" On verra plus tard "

" C’est vrai, il a des trucs qui peuvent attendre un peu et qui, du coup, attendent d’autant plus longtemps qu’ils tombent à un mauvais moment. J’en vois régulièrement. Il peut s’agir d’une boiterie (elle ne devrait jamais attendre !), d’une excroissance, d’une maladie de peau ou comme ici d’une déformation aussitôt interprétée comme des abcès sortis de nulle part qui finiront bien par se purger lorsque la vache profitera pleinement des bienfaits de la pâture. Et hop ! La voilà dehors avec son veau au milieu du troupeau. À ce moment-là, ça avait l’allure d’un petit chapelet de boules situées près du pli du grasset ; rien de grave, rien de gênant. Et puis le voilà qui grossit insensiblement au cours du printemps et qui émet quelques succursales en arrière de la cuisse. Mais vous imaginez... Le veau se porte bien, la vache aussi et la rentrer pour l’examiner va tout de suite poser pas mal de problèmes en plein été, à une époque où la main-d’œuvre se fait rare et lorsque d’autres soucis plus graves s’en mêlent.
Petit à petit
Bien sûr, si le véto était passé par là au cours de l’été, on aurait fait ensemble un tour en pâture pour qu’il donne son avis mais ça n’a pas été le cas. Bon, même si la déformation continue de grossir lentement et que de la chair apparaît, prête à saigner, tout cela attendra bien encore un peu puisque la vache, maintenant destinée à la réforme, ne boite pas et ne semble pas en souffrir outre mesure. Vient quand même le jour où elle prend le chemin de la stabul et où je l’examine. Oh, quelle belle actinobacillose nodulaire ! Pas fréquente sous cette forme mais tout y est : la durée de l’évolution, les nodules, leur aspect, le retentissement ganglionnaire y compris sur les ganglions du bassin. À ce stade, que peut-on faire d’intelligent ? À ce stade, rien ! Car dans le meilleur des cas et même après un traitement long il restera une énorme cicatrice fibreuse dans la cuisse. La saisie de la cuisse est donc inévitable et avec elle, la dépréciation du reste de la carcasse.