurs de petites tailles sont efficaces, mais la partie surveillant les angles morts pourrait être plus grande. Avec ma benne à deux essieux et dans mon secteur vallonné, le Kubota s’est bien défendu dans les parcelles de maïs. Je suivais l’ensileuse sans changer de gamme, grâce aux huit rapports powershift. Le bip retentissant à chaque changement de vitesse est en revanche pénible. Sur la route, comme le moteur est assez coupleux, je n’ai pas vraiment ressenti le boost de 20 chevaux s’activant au transport à partir de 20 km/h. La consommation de 8 l/h me paraît correcte. Le passage robotisé des gammes engendre, comme sur toutes les transmissions de ce type, une rupture de couple qui m’a valu de caler deux fois, en montée, après avoir quitté une parcelle. Comme le premier rapport de la gamme H est assez haut, je n’avais pas d’autre choix, en côte, que de démarrer en gamme moyenne (M).
Le Kubota M6 est équipé de stabilisateurs automatiques et ses bras sont bien dimensionnés. Le modèle essayé reçoit sur chaque aile arrière des boutons pour actionner le relevage et gérer la prise de force. J’ai constaté que le relevage présente une grande course, ce qui évite d’agir sur les chandelles. Le tube pour ranger les boules d’attelage, situé à gauche au pied du vérin de relevage, pourrait être plus accessible.
En cabine – "Bonnes habitabilité et visibilité"
La cabine à quatre montants est équipée d’une suspension mécanique et propose suffisamment d’espace pour circuler avec un passager. Ses deux portes et ses grandes surfaces vitrées procurent une bonne visibilité, qui n’est d’ailleurs pas entravée par le pot d’échappement positionné à l’avant droit. Il manque cependant un rétroviseur sur le hayon arrière pour bien voir le piton d’attelage. Les feux de travail sont nombreux (10 av. et 6 ar. sur le modèle essayé – 16 maxi), bien positionnés et efficaces. Ils se contrôlent depuis un panneau très intuitif pourvu d’un schéma représentant un tracteur. Un simple appui sur un bouton permet d’allumer tous les phares simultanément. Dommage que certains interrupteurs en cabine ne soient pas rétroéclairés la nuit, à l’instar du bouton d’essuie-glace situé sur le tableau de bord. Le toit vitré assez large est séparé du pare-brise par un bandeau plutôt épais. Comme il est en retrait par rapport au toit, il forme une cuvette qui s’est notamment remplie de maïs en suivant l’ensileuse lors du détourage. J’ai dû le nettoyer manuellement, car la matière ne peut pas s’évacuer seule. L’assise en mousse du siège passager est confortable et se relève pour faciliter l’accès à bord. Il est aussi possible d’abaisser le dossier pour créer une tablette. Il y a bien plusieurs rangements, dont deux porte-gobelets, mais le tracteur manque d’un coffre fermé, voire réfrigéré.
Le tableau de bord est bien lisible et le levier multifonction fixé en bout d’accoudoir est ergonomique. Pour gérer l’inversion du sens de marche depuis ce joystick, il faut à la fois appuyer sur l’interrupteur en façade et sur un bouton de validation à l’arrière. Je comprends que cette manipulation soit nécessaire pour la sécurité, mais elle demande une petite gymnastique des doigts peu agréable. Le joystick présente l’avantage de regrouper les boutons de passage des gammes et des rapports powershift, ainsi que ceux du relevage et des deux régimes moteurs mémorisables. Les distributeurs hydrauliques sont à commande mécanique et leur débit s’ajuste à l’aide de molettes situées derrière le siège. La climatisation manuelle fonctionne bien, mais son pupitre de commande, comme l’autoradio, se situe dans l’angle arrière droit. Il est à mon goût mal placé, car exposé au salissement sur ce type de tracteur appelé à travailler avec la vitre arrière ouverte. Le levier de frein à main, situé au plancher à gauche du siège, est aussi mal positionné et il oblige à se pencher pour l’actionner. À plusieurs reprises, en quittant la cabine, je l’ai désactivé accidentellement en le percutant avec le talon, ce qui s’est à chaque fois traduit par la mise en roue libre du tracteur. Je préférerais que le frein à main soit intégré au levier d’inverseur, comme sur d’autres tracteurs de cette catégorie.
Optionnel, le terminal K-Monitor à écran tactile de 7 pouces est convivial et se prend vite en main. Pouvant être raccordé à une caméra, il intègre la fonction de guidage par GPS et permet de piloter les outils Isobus. Il donne accès, après déblocage des licences, au contrôle de sections et à la modulation de dose. Ce terminal complétant l’affichage numérique du tableau de bord permet de personnaliser l’agressivité de l’inverseur, paramétrer une vitesse de démarrage et sélectionner la plage de rapports powershift en mode auto de la transmission. Il sert aussi à activer l’automatisme de prise de force et à programmer les séquences en fourrière.
Entretien – "Filtre à air et radiateurs bien accessibles"
L’ouverture du capot, qui demande d’utiliser une pige pour le déverrouiller, pourrait être facilitée par la présence d’une poignée sur la calandre. Le filtre à air, comme la batterie et le vase d’expansion, est directement accessible à l’avant du compartiment moteur. Les éléments du bloc de refroidissement ne se déploient pas, mais une trappe à droite s’ouvre pour faciliter leur nettoyage. Seul un radiateur, maintenu par des vis papillons, coulisse vers la gauche. Il est équipé d’un tamis amovible évitant l’encrassement des ailettes. Le filtre à huile est bien caché à droite derrière une grille maintenue par six vis. La jauge à huile s’atteint facilement à gauche, même en présence du chargeur frontal. En revanche, le bouchon de remplissage d’huile moteur se trouve derrière une grille boulonnée, ce qui ne me paraît pas très pratique si un appoint est nécessaire.
Fiche technique Kubota M6-142
MOTEUR
Puissance au régime nominal sans/avec boost (ECE R120) : 138/158 ch à 2 100 tr/min
Puissance maxi sans/avec boost (ECE R120) : 143/163 ch à 1 900 tr/min
Couple maxi : 645 Nm à 1 500 tr/min
Cylindrée : 6 124 cm3
Norme et système de dépollution : stage V avec DOC, FAP et SCR (AdBlue)
Capacité d’huile du moteur : 17 l
Intervalle d’entretien : 500 h
TRANSMISSION
Type : powershift robotisée Kubota
Nombre de rapports (av./ar.) : 24/24
Nombre de rapports entre 4 et 15 km/h : 10
Régime moteur à 40 km/h : 1 640 tr/min
Régimes de prise de force et régimes moteur correspondant : 540, 540E, 1000 et 1000E à 1 983, 1 535, 1 960 et 1 517 tr/min
CIRCUIT HYDRAULIQUE
Type : centre fermé load sensing
Débit et pression : 115 l/min
Volume d’huile hydraulique exportable : 40 l
Nombre de distributeurs en série : 3 arrière (4 en option)
RELEVAGE
Capacité maxi aux rotules (arrière/avant) : 7 000/3 260 kg
DIMENSIONS
Capacité du réservoir de GNR/AdBlue : 230/20 l
Hauteur hors tout : 2,89 m
Empattement : 2,69 m
Rayon de braquage : 4,5 m avec système Bi-Speed
Poids à vide : 6 000 kg
PTAC : 9 800 kg
Pneumatiques du modèle essayé : 600/65 R38 et 480/65 R24
BUDGET
Prix catalogue du modèle essayé au 1er/02/2022 sans option et sans chargeur/avec options et chargeur : 102 000/124 000 euros HT