« La filière caprine se porte bien »
Jacky Salingardes, président de la Fnec et de l’Anicap, revient sur le prix du lait, la PAC, les chevreaux et les demandes sociétales.
Jacky Salingardes, président de la Fnec et de l’Anicap, revient sur le prix du lait, la PAC, les chevreaux et les demandes sociétales.
Comment se porte la filière caprine en 2021 ?
Jacky Salingardes - « La production laitière caprine se porte plutôt bien cette année. Les fromages de chèvre ont le vent en poupe et c’est très positif pour nous. Le prix du lait est en hausse, même si nous surveillons de près l’évolution du coût de production. Les fromagers fermiers ont retrouvé leurs volumes de commercialisation, voire parfois plus. Seule ombre noire au tableau, les petits chevreaux. »
Peut-on espérer encore une hausse du prix du lait ?
J. S. - « Notre objectif d’augmenter les prix de 70 euros les mille litres est quasiment respecté. On se donne encore une année pour y arriver. Cependant, il faudra sûrement aller plus loin car nos coûts de production sont en train d’exploser et la hausse du prix du lait couvre à peine ces augmentations, avec des variations suivant les régions. Nous surveillons de près cette volatilité et avons déjà alerté entreprises et distributeurs. »
Quelles sont les conséquences de la mise en œuvre du nouvel étalon cellules ?
J. S. - « Depuis le 1er avril, un nouvel étalon est utilisé pour les analyses de cellules par les laboratoires interprofessionnels. Aujourd’hui, ce que l’on constate, et qui avait été anticipé, c’est que les producteurs descendent d’un échelon dans les grilles. L’impact économique est positif et évalué à neuf euros les mille litres en moyenne pour les producteurs. Une partie des hausses tarifaires obtenues auprès de la grande distribution a été retenue par les laiteries, ce qui a compensé à leur niveau. D’ici un an ou deux, nous devrons nous poser collectivement la question de l’évolution des grilles cellules. Nous sommes le seul pays d’Europe à pénaliser sur ce critère alors qu’il n’y a quasiment aucun impact sur la qualité des fabrications fromagères. »
Comment réagissez-vous à la nouvelle PAC et aux orientations du plan stratégique national ?
J. S. - « Nous, les éleveurs caprins, sommes peut-être parmi ceux qui perdent le moins, mais tout le monde perd. Nous avons eu des échanges constructifs avec le ministre de l’Agriculture mi-juin. Depuis sa mise en place, l’aide à la chèvre a baissé régulièrement, passant de 15 millions d’euros il y a sept ans à 13,6 millions aujourd’hui. Cela fait une perte sur l’aide caprine de 2 à 2,5 € par chèvre. Ce mouvement de fond se poursuit et nous lui avons fait part de notre inquiétude. »
La filière chevreaux peine à sortir de la crise, pourquoi ?
J. S. - « Le prix du petit chevreau payé aux naisseurs est beaucoup trop faible depuis deux ans. Il a perdu la moitié de sa valeur ! Il faut la volonté de tous pour remettre de la sérénité sur ce sujet. Les difficultés d’exporter des chevreaux ont duré six mois de mars à octobre 2020. Depuis, le commerce a repris et il n’y a pas de raisons que les maillons de l’abattage et de l’engraissement ne reviennent pas à un minimum de prix pour les petits chevreaux. Nous avons aidé les trois abatteurs à recevoir du soutien financier de la part des pouvoirs publics pour faire face à la crise. Ils en ont profité de manière opportuniste. Il y a de l’irrespect vis-à-vis des naisseurs de ne pas revenir à un minimum de prix pour les jeunes chevreaux. Aujourd’hui environ 20 % des chèvres sont en lactations longues. La charte chevreau va être intégrée dans le Code mutuel, signe que, côté naisseurs, nous faisons des efforts. Il faut que tout le monde en fasse autant ! Un travail est à faire collectivement sur la recherche et développement. Personne n’achètera un quart de chevreau sous blister… Nous avons des progrès à faire sur ce point si on veut que la filière chevreau survive. »
Comment avancent les réflexions sur les attentes sociétales ?
J. S. - « Nous travaillons depuis quelque temps déjà avec des associations de protection animale. Parmi les premiers sujets abordés avec elles : la sortie des animaux, l’écornage et l’aménagement intérieur des bâtiments. Le travail se passe bien, en bonne intelligence. Ces adaptations aux demandes de la société sont finalement plutôt bien acceptées aussi du côté des éleveurs. »