Des étapes à respecter pour travailler avec un chien de troupeau
Manipulation. Pour profiter d’un chien de troupeau utile et agréable, les ingrédients de la réussite sont
le choix de l’animal et le respect du temps nécessaire aux différentes étapes à sa formation. Parallèlement, le troupeau doit être préparé à cette nouvelle forme de relation entre le chien, les vaches et l’éleveur.
Les vaches allaitantes ne sont pas les animaux les plus faciles à travailler pour les chiens de troupeau. La première règle à respecter pour réussir, est de bien choisir la génétique du chien. « Dans ce type d’élevage, il est nécessaire que le chien dispose d’un très bon mental, qu’il soit sûr de lui et calme, avec ni trop ni pas assez de mordant », explique Jean-Michel Jolly, formateur agréé par l’Institut de l’élevage pour le dressage et l’utilisation des chiens de troupeau. Ce peut être un chien dont les deux parents travaillent sur des bovins viande, ou bien un chien issu de lignées dont la force mentale est connue. Pour réussir, il est ensuite indispensable de dispenser une éducation et un apprentissage solide au chien.
Suivre une formation — initiation et perfectionnement — est très fortement conseillé. L’idéal est que parallèlement, le troupeau soit progressivement habitué au chien. « On conseille d’introduire le chien auprès des génisses dans les deux semaines qui suivent leur sevrage. C’est la période de leur vie où elles sont le plus réceptives », conseille le formateur.
L’une des autres particularités en élevage allaitant est que le travail sur le troupeau n’est pas régulier dans le temps. « C’est à la fois un avantage et un inconvénient. Cela évite la routine qui peut être démotivante pour le chien ou ne pas favoriser sa concentration. Mais les connaissances peuvent se dégrader », explique Sébastien de Montmollin, formateur agréé par l’Institut de l’élevage. Et les bovins auront tendance à tester de nouveau le chien à son retour. « Si le chien ne travaille pas pendant un mois au cours de l’hiver, ce n’est pas dramatique. Mais il est intéressant et souvent possible de le faire s’exercer de temps en temps pendant quelques minutes, pour entretenir les connaissances de base, sur un lot de génisses qui sont hivernées dehors ou qui sont faciles à sortir. » On peut même aussi dans ce but entretenir huit à dix brebis. L’une des principales erreurs à éviter est de mettre trop tôt le chien au contact du troupeau, avec le risque qu’il se retrouve dans des situations trop difficiles pour lui. Si cela se produit, s’il se sent en échec, il peut devenir peureux ou bien agressif.
Un chien qui s’impose sans agresser les bovins
« Si le chien, bien préparé, se révèle opérationnel sur un troupeau de brebis dès l’âge d’un an et demi, c’est plutôt quand il atteint l’âge de trois ans à trois ans et demi qu’il le sera sur un troupeau de vaches allaitantes. Il sera alors fort, sûr de lui, apte à bien réagir en cas de difficultés avec une vache », explique Gaëtan Lefeuvre, formateur agréé par l’Institut de l’élevage.
Ce laps de temps de trois ans est celui qu’il faut compter pour « conditionner » le troupeau au travail avec le chien. Alors trois générations de génisses auront pu être habituées à lui avant de rejoindre le troupeau de mères. La présence du chien sera ainsi routinière, quotidienne. On obtient ainsi du chien et du troupeau un comportement stable le jour d’une manipulation particulière (ce qui ne dispense pas de bien préparer les choses : reconnaître le parcours et disposer un fil si nécessaire…).
Les spécialistes précisent qu’il demeure délicat de travailler avec un chien sur des vaches suitées de veaux venant de naître. Les risques sont importants que le chien soit mis en échec ou que la sécurité ne soit pas assurée, et cela exige des compétences particulières de la part du chien et de l’éleveur. Il est plus abordable par contre d’intervenir sur des vaches suitées de veaux âgés de quelques mois.
Une autre limite à laquelle le chien peut être confronté réside dans la taille du lot de bovins. Au-delà de trente ou quarante bêtes, la situation devient délicate car il ne peut pas être derrière, sur les côtés, et partout à la fois.
« Quand on dispose d’un chien qui travaille bien, on lui trouve un emploi à chaque fois que l’on intervient sur les bovins », estime Gaëtan Lefeuvre.
Un chien bien dressé peut intervenir partout
Le rassemblement des bovins à la barrière pour changer de pâture, avec déplacement sur chemin ou route, le chargement dans une bétaillère, le tri en pâture dans un lot sont les principales taches effectuées avec un chien. En bâtiment, on peut serrer les veaux dans leurs parcs avec les vaches prises au cornadis, contenir les animaux pendant que l’on ferme une barrière ou même sans barrière pour racler, les conduire dans l’installation de contention… « Il faut considérer le temps du dressage comme un investissement », résume Sébastien de Montmollin. Si les tâches demandées ne sont pas spécialement physiques, un chien est au top de ses moyens jusqu’à l’âge de 8 ans, et il travaille bien jusqu’à 10 ans grâce à son expérience. Dès qu’il a 5 ans, il est temps de songer à sa relève. Le jeune chien doit être logé dans son propre chenil et ne doit pas travailler avec celui déjà en place sur le troupeau durant tout le temps de sa formation : l’homme doit constituer sa référence unique et il doit apprendre à travailler seul.
Durant le temps du dressage, l’idéal est qu’une seule personne ne s’occupe du chien (même timbre de voix, un mot pour un ordre…). Une fois le chien adulte, plusieurs personnes peuvent l’utiliser mais l’idéal est plutôt que chacun ait son chien. Les éleveurs craignent souvent que l’introduction du chien ne rendent le troupeau plus agité et plus dangereux. Avec un bon chien, les animaux sont plus calmes au contraire affirment les spécialistes. « Le chien est un élément de sécurité », explique Jean-Michel Jolly. Travailler avec un chien modifie l’approche de l’éleveur vis-à-vis de son troupeau. « Quand on est seul, on pousse le troupeau devant soi. Alors qu’avec un chien, on est devant et le troupeau vient trouver refuge vers nous ou nous suit. » L’homme n’est plus le répulsif mais la source de réconfort, et le « méchant », c’est le chien. De quoi stimuler la fibre animalière de l’éleveur.