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Changement climatique : « J’ai adopté une conduite souple pour limiter les risques »

Le Gaec de la Blonde, dans les Pyrénées-Atlantiques, a adapté son système pour limiter l’impact des sécheresses d’été, qu’il s’agisse de la valorisation des surfaces fourragères ou de la répartition des vêlages.

Vaches de race blonde d'Aquitaine au pâturage dans les Pyrénées-Atlantiques. Prairie temporaire.
Pour assurer l’alimentation de ses lots, le Gaec de la Blonde mise sur la flexibilité dans la gestion des ressources fourragères.
© A.-L. Galon

« J’ai groupé les vêlages sur deux périodes pour diluer les risques. » Dans la tête de Mathieu Lagouarde, associé avec son père Christian sur le Gaec de la Blonde, à Bonnut dans les Pyrénées-Atlantiques, il s’agissait avant tout d’atténuer les risques sanitaires, mais cette organisation lui a également valu de se sentir moins pris au dépourvu face aux aléas climatiques.

Jusqu’à 2020, les vêlages étaient étalés sur l’année. Ces derniers sont désormais répartis sur février-mars et septembre-octobre, permettant de recaler les besoins des animaux sur la pousse de l’herbe : il n’y a plus en été de vaches en lactation que le déficit de pousse d’herbe affecterait particulièrement.

Les vêlages scindés en deux périodes

En conservant deux périodes de vêlages distinctes plutôt que de grouper l’ensemble des naissances, l’éleveur répartit aussi le risque climatique dans le temps et sur différentes catégories d’animaux. « Les vêlages de printemps permettent de faire du lait à l’herbe, ce qui donne de très beaux veaux avec un faible coût alimentaire », explique Mathieu, qui finit des taurillons à 14 mois et 480 kilos carcasse. Quant aux vêlages d’automne, ils favorisent les performances d’engraissement des vaches de réforme engraissées au printemps suivant. « Toutes les vaches grasses pâturent du 15 mars au 15 mai, décrit l’éleveur. Celles qui ont vêlé à l’automne "explosent" à l’herbe. » Les vaches, abattues à 58 mois, atteignent 550 kilos carcasse en moyenne. Une pesée est d’ailleurs prévue cette année pour mesurer leurs performances sur les différentes phases d’engraissement.

Le technopâturage s’adapte à la météo

Pour assurer l’alimentation de ces lots en s’adaptant à la météo, le Gaec de la Blonde mise sur la flexibilité dans la gestion des ressources fourragères. Les prairies temporaires regroupées sur la butte séchante autour du bâtiment sont semées en mélange multiespèce à base de ray-grass, fétuque et trèfle. Depuis 2017, l’éleveur y pratique le technopâturage, une forme de pâturage tournant dynamique (PTD) où les paddocks se succèdent pour former des couloirs conduits en fil avant. « La force du PTD réside dans la capacité à s’adapter en décalant les dates des coupes en fonction de la météo », explique Thomas Gareni, conseiller à la chambre d’agriculture des Pyrénées-Atlantiques. « L’ensemble des couloirs de pâturage sont mécanisables. Cette année, je débraye plusieurs parcelles pour y faucher de l’enrubannage car l’herbe pousse très vite au printemps », illustre Mathieu. Les lots de 25 vaches tournent sur les paddocks tous les trois jours en moyenne. « Quand il y a beaucoup d’herbe, elles peuvent atteindre quatre jours, mais l’été le temps de séjour est réduit à deux jours. » Le temps de repos des parcelles, de 18 jours au printemps, atteint 30 à 40 jours à partir de juillet. Mathieu, qui estime les hauteurs d’herbe à l’œil, se laisse guider par les vaches pour positionner le fil avant : « S’il y a des résidus, je réduis un peu la taille du nouveau paddock. À l’inverse, si elles sont impatientes, je rallonge. »

Au mois d’août, Mathieu réduit le chargement des parcelles : les vaches ayant le moins de besoins sont déplacées vers des parcelles plus éloignées, avec un temps de séjour fixe de trois jours par parc. Ne restent autour de l’exploitation que les vaches en lactation, qui ont davantage de besoins. En cas de manque d’herbe, l’ajustement se fait en pâturant les parcelles de fauche. « Je réalise mes foins dès le 10 mai afin que les parcelles aient le temps de repousser et soient disponibles l’été », explique l’éleveur.

 

 
Vaches de race blonde d'Aquitaine au pâturage dans les Pyrénées-Atlantiques. Prairie temporaire.
Le technopâturage fait partie des stratégies d'adaptation phares adoptées par l'éleveur, qui décale les dates des coupes en fonction de la météo. © A.-L. Galon

L’orientation des cultures comme variable d’ajustement

« Je n’ai pas peur de pâturer des prairies destinées à la fauche, même si la première coupe n’a pas été faite », affirme l’éleveur, qui a fait ce pari en 2022, année particulièrement sèche, afin de garder la « stratégie de pâture maximale. Tout cela nous permet habituellement de tenir l’été sans affourager », se réjouit Mathieu.

Pour anticiper le changement climatique, l’éleveur a implanté de nouvelles cultures fourragères sur une parcelle de 2 hectares dédiée à l’expérimentation. Après le sorgho en 2023, c’est de l’avoine brésilienne en semis direct qui y sera cultivée cette année derrière une céréale à paille. « Si je n’en ai pas besoin pour nourrir les animaux, elle sera soit rendue au sol, soit laissée en couvert », indique Mathieu.

Cet état d’esprit agile lui permet de s’adapter aux aléas de la météo, quitte à modifier l’orientation des cultures pour compenser une mauvaise pousse. « J’ai semé à l’automne 6 hectares de méteil pour ensilage, mais le pois n’a pas bien poussé. En parallèle, la pluie m’a empêché de semer les pailles. J’ai donc décidé de désherber le méteil pour ne garder que les céréales : je les récolterai en paille, et réaliserai de l’ensilage sur une prairie à la place du méteil », relate Mathieu.

AVIS D'EXPERT - Thomas Garéni, chambre d’agriculture des Pyrénées-Atlantiques

« Des leviers multiples »

 

 
Portrait du conseiller bovin viande
© AnimaLéa Photographie

« Le Gaec de la Blonde trouve chaque année des solutions de secours et des leviers qui lui permettent d’assurer le bilan fourrager. Cette adaptabilité repose notamment sur la pratique du pâturage tournant dynamique, qui lui permet de gérer en permanence le flux d’herbe, et sur la diversification de son assolement. Il y a parfois des prises de risque, comme en 2022, où Mathieu a fait pâturer les prairies de fauche l’été. Mais les pluies orageuses de fin d’été lui ont donné raison, car il a pu refaire son stock fourrager. »

Chiffres clés

  • 80 ha de SAU dont 30 ha de cultures (maïs grain, triticale, méteil grain) et 50 ha de prairies temporaires
  • 60 mères blondes d’Aquitaine en Label rouge Bœuf Blond d’Aquitaine
  • 2,8 UMO

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