Dans l'Aveyron et le Tarn
Un camion-usine pour fabriquer l'aliment à la ferme
Une entreprise s’est équipée d’un camion qui fabrique l’aliment à la ferme pour un coût compris entre 24 et 37 euros par tonne. Les éleveurs semblent apprécier.
Le camion jaune en impose et ne passe pas inaperçu sur les routes des campagnes aveyronnaises et tarnaises. Pourtant, il ne livre rien. Il vient pour fabriquer l’aliment avec les matières premières produites sur l’exploitation ou que l’éleveur se fait livrer. « Il y a un an, lors d’une réunion commerciale, nous nous sommes dit: il faut développer les matières premières et proposer des rations moins chères », raconte Jérôme Rouve, dirigeant d’une petite entreprise d’agrofournitures (Socopa), basée à Saint-Affrique (Aveyron). Après une visite en Allemagne, il a acquis d’un camion de fabrication d’aliment à la ferme. Un investissement de l’ordre de 200000 euros qu’il aura rentabilisé plus vite que prévu. Cette unité mobile étant capable de fabriquer 6000 tonnes par an, il s’était donné trois ans pour atteindre la pleine charge. L’objectif sera atteint dès la première année tant la demande est grande.
L’équipement de fabrication est concentré sur la plate-forme du camion. Équipé d’un aplatisseur (mais aussi d’un broyeur pour les porcs) et d’un mélangeur, il peut fabriquer jusqu’à 5 tonnes d’aliment à la fois. Lorsqu’il arrive dans une ferme,Thierry, le chauffeur mémorise dans l’ordinateur de bord, la formule souhaitée par l’éleveur. Les matières premières sont aspirées une à une là où elles se trouvent (silo, bigbag, benne, stockage à plat), dépoussiérées, pesées puis aplaties et mélangées. Le camion est muni d’une réserve d’huile alimentaire pour assurer un mélange homogène et exempt de poussière. L’aliment fini est déversé dans les silos de stockage par une vis ou une soufflerie et peut se conserver trois à quatre mois. Quand les matières premières sont groupées, l’opération ne prend pas plus de 35 minutes. « La qualité du travail est très liée au savoirfaire du chauffeur », explique Jérôme Rouve. Bien que la Socopa vende des aliments et des matières premières, l’éleveur est libre de se fournir où bon lui semble insiste son dirigeant. La formule est calculée par un nutritionniste, prestataire pour la Socopa, et la traçabilité des produits est assurée. La fabrication est facturée entre 24 et 37 euros par tonne selon la quantité. Le camion ne se déplace pas pour moins de 3 tonnes.
Jérôme Rouve explique le vif intérêt des éleveurs, « en premier par la volonté de valoriser les produits de l’exploitation, en second pour la qualité de l’aliment. Ils me disent qu’ils ont de meilleurs résultats techniques. » Raison économique également: malgré le coût de fabrication, il estime que l’éleveur « gagne entre 30 et 70 euros par tonne », par rapport à un aliment acheté. Il ne cache pas que cette nouvelle activité lui a permis d’augmenter ses ventes de matières premières et d’accroître son chiffre d’affaires de 10 % alors que les ventes d’aliments sont plutôt à la baisse. « Mais, ce qui me conforte le plus, c’est que quelques grosses coopératives qui ont des usines d’aliments sont venus se renseigner et veulent acheter un camion parce que leur clientèle le leur demande. » Les unités mobiles sont très développées en Allemagne, Autriche et Belgique. « Ils se vend 140 camions en Europe tous les ans », précise-t-il. En France, il y en a à peine une dizaine. Celui de la Socopa pourrait bien faire des petits.
Ghislain Lauthier, éleveur dans le Tarn « Je fais fabriquer tout l’aliment pour les bovins »
« J’élève 70 vaches et je produis du veau d’Aveyron et du Ségala label rouge. J’ai aussi 300 brebis laitières. Je produis des céréales mais je ne couvre pas la totalité de mes besoins. Je fais fabriquer tout l’aliment pour les bovins à la Socopa par cinq tonnes. Avant, je travaillais pour partie avec de l’aliment complet et pour partie avec mes céréales et du complémentaire. J’ai commencé sur un lot de vaches de réforme puis j’ai continué avec les veaux. L’aliment est appétent et il n’y a pas de refus dans les nourrisseurs. Je n’ai pas encore fait mes calculs, mais je pense qu’en coût, ça doit être un peu moins cher. Et puis, il y a le travail. Avant, j’aplatissais les céréales et je les amenais aux veaux avec des seaux. J’ai installé une cellule pour stocker l’aliment et une vis souple pour l’amener directement aux nourrisseurs. Ça n’a rien à voir. »