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Un marqueur génomique de la tendreté
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Un marqueur de la tendreté de la viande a été breveté en 2006 par l´Inra. Plusieurs autres marqueurs de la flaveur ou du persillé ont aussi été identifiés en France. Ces premiers résultats ouvrent d´intéressantes perspectives d´application.
Les chercheurs de l´Inra de Theix ont mis en évidence une relation entre l´expression d´un gène, dénommé DNAJA1, et la dureté de la viande évaluée par un jury d´analyse sensorielle. « La protéine codée par ce gène contribuerait à ralentir le processus de mort cellulaire et donc la maturation de la viande », explique Jean-François Hocquette, directeur de recherches à l´Inra de Theix. Ce marqueur génomique est original au sens où il ne ressemble pas aux marqueurs de la tendreté étudiés et exploités à l´étranger. Il est intéressant car son niveau d´expression a permis d´expliquer, dans les conditions de l´expérimentation, près de soixante-cinq pourcents de la variabilité de la tendreté de la viande. Un brevet a été déposé en septembre 2006. Quatorze marqueurs de la flaveur et de la jutosité ont aussi été identifiés et ont fait l´objet de publications.
Jean-François Hocquette, responsable du projet, Carine Bernard et Isabelle Cassar-Malek sont les inventeurs du brevet. ©S. Giraud |
Chercher de nouveaux marqueurs
Ces résultats ont été obtenus par l´Inra en partenariat avec les professionnels de la filière bovine (APIS-GENE), dans le cadre du projet MUGENE du programme AGENAE (analyse du génome des animaux d´élevage). Ils ont porté sur l´entrecôte de jeunes bovins Charolais. D´autre part, un marqueur lié au persillé de la viande, A-FABP, qui conduit à la production d´une protéine de liaison des acides gras spécifiques des adipocytes trouvés dans le muscle, a été mis en évidence sur des jeunes bovins Limousins dans le cadre d´une collaboration avec l´Upra France Limousin et des collègues australiens.
La pertinence de ces marqueurs sera testée sur d´autres muscles, d´autres races et d´autres catégories d´animaux, dans d´autres conditions d´élevage. « Un marqueur n´a pas de valeur universelle, mais une certaine valeur dans des conditions définies », précise bien Jean-François Hocquette.
Certains marqueurs du persillé ou de la tendreté, pour lesquels des tests ADN de routine sont commercialisés dans d´autres pays, et notamment en Australie, ne sont pas valables dans les conditions françaises. Une étude à grande échelle sur 3000 jeunes bovins Charolais, Limousins et Blonds l´a montré (au sein du programme Qualvigène). Il faut donc poursuivre les travaux engagés en France et en Europe pour détecter de nouveaux marqueurs.
Mise au point d´un test
Si ces marqueurs se révèlent valables dans des conditions intéressantes en pratique pour la filière, il sera envisagé de mettre au point un test. La finalité de ces recherches est en effet de proposer des tests de routine, soit sur l´ADN, soit sur le produit d´expression des gènes, des caractéristiques du muscle et de la tendreté et flaveur de la viande. « Nous pouvons imaginer pouvoir orienter à terme avec ces tests la sélection des animaux, ou bien orienter les carcasses après un diagnostic au moment de l´abattage vers des traitements qui permettront d´optimiser la maturation », explique Jean-François Hocquette.
Un modèle de prédiction de la tendreté
L´autre axe visé est de rassembler dans un modèle de prédiction tous les facteurs connus pour influer sur la qualité de la viande, comme la vitesse de croissance, la technique d´élevage, des caractéristiques biochimiques des muscles, les conditions d´abattage, la durée de maturation. Les Australiens ont développé depuis quelques années un outil (dénommé MSA pour Meat Standards Australia) très élaboré de prédiction de la tendreté de la viande bovine. Il consiste à compiler de très nombreux facteurs dont la catégorie de l´animal, le muscle, la vitesse de croissance, le poids de carcasse, l´épaisseur du gras de couverture, la durée et la méthode de maturation, et aussi le mode de cuisson du morceau. pour aboutir à une note de tendreté allant de 3 à 5. La pertinence de ce modèle dans les conditions françaises fait l´objet actuellement d´une expertise par l´Inra et l´Institut de l´élevage, cofinancée par Interbev. « Si ce modèle se révélait transposable, les marqueurs génomiques de la qualité de la viande pourraient y être introduits. »