Une enquête sur l'évolution des pratiques des éleveurs face au changement du climat
Une enquête auprès de 163 élevages d’un large Massif Central a été menée pour connaitre le ressenti des éleveurs face aux évolutions du climat et savoir comment une partie d’entre eux ont commencé à faire évoluer leurs pratiques.
Une enquête auprès de 163 élevages d’un large Massif Central a été menée pour connaitre le ressenti des éleveurs face aux évolutions du climat et savoir comment une partie d’entre eux ont commencé à faire évoluer leurs pratiques.
Dans le cadre du programme AP3C (Adaptation des Pratiques Culturales au Changement Climatique), une enquête en ligne a été conduite l’an dernier auprès d’élevages d’herbivores répartis sur l’ensemble du Massif central.
Elle a permis de recueillir 163 avis d’éleveurs avec une surreprésentation des producteurs laitiers même si toutes les productions sont représentées : 101 bovins lait, 36 bovins viande, 18 ovins lait et 8 ovins viande. Cet échantillon n’est pas représentatif, mais les réponses apportées permettent de mettre en avant certaines tendances.
« Il s’agissait d’un questionnaire en ligne, rapide à remplir avec cinq rubriques : présentation de l’exploitation, impacts du changement climatique, ses répercussions sur l’élevage et le système fourrager, les leviers mis en place ou simplement envisagés pour s’adapter à ces évolutions et enfin les besoins en termes d’accompagnement », précisait Marie Miquel, en charge des réseaux d’élevage ovin de Bourgogne et d’Auvergne-Loire-Rhône pour l’Institut de l’élevage, et également chargée de superviser cette étude.
« Quel que soit le département où est localisé leur élevage, 99 % des éleveurs qui ont répondu ont déclaré avoir subi au moins un aléa climatique sur la période 2014 – 2020 en citant d’abord (à 88 %) la ou les sécheresses estivales, juste devant (76 %) les températures caniculaires, l’effet néfaste des gels tardifs de printemps (58 %) et les sécheresses automnales ou printanières. » Le questionnaire demandait de quantifier l’impact financier annuel de ces aléas. Le chiffre moyen avancé est de 14 000 euros par élevage. Les deux tiers de ces dépenses concernent des achats de fourrages ou de paille. La part restante est liée à la rénovation des prairies dégradées par le déficit hydrique et la chaleur ainsi qu’à des dépenses liées à un recours accru à l’eau du réseau pour abreuver le bétail.
Les éleveurs étaient ensuite interrogés sur les conséquences pratiques de ces aléas sur leur système fourrager et la conduite de leur troupeau. 78 % d’entre eux ont d’abord mis en avant la baisse du niveau de production des prairies et la nécessité de complémenter en pâture. Bon nombre ont également rappelé que ces évolutions du climat se traduisent par des difficultés accrues pour renouveler les prairies en fin d’été avec un surplus de travail pour affourager et abreuver les animaux et éventuellement les réalloter.
« 31 % des retours d’enquête soulignent ensuite l’impact défavorable d’une météo trop sèche et trop chaude sur les résultats de reproduction avec également un impact défavorable sur la production laitière tant sur les volets quantitatif que qualitatif."
Diversifier et renouveler plus souvent
L’enquête a souhaité savoir comment les éleveurs ont cherché à adapter leurs systèmes fourragers. La diversification des espèces et des variétés utilisées pour le renouvellement des prairies, l’introduction de légumineuses (luzerne…), la mise en place de cultures dérobées et la nécessité de renouveler plus fréquemment les prairies temporaires ont été largement citées.
Plusieurs éleveurs affichent leur volonté de choisir des variétés plus résistantes à la canicule et au déficit hydrique. Certains ont opté pour un léger agrandissement des surfaces à cheptel constant. D’autres font évoluer les techniques culturales pour préserver la réserve utile des sols. À signaler également qu’une large majorité (69 %) des éleveurs n’envisagent pas de mettre en place de système d’irrigation et que la moitié d’entre eux n’entendent pas faire augmenter la surface fourragère au détriment de celle consacrée aux cultures.
Ces choix seraient cependant à nuancer selon les espèces élevées et la localisation des exploitations. À signaler également dans certains départements et pour certaines productions (ovins…), le souhait d’avoir davantage recours aux surfaces pastorales et en particulier à des parcours agroforestiers.
Économiser la paille
Côté gestion des cheptels, 83 % des éleveurs qui ont répondu ont déjà mis en place une politique plus drastique pour détecter et réformer au plus tôt les animaux improductifs et 75 % déclarent avoir fait évoluer leur gestion du pâturage en choisissant le pâturage tournant ou le pâturage de nuit en périodes caniculaires.
Parmi les évolutions envisagées, à côté d’aménagements permettant de rendre plus aisément compatibles les bâtiments avec les canicules, des éleveurs ont évoqué l’installation d’un réseau d’eau plus efficace pour s’éviter les corvées de transport de tonne à eau lorsque les sources tarissent.
Autres idées à l’étude, faire évoluer les bâtiments d’élevage pour réduire les besoins en paille de litière. Et d’évoquer également certaines alternatives à la paille comme le recours aux plaquettes de bois. La mise en pension de certaines catégories de bovins et en particulier les génisses de renouvellement a également été évoquée.