Quel est le « plus » d’un concours National organisé au Sommet de l’élevage ?
Pierre Burgan - C’est d’abord et avant tout une fréquentation accrue. Le Sommet de l’élevage est le salon professionnel allaitant. Sur les 95 000 visiteurs annoncés par les organisateurs, tous ne passeront pas forcément nous voir mais les possibilités de contact seront sensiblement améliorées comparativement à un concours organisé dans un autre cadre. Même si cela ne se traduit pas forcément sur place par du commerce, cela favorise la mise en lumière de notre génétique avec surtout la présence d’un nombre conséquent d’étrangers.
Comment quantifier l’impact d’un concours organisé dans ce cadre ?
Lionel Giraudeau - Quand nos concours sont organisés en dehors d’une manifestation comme Cournon, nous retenons le principe de la gratuité pour les entrées. Difficile dans ces conditions de donner des chiffres de fréquentation, mais on voit bien que l’on est un peu « entre nous ». Aujourd’hui, les manifestations liées à la présence de bovins ont du mal à attirer les foules !
P. B. - Quand notre national est organisé dans un autre cadre, les éleveurs n’ont pas forcément le temps et l’envie de venir. La morosité économique de l’élevage et plus largement de l’agriculture est un facteur explicatif supplémentaire. Moins nombreux sur les exploitations, les éleveurs n’ont pas non plus toujours le temps de consacrer une journée pour venir voir des animaux en concours. Coupler cet événement à un salon agricole conséquent est un argument supplémentaire pour faire le déplacement.
D’où viendront les éleveurs participants ?
L. G. - Nous aurons 160 élevages venus de 40 départements avec une forte mobilisation du Sud-Ouest et en particulier d’Occitanie. Il y aura 320 animaux en concours et une trentaine de places pour des animaux « de filière » (descendance d’IA, broutards repoussés et broutards croisés gascon).
P. B. - Dans un concours Blond, nous approchons en général les 500 têtes. Nous avons dû faire des choix. Il n’y aura pas d’animaux de moins de 15 mois et pour les femelles, priorité a été donnée aux vaches suitées.
Les juges qui officieront ont-ils bénéficié d’une formation pour harmoniser leur jugement ?
L. G. - Nos trois juges uniques (deux Français : Jean-Claude Aguerre, éleveur dans le Pays basque et Florian Menet, éleveur en Loire-Atlantique et Marcel Gerritsen, éleveur en Hollande, l’autre pays de la Blonde) ont suivi les formations organisées par l’OS. Ces dernières permettent de bien se recentrer sur les fondamentaux. Compte tenu de la contraction des effectifs liée aux places qui nous ont été attribuées par les organisateurs, les seuls prix de groupe seront le prix d’ensemble et le prix d’élevage. Pas de prix de descendance et de famille cette année !
Peut-on imaginer, lors d’un prochain concours, avoir un animal génétiquement sans cornes sur la plus haute marche du podium ?
L. G. - Tout peut arriver, mais n’oublions pas que le gène sans cornes est arrivé très récemment dans la population Blonde d’Aquitaine avec l’introgression de sang venant d’autres races. Sur nos concours, les animaux mâles en lice doivent avoir au moins trois générations d’ascendants confirmés avant de pouvoir participer. Donc je ne dis pas que cela n’arrivera pas un jour mais, comme l’intervalle de temps entre génération est long en bovin allaitant, il faudra encore un certain nombre d’années. Le « sans cornes » se développe très calmement au sein du cheptel Blond français. Il y a peu de demande et le nombre d’élevages engagés dans cette voie se compte sur les doigts de la main.
P. B. - On ne veut absolument pas se couper de cette approche « sans cornes » mais on veut la maîtriser. Il n’est pas question de se lancer dans cette option pour faire le « buzz ». On préfère partir sur de bonnes bases pour proposer des animaux qui, outre le caractère « sans cornes », offriront un maximum de garanties.
Comment évolue le marché de l’exportation pour la génétique Blonde ?
L. G. - L’exportation d’animaux reproducteurs inscrits concerne autour de 500 têtes par an, essentiellement vendues dans l’Union européenne. Le top 3, côté destinations, a longtemps été l’Espagne, la Belgique et l’Allemagne. On voit depuis peu émerger une demande de la part d’autres pays, en particulier la Pologne, la Roumanie et la Hongrie. Sur pays tiers, ces exportations de reproducteurs ont concerné la Tunisie, le Maroc et l’Iran, mais pour des effectifs confidentiels.
Le marché des semences répond à une demande de différents pays, principalement pour du croisement. Il est plus compliqué à suivre dans la mesure où il y a plusieurs opérateurs et peu de données disponibles.
Comment évoluent les effectifs Blonds compte tenu de la décapitalisation en cours du cheptel allaitant français ?
L. G. - Accentué par la conjoncture, la PAC, la pyramide des âges des éleveurs et le contexte morose qui touche la plupart des activités d’élevage, la tendance n’est plus à l’expansion. Nous n’échappons pas à la décapitalisation en cours. De 533 000 vaches en 2016, on est redescendu à un peu plus de 500 000 mères l’an dernier. Dans le Grand Ouest, désormais nos effectifs plafonnent. Ils sont en recul dans le Sud-Ouest (hors Pyrénées et Piémont) où dès que la charrue peut passer, les cultures deviennent la priorité, même pour des terres où les rendements ne sont pas extraordinaires.
Le nombre de femelles finies abattues est-il en phase avec le nombre de boucheries où sont vendues une grande partie de leurs carcasses, de façon à maintenir au mieux leur valorisation ?
L. G. - Le léger recul de nos effectifs fait que ce chiffre est depuis deux ans proche de 96 000 à 97 000 têtes par an. Cela représente moins de 5 % de la production française de viande de gros bovins. C’est pratiquement une « niche ».
P. B. - La diminution du nombre de bouchers nous préoccupe. Ce sont eux qui valorisent le mieux nos animaux en pratiquant l’extension de la découpe. La Blonde a longtemps surfé sur des cours qui étaient somme toute corrects pour les femelles de boucherie. On sent que l’on est à un virage.
La Blonde est-elle suffisamment connue, tant auprès des bouchers que des consommateurs finaux ?
P. B. - C’est une de nos préoccupations. Pour y répondre, nous avons fait réaliser une enquête auprès d’éleveurs, de bouchers et de consommateurs dans le cadre d’un projet dénommé Avenir viande visant à valoriser l’image de la viande des animaux de notre race. L’intégralité de ce travail sera présentée sur un stand dédié lors du Sommet de l’élevage.
Et quels sont les principaux résultats ?
L. G. - Dans les grandes lignes, il ressort de la part des éleveurs et des bouchers une réelle reconnaissance de la qualité de la Blonde. De la part de nos éleveurs, le contraire aurait été surprenant ! Mais l’analyse est la même chez les bouchers habitués à travailler ces carcasses. Ils tendraient même à être plus chauvins que les éleveurs ! Et ils mettent tout particulièrement en avant sa tendreté naturelle. Côté consommateurs, notre race est trop peu connue. On est au bas du classement sur ce volet. Alors que la Blonde est la troisième race à viande française côté effectifs, c’est loin d’être le cas en termes de notoriété. C’est une lacune que nous devons combler dans les années à venir.