Une exploitation, un système
En Lozère, des génisses finies et des broutards primés
Une exploitation, un système
Les génisses « Fleur d´Aubrac » ont permis à Denis Bessière de ne pas se contenter de la production de maigre. Cette dernière reste cependant incontournable sur un système 100 % herbager.
Denis Bessière s´est installé en 1992 en reprenant l´exploitation familiale située à côté du village du Buisson dans le nord-ouest de la Lozère. Sur une cinquantaine d´hectares, cette dernière se composait alors d´un troupeau de 25 vaches exclusivement destinées à une production de maigre. Depuis, l´importance du troupeau et la superficie de l´exploitation ont doublé. En parallèle, Denis Bessière a investi dans les bâtiments en accordant une priorité à l´amélioration de ses conditions de travail. Depuis l´automne 99, les 48 places de la stabulation libre « logettes + caillebotis » logent toutes les vaches suitées avec une consommation de paille réduite aux seules cases des veaux et box de vêlage. Il y a 3 ans, les investissements ont porté sur la maison d´habitation. Enfin l´an dernier, la construction d´une grange couplée à quelques cases de stabulation paillée pour les broutards et génisses a permis de désaffecter la vieille étable entravée.
« Nous n´aurions pas autant investi si mon épouse ne travaillait pas à l´extérieur », reconnaît Denis Bessière qui s´avoue satisfait du confort de travail permis par ses nouveaux bâtiments. « L´hiver, il me faut moins de 2 h par jour pour alimenter l´ensemble du cheptel contre quatre l´an dernier lorsqu´il y avait encore la vieille étable. Cela va me permettre de consacrer davantage de temps à la surveillance et aux soins des animaux. »
Ce volet a été le point faible de la dernière campagne de vêlages au cours de laquelle des problèmes de santé ont obligé le jeune éleveur à avoir recours à de la main-d´oeuvre salariée et par conséquent ne lui ont pas permis d´avoir suffisamment l´oeil sur son cheptel. Cela s´est traduit par de mauvais résultats en terme de productivité numérique conséquence directe d´un trop fort taux de mortalité des veaux.
L´autre évolution majeure de ces dernières années est liée à la volonté de diversifier les sources de revenus avec la mise en place d´un petit atelier de production de génisses de boucherie destinées à alimenter la CCP « Fleur d´Aubrac ». Un atelier conforté par un CTE qui fixe à dix têtes par an le nombre minimum d´animaux à produire. Après deux passages à l´herbe, ces génisses sont finies sur une longue période en démarrant l´engraissement peu après la rentrée à l´étable. « Je cherche à ce que le lot puisse bénéficier de bonnes pâtures. Elles sont aussi les premières à rentrer début novembre avant que la qualité de l´herbe ne diminue. » A côté d´un foin appétent disponible pratiquement à volonté, leur régime de finition est basé sur une association orge aplati, plus concentré azoté dont la quantité distribuée augmente progressivement. Les dates de sortie s´échelonnent tout au long du printemps et les dernières partent en juillet à un peu plus de trente mois. « Cette activité de finition m´intéresse. Elle me permet aussi d´éviter d´avoir un système d´exploitation uniquement axé sur la production de maigre. »
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Le dernier lot de broutards est vendu en cours d´hiver après une phase de repousse en bâtiment. ©F. d´Alteroche |
Évolution prévisible du mode de renouvellement
Même si le cahier des charges ne l´y oblige pas, Denis Bessière tient à ce que toutes les génisses finies sur son exploitation soient également nées chez lui. Or compte tenu de l´inévitable tri à effectuer peu après le sevrage pour avoir dix génisses possédant le poids et la conformation requise pour faire des « Fleurs d´Aubrac » bien valorisées, il doit faire naître une quinzaine de femelles croisées sur son exploitation. Pour parer à un taux de mortalité excessif et à un sex-ratio défavorable, il est indispensable de mettre au moins 35 vaches en croisement charolais, soit plus de 70 % du troupeau. Si ce chiffre permet par la suite d´avoir de bons résultats techniques et économiques sur les ventes de broutards et de génisses grasses, il pénalise en revanche le volet génétique relatif à l´auto-renouvellement en race pure. Le nombre de génisses aubracs nées sur l´exploitation est à peine suffisant pour permettre un taux de renouvellement d´environ 15 %. Conséquence : les génisses de race pure ne sont pas assez triées et trop systématiquement mises à la reproduction.
De plus comme toutes les génisses sont saillies par un taureau aubrac pour leur premier vêlage, la plupart sont issues de primipares, ce qui tend à limiter leur format.
Une évolution qui pourrait devenir préoccupante. Denis Bessière en est bien conscient. Au sein des deux derniers lots, les génisses nées sur l´exploitation sont d´une qualité à peine suffisante pour faire des mères même pour une utilisation en croisement. D´ailleurs, il s´interroge sur la stratégie à adopter pour les années à venir. « Je n´envisage pas d´accroître le nombre de vaches mères et me sens plus d´affinités pour la production de viande que pour la sélection. Ce travail de finition m´intéresse. Est-ce que à terme, je n´aurai pas intérêt à accroître légèrement la taille de mon atelier génisses jusqu´à une quinzaine de têtes par an et parallèlement, conduire en croisement la totalité de mes vaches pour, en contrepartie, acheter à l´extérieur tout le renouvellement ? »
Un changement de stratégie qui aurait aussi l´avantage de simplifier le mode de fonctionnement du troupeau. L´objectif serait de travailler en confiance avec un éleveur du voisinage pour lui acheter chaque année une demi-douzaine de génisses pleines ou de 18 mois, présentant un minimum de garanties tant sur le plan génétique que sanitaire.
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