Une mouche qui devient préoccupante
Une nouvelle myiase se développe en région Nouvelle Aquitaine. Les ovins sont les principales cibles mais les bovins sont aussi concernés. La responsable est Wohlfahrtia magnifica, une mouche carnassière qui, jusqu’en 2012, ne faisait pas parler d’elle en zone de plaine en France.
Une nouvelle myiase se développe en région Nouvelle Aquitaine. Les ovins sont les principales cibles mais les bovins sont aussi concernés. La responsable est Wohlfahrtia magnifica, une mouche carnassière qui, jusqu’en 2012, ne faisait pas parler d’elle en zone de plaine en France.
En 2012, a été observée l’émergence de myiases d’une nouvelle sorte sur des brebis et agneaux dans le Sud de la Vienne et le Nord de la Charente. Les investigations ont montré qu’elles étaient dues à Wohlfahrtia magnifica, une mouche carnassière qui jusque-là ne sévissait apparemment qu’au-delà de 800 mètres d’altitude, dans les Pyrénées notamment depuis plus d’une vingtaine d’années, mais qui a l’air de se plaire désormais en zone de plaine. Les myiases sont le développement de larves de mouches carnassières sur la peau ou dans des organes des animaux. Dans le cas de cette mouche, les asticots, d’une longueur de 1 cm environ, sont « piqués » dans la chair et y forment des lésions « en galerie », creusées profondément, provoquant une forte douleur. En l’absence de traitement, la mort peut survenir après plusieurs jours (perte de tissus, choc toxinique ou surinfection) même si les pertes restent rares dans la pratique.
" Les ovins sont les principales cibles. Les lésions sont surtout localisées entre les onglons des animaux, en particulier ceux qui boitent, et au niveau de la vulve, notamment lors du retrait des éponges vaginales ", explique Dr Laurent Saboureau, de l’Alliance Pastorale. Dans les Pyrénées, la densité et la structure des élevages permettent de gérer cette maladie. Mais pour la Vienne et la Charente, l’augmentation du nombre de cas et l’extension géographique de la zone concernée d’une année à l’autre rendent la situation préoccupante. Une enquête menée en 2016 par les GDS et les chambres d’agriculture estime la prévalence globale à 2 % dans la zone géographique touchée. Mais, à l’échelle d’un troupeau, il est arrivé que jusqu’à 30 % des ovins soient touchés.
Il semblerait qu’il y ait beaucoup moins de cas sur les bovins. La maladie toucherait les troupeaux bovins surtout quand il y a des ovins à proximité, et davantage ceux qui sont en vêlage d’automne. Les lésions concernent la vulve des vaches, le nombril de veaux nouveau-nés, les plaies d’écornage des veaux et quelques cas ont été observés sur les yeux des bovins. La difficulté pour les bovins est surtout de faire les soins des animaux au pâturage dans de bonnes conditions, en fonction de la contention disponible. Le traitement consiste à appliquer un insecticide, de la deltaméthrine, en application directe. Le lendemain, il faut s’assurer que tous les asticots soient morts, et surtout ne pas en laisser dans l’environnement qui pourraient survivre, puis vérifier que la plaie évolue bien. Sur les ovins, les traitements insecticides efficaces sur les myiases classiquement rencontrées dans cette zone d’élevage (dues à la mouche Lucilia sericata) ne montrent pas la même durée d’efficacité.
Un comité de pilotage pour organiser la lutte
En 2016, les cas ont été observés de fin juin à mi-octobre. En 2017, année où le printemps a été sec, les premières attaques sont apparues dès fin mai et elles se sont prolongées jusqu’à début novembre. Les cas ont été observés dans le Sud de la Vienne, le Nord de la Charente, ainsi que dans le Nord de la Haute-Vienne. « Face au développement et à l’extension de cette maladie, un comité de pilotage a été créé en réunissant les GDS de la Vienne et de la Charente, les chambres d’agriculture, le GTV de la Vienne, des membres de la commission ovine de la SNGTV et le pôle santé animale de l’Alliance Pastorale », explique Pascal Robichon, président du GDS de la Vienne et de l’OVS (organisme à vocation sanitaire) de Poitou-Charentes. Des essais ont été menés en 2017, et un protocole de prévention pour les ovins est mis en place cette année. Il consiste en des traitements insecticides des animaux avant la mise à l’herbe puis un mois après la tonte, complétés par la distribution d’un aliment minéral répulsif à base d’ail et des passages au pédiluve. Les plaies de blessures à la tête des béliers et d’écornage des bovins doivent être soignées le plus rapidement possible, et les cordons ombilicaux des agneaux et des veaux asséchés dès que possible. « L’objectif est de protéger les animaux sur la période la plus longue possible, mais il s’avère compliqué d’arriver à couvrir toute la période à risque », observe Pascal Robichon. Pour l’instant, aucun essai n’a été mis en place sur les bovins et aucun plan collectif de lutte n’a été décidé. S’il existe des insecticides avec AMM sur bovins contre les myiases en général, il n’en existe pas de spécifique à Wohlfahrtia magnifica sur les bovins. Les membres du comité de pilotage ont aussi mené une enquête épidémiologique dans les élevages de la zone qui ont été peu ou pas touchés par la maladie, pour tenter de mettre en évidence des pratiques d’élevage limitant les infestations.