En conditions sèches
Gare au surpâturage des graminées
Les risques de surpâturage sont très importants cette année. Or si une plante a été surpâturée, son redémarrage est beaucoup plus lent et elle sera jusqu’à deux fois moins productive quand de bonnes conditions de pousse seront de retour.
Cette année, le risque de surpâturage est particulièrement important du fait du déficit de pousse des prairies et du manque de solution fourragère qui concernent de très nombreux élevages. En mai et début juin, la production était dans une grande partie du pays de l’ordre de 5 kilos de matière sèche par hectare et par jour à une période où normalement elle est de 55 à 60 kilos. « Pour ne pas amputer le potentiel de reprise des graminées, le plus important est de ne pas faire de surpâturage », alerte John Bailey de PatureSens.
« Une plante bien pâturée est une plante en bonne santé », explique le spécialiste. D’une part, grâce à ses réserves et à ses racines profondes, elle résiste beaucoup mieux à des épisodes secs prolongés et elle sort de dormance rapidement et facilement. D’autre part, le sol est mieux couvert et donc davantage protégé de l’évaporation et de l’élévation de température. Ceci y favorise une meilleure rétention de l’eau et des nutriments et facilite sa colonisation par les racines de la plante. Il y a beaucoup moins de risques pour les stolons et les rhizomes. En résumé, la plante se régénère rapidement et peut facilement repartir en production.
1- Une plante surpâturée est une plante qui lutte
Une graminée est surpâturée si la hauteur d’herbe à la sortie de la parcelle est inférieure à 2-3 centimètres. Dans ce cas, elle présente peu de réserves et moins de racines pour aller quérir l’eau et les nutriments qui se trouvent en profondeur dans le sol. C’est une plante qui lutte, elle ne peut pas développer ses racines sans feuillage et vice versa. De plus, le sol est plus exposé à l’évaporation et à la chaleur. Le ruissellement de la pluie sur la surface est accentué, et la rétention de l’humidité est réduite. L’humus et la matière organique sont aussi moins retenus. Les stolons sont très vulnérables à l’usure persistante des sabots et les rhizomes sont susceptibles de céder. Finalement, la mortalité des graminées est plus importante. Quand les conditions clémentes reviennent, elles mettent trois à cinq fois plus de temps à réagir, et produisent deux fois moins de matière sèche. Le compactage du sol rend encore plus difficile la reprise de production.
2- Le surpâturage pénalise d'abord les bonnes graminées
L’autre méfait classique du surpâturage est de pénaliser les plantes les plus productives en feuilles qui sont les plus digestibles et appétentes, à la faveur des espèces rampantes, envahissantes et de faible valeur fourragère. Il faut aussi ne pas oublier qu’une partie importante des réserves de la plante se trouve hors de la terre, dans sa couronne. Les sabots des animaux, si leur action dure dans le temps, participent aussi à la dégradation des réserves des graminées
Cantonner tôt les animaux sur une zone "sacrifiée"
Il est donc prioritaire de ne pas faire pâturer trop bas. Pour ceci il faut savoir, si les surfaces en situation d’être bien pâturées sont insuff i s a n t e s , prendre à temps la décision de cantonner les animaux sur une zone « sacrifiée ». « On ne peut qu’être gagnant au final à savoir prendre cette décision », assure John Bailey. Le plus difficile est ensuite de ne pas ramener les animaux sur une parcelle trop rapidement, comme il est tentant de le faire, au moment du retour des conditions poussantes. Il faut laisser le temps aux plantes, un temps de durée variable selon leur état de santé mais d’au moins deux à trois semaines, de récupérer avant d’être pâturées. La pratique du pâturage tournant facilite le respect de ce temps de récupération des plantes.