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Broutards blonds : un marché hétérogène et atomisé

Les broutards blonds ont pris du poids, mais les engraisseurs du Piémont les souhaiteraient encore plus lourds et plus homogènes. Un marché beaucoup plus difficile que par le passé.

Le marché du mercredi à Agen (Lot-et-Garonne) reçoit des broutards de tout le Sud-Ouest (21 000 par an dont un tiers de Blonds). Une douzaine d’exportateurs viennent compléter leurs achats de début de semaine.
Le marché du mercredi à Agen (Lot-et-Garonne) reçoit des broutards de tout le Sud-Ouest (21 000 par an dont un tiers de Blonds). Une douzaine d’exportateurs viennent compléter leurs achats de début de semaine.
© B. Griffoul

L’alourdissement des broutards blonds d’Aquitaine est net depuis une dizaine d’années. Les chiffres des opérateurs commerciaux concordent : le poids moyen des mâles à la vente se situe entre 260 et 280 kilos. Des animaux qui se négocient à la pièce, autour de 900 à 1 000 euros. « Les éleveurs se sont organisés pour produire 50 kilos de plus par veau, aussi bien en mâles qu’en femelles », souligne Benoît Albinet, de Deltagro Union. « Petit à petit, les broutards se sont alourdis à cause d'une certaine mévente des plus légers », ajoute Jean-Claude Vaccari, négociant et exportateur en Haute-Garonne (13 000 broutards dont 9 000 Blonds). Cette tendance masque une hétérogénéité encore importante. Les veaux de 180 à 200 kilos restent nombreux alors que le débouché principal, l’Italie, réclame des animaux de plus en plus lourds. Dans le Piémont, où sont majoritairement engraissés les broutards blonds, comme dans le reste de l’Italie, l’engraissement s’est restructuré. Néanmoins, « il y a encore une catégorie d’éleveurs qui ont la capacité à bien s’en occuper, explique Jean-Claude Vaccari. J’ai des clients pour des veaux de 200 - 220 kilos. » Mais, ces élevages traditionnels, capables de conduire un engraissement sur un cycle long, se font de plus en plus rares. Les ateliers plus importants, semi-industriels, recherchent des broutards sevrés, bien préparés, voire alourdis jusqu’à 350 à 400 kilos, pour s’exonérer de la phase délicate du sevrage et les mener rapidement à 700 kilos de poids vif.

« Les petits veaux, je n’en veux plus »

Plusieurs exportateurs affirment d’ailleurs ne plus acheter de veaux légers. « Je ne travaille qu’avec l’Italie. Les petits veaux, je n’en veux plus », dit Jean-Manuel Blancal, négociant dans le Tarn (11 000 broutards de toutes races). Éric Sazy, dans le Tarn-et-Garonne, exporte des broutards blonds de 250 à 350 kilos (10 000 par an). Même fourchette de poids chez Aquitaine Europe Bétail (12 000 par an), en Lot-et-Garonne. « Les moins bons, on les revend sur le marché », explique l’un des associés, Alain Chiaradia. La société repousse également 3 000 veaux par an dans ses propres ateliers (voir ci-contre), tout comme Eric Sazy (2 000 par an). Les groupements de producteurs qui achètent la totalité des animaux de leurs adhérents, sont confrontés à cette même hétérogénéité. Deltagro compte, parmi ses actionnaires, deux coopératives du Sud-Ouest (Synergie et Lur Berri), commercialise 12 000 broutards blonds par an. Les plus légers (moins de 230 kilos) sont expédiés vers l’Espagne ou repoussés. Il y a également un marché à destination des engraisseurs français, et de façon plus anecdotique vers la Belgique et les Pays-Bas.

Le groupement Expalliance (5 000 broutards dont 4 000 blonds), dans le Lot-et-Garonne,  assure avoir réussi à limiter les écarts de poids, par le suivi des éleveurs. « La part des légers est relativement faible. Tous les veaux sont vus afin de les faire partir au moment opportun », affirme François Pallavidino, directeur. L’offre en broutards blonds est regroupée avec celle du groupement Univia, en Dordogne et l’exportation (55 % des effectifs) est assurée via des négociants.

 

« Le marché du Blond est de plus en plus sélectif sur la qualité »

Au-delà des poids, tous les opérateurs soulignent la difficulté de commercialiser les animaux médiocres, trop nombreux encore. « Environ 30 % des femelles et 20 % des mâles ne correspondent pas aux standards de marché qui permettent de valoriser la Blonde d’Aquitaine par rapport à ses qualités spécifiques. Un problème à la fois de génétique et de conduite », souligne Joël Labat, directeur de l’association d’éleveurs du Lot-et-Garonne (AG2M). « Le marché italien du jeune bovin blond est de plus en plus sélectif sur la qualité, insiste Benoît Albinet. Pour bien valoriser le baby, il faut du E ou du U+, sinon, les abatteurs préfèrent du Limousin. Cela place la barre très haut. Les  écarts de qualité sont de plus en plus pénalisés : 2,90 euros le kilo vif pour les très bons, 2,65 à 2,70 euros pour les déclassés. » Une différence de 150 euros par tête qui se retrouve sur le broutard. « La Blonde d’Aquitaine est la race qui a le plus de potentiel, mais elle a encore besoin d’être homogénéisée en développant davantage le côté viande », affirme Eric Sazy, également éleveur sélectionneur. « C’est la race la plus difficile à commercialiser aujourd’hui, lance Jean-Claude Vaccari. Elle est moins standardisée que les autres, plus chère à l’achat, plus difficile à engraisser et en Italie, sur les babys, il n’y a plus beaucoup d’écart de prix avec les autres races. »

Un marché dispersé sur tout le territoire

Avec des volumes de 10 000 à 12 000 têtes pour les exportateurs les plus importants, le marché reste atomisé et l’approvisionnement est dispersé sur tout le territoire. Ce qui ajoute à l’hétérogénéité. À cause du recul de l’élevage, le Sud-Ouest est de moins en moins pourvoyeur de broutards blonds. Aquitaine Europe Bétail s’approvisionne désormais majoritairement hors du berceau de race, dans toute la France et principalement dans l’Ouest. Selon les régions, « il n’y a pas la même façon de les faire », explique Alain Chiaradia. « Dans l’Ouest, il y a une bonne génétique et un bon potentiel de croissance, mais ils sont un peu moins qualiteux que ceux du Sud-Ouest, et surtout du Pays basque, réputés pour leur finesse », indique Benoît Albinet. Même dans le Sud-Ouest, les différences sont importantes entre le piémont pyrénéen, le Pays basque et les coteaux de la Garonne.

« C’est un marché de plus en plus difficile, affirme Alain Chiaradia, à l’unisson de ses collègues négociants. Avant, on achetait sur commande. Aujourd’hui, on achète la marchandise que nous trouvons et les animaux que nous ne pouvons pas vendre, nous les repoussons. Et, parfois, ils nous en manque. L’offre est très irrégulière. » « Le marché est plus difficile, il subit plus d’aléas mais il fonctionne, tempère François Pallavidino. Il faut produire ce dont ont besoin les engraisseurs en terme de poids et d’homogénéisation. »

 

Voir aussi article " Ambiance morose dans le Piémont ".

Un petit marché pour les femelles maigres

La majeure partie des veaux femelles blondes d’Aquitaine sont engraissées en France. Il y a néanmoins un marché à l’exportation, qui représente 20 à 25 % de l’ensemble des volumes de broutards blonds. « En Italie, la demande porte sur des femelles de 250 à 300 kilos. C’est un marché de niche à destination de la boucherie traditionnelle, détaille Benoît Albinet. À 200 kilos, elles sont plus difficiles à vendre, car elles sont trop légères pour les Italiens et trop lourdes pour les Espagnols. »

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