Aliments, carburants et engrais
Composer avec la volatilité des intrants
La volatilité du marché des intrants devient une constante. Si des décisions politiques pour la limiter sont nécessaires, on peut aussi rechercher des marges de manoeuvre en élevage.
L’application de la conjoncture du début de l’année 2011 sur les données moyennes des élevages des Réseaux d’élevage montre une augmentation du coût de production de 13 à 15 € pour 100 kilos (vif) en systèmes naisseur et naisseur/engraisseur, et de 24€ pour 100 kilos (vif) en système producteur de veaux sous la mère. Cela équivaut à une hausse des coûts de l’ordre de 4800 à 8000 € par élevage et par an.
UN TIERS DE LA HAUSSE LIEE AU POSTE ALIMENTAIRE
« Ces estimations masquent une grande variabilité entre élevages et selon les conduites alimentaires. Certains systèmes sont plus particulièrement sensibles : les élevages plus intensifs et ceux engagés dans une alimentation en ration sèche par exemple », expliquent Jean-Pierre Farrié et Patrick Sarzeaud de l’Institut de l’élevage. Tous systèmes confondus cependant, en moyenne, on peut retenir qu’environ un tiers de cette hausse du coût de production est imputable au poste alimentaire. Il est impacté par la hausse du prix des concentrés achetés et des engrais.
La valorisation maximale des fourrages, l’utilisation des capacités de compensation des animaux dans le temps, le contrôle précis des quantités distribuées sont les pistes mises en évidence par l’Institut de l’élevage dans un dossier spécial pour maîtriser les quantités de concentrés achetés. Le coût alimentaire pour la production de jeunes bovins à partir de broutards et d’aliments achetés est particulièrement sensible à la flambée des prix des matières premières. « Le coût des rations se situe en 2011 de 30 à 45 % supérieur à celui de 2010 selon le type de ration et les hypothèses pour le déroulement de la suite de l’année quant au cours des céréales », annoncent Patrick Sarzeaud et Didier Bastien de l’Institut de l’élevage. En pratique, il est possible de réduire l’apport de concentrés énergétiques dans les rations à base de maïs ensilage. Récolter un maïs de qualité et ajuster précisément le niveau de protéines dans la ration - 100 g PDI/UFV pour les jeunes bovins de race à viande - participent à cette amélioration du coût alimentaire. Substituer d’autres aliments au blé et au tourteau de soja selon les disponibilités, les coûts et les valeurs alimentaires est aussi souvent possible.
LA FACTURE DE CARBURANT À SURVEILLER
Ces travaux de l’Institut de l’élevage et des chambres d’agriculture montrent aussi que les postes autres que celui des concentrés achetés pèsent bien lourds dans l’augmentation actuelle du coût de production. L’évolution des prix des carburants et des engrais expliquent environ un quart de cette augmentation moyenne. « Concernant les engrais, on observe sur le passé une baisse régulière des niveaux de fertilisation minérale dans les élevages. Elle s’est amplifiée depuis 2008 et les niveaux d’apports sont restés bas en 2009. Cela concerne principalement les fumures de potasse et phosphore sur l’herbe où les apports ont été au moins divisés par deux. Ceci a permis de stabiliser les factures d’engrais », commente Patrick Sarzeaud. Il semble pourtant difficile de maintenir ce rythme, et ceci plus particulièrement dans les régions qui doivent reconstituer des stocks après une année de sécheresse.
« Concernant le poste carburant, nous n’avons pas encore observé dans notre suivi du coût de production de baisse de consommation liée aux fortes variations de prix. » Un certain nombre de pistes avaient été relevées en 2008 au moment de l’épisode précédent de flambée des cours pour réduire la facture et limiter les émissions de carbone. On peut citer par exemple le passage aux bancs d’essai des tracteurs pour connaître les plages économiques d’utilisation du moteur, et un ensemble de réglages qui participent à réduire la consommation de carburants (outils adaptés et bien réglés, pression des pneus, entretien du moteur, bonne répartition des masses).
Enfin une véritable démarche économique peut être envisagée pour limiter l’emploi du tracteur, que ce soit pour les tâches liées aux animaux (affourragement simplifié, maximisation du pâturage, circulation rationalisée entre bâtiments et silos…) ou pour les cultures, notamment en simplifiant l’itinéraire cultural. Parmi les autres charges qui ont augmenté entre 2010 et 2011, figure l’évolution non négligeable du coût des services. Ils suivent généralement l’inflation. Enfin les charges d’équipement, difficilement compressibles à court terme, peuvent elles aussi souvent faire l’objet d’une réflexion à plus long terme.