Une sécheresse gravissime, et en plus cet été des cours d’eau à sec dans bien des régions… la situation des nappes phréatiques françaises peut-elle être qualifiée d’exceptionnelle cette année ?
Violaine Bault - En septembre 2019, les niveaux des nappes phréatiques sont globalement bas à autour de la moyenne. L’année 2019 n’est pas forcément exceptionnelle à l’échelle de la France, car au cours de l’été 2017, on avait des niveaux beaucoup plus bas. Grâce à la bonne recharge de 2017-2018 et malgré l’hiver 2018-2019 déficitaire, les niveaux ne sont généralement pas préoccupants. Cependant, une zone se démarque : celle des nappes des alluvions et cailloutis de Bourgogne, des alluvions et des couloirs fluvioglaciaires du Rhône amont et moyen, et des nappes du bassin amont de la Loire (est et nord du Massif central, calcaires jurassiques du Berry) - soit la Bourgogne et la région Auvergne-Rhône-Alpes. Ces nappes n’étaient déjà pas à un très bon niveau en sortie d’hiver 2016-2017, elles étaient très basses fin 2017, et ne se sont pas bien rechargées ni dans l’hiver 2017-2018, ni dans l’hiver 2018-2019.
La situation de ces nappes de Bourgogne et Auvergne-Rhône-Alpes peut-elle revenir à la normale en un seul hiver ?
V. B. - Les nappes se rechargent entre début octobre et mi-novembre, quand la pluie tombe et que la végétation n’utilise plus l’eau. Toute la question est donc : que va-t-il tomber cet hiver ? Les météorologistes ne savent pas répondre à cette question.
La pluie la plus efficace est une pluie fine qui dure longtemps. Il faut quelques heures pour que le sol se réhumidifie avant que l’eau ne puisse y descendre. Cependant, les nappes d’Auvergne et d’une partie de la Bourgogne sont plutôt de petite taille et sur du socle ou du calcaire (des roches fragmentées). Elles sont relativement réactives, c’est-à-dire que leur niveau ne met pas des mois à fluctuer. Si on a un « bon hiver » — s’il pleut suffisamment à partir de novembre — cela peut suffire pour retrouver un équilibre. Concernant les nappes des couloirs du Rhône et de la Saône, elles sont plus longues à réagir et donc à se recharger. Il faudrait soit un hiver très pluvieux, soit plusieurs « bons hivers » successifs pour retrouver des niveaux corrects.
Dans les autres régions, la situation est-elle plus favorable ?
V. B. - Les nappes de Corse sont, avant l’hiver, dans une situation très satisfaisante. Les nappes de l’Adour et du Gave de Pau ont des niveaux stables et modérément hauts. Les nappes des calcaires du Jurassique du sud de la Vendée sont dans une situation correcte. En revanche, la nappe alluviale de la plaine d’Alsace est à un niveau modérément bas à très bas, et la partie sud du Haut-Rhin reste à un niveau très bas.
Comment se règle l’équilibre entre le niveau des nappes phréatiques et le niveau des cours d’eau ?
V. B. - En France, la très grande majorité des cours d’eau coulent sur des roches perméables, et leur niveau est en relation directe et très étroite avec le niveau des nappes phréatiques. Les cours d’eau sont en quelque sorte l’exutoire des nappes phréatiques à travers les berges et les sources. Dans l’autre sens, si les cours d’eau sont à un niveau supérieur à celui de la nappe, en fonction de la topographie, ils alimentent la nappe. Les équilibres sont assez fragiles.
Les cours d’eau en relation directe avec les nappes phréatiques