Bâtiments et paysage
Attention aux couleurs
Bâtiments et paysage
La qualité de l´implantation, l´aspect et les couleurs d´un bâtiment jouent un rôle-clé dans son intégration paysagère. Une réalisation réussie passe par une bonne réflexion en amont du projet. Petits rappels.
Compte tenu de leurs dimensions, les bâtiments agricoles et les ouvrages de stockage qui leur sont liés ont un impact visuel important dans le paysage et contribuent à transformer durablement un lieu donné. Leur conception comme leur lieu d´implantation doivent donc être particulièrement soignés pour se fondre le mieux possible dans le paysage. « Tout projet doit d´abord tenir compte de l´identité de chaque site. Chaque exploitation est un cas particulier avec la nécessité de bien prendre en compte les bâtiments et la végétation déjà existante mais aussi la topographie des lieux », explique Anne-Claire Marie-Jeanne, architecte conseiller au conseil d´Architecture, d´Urbanisme et de l´Environnement de l´Allier. Ces aspects sont autant d´éléments à prendre en compte pour déterminer, la forme et le volume du futur bâtiment, mais aussi les matériaux à utiliser et le lieu de la nouvelle implantation.
Le fait de prendre en compte ces aspects d´intégration paysagère ne signifie pas forcément un coût de réalisation du bâtiment plus élevé. « Il est tout à fait possible de faire quelque chose de joli en limitant les coûts. Le simple fait de changer le lieu d´implantation peut réduire les volumes de terrassement et d´empierrement des chemins d´accès avec autant d´argent à placer ailleurs si on reste sur la même enveloppe. De la même façon, si on est sur des terrains en pente on peut scinder des volumes pour éviter l´effet « boîte à chaussure posée au milieu d´un pré » en limitant là aussi le coût de terrassement. »
Pour implanter un bâtiment agricole dans le paysage, il faut donc se servir de l´existant tout en le respectant.
Un bon choix de couleur des matériaux : vu de loin, le nouveau bâtiment ©à gauche de cette exploitation de l´Allier ne se distingue plus des bâtiments plus anciens. ©CAUE 03 |
Cohérence avec l´existant
A l´heure où, tout comme pour les maisons d´habitation, l´architecture des bâtiments d´élevage tend à s´uniformiser quels que soient les départements, rappelons que ces derniers jouent un rôle important dans la composition des paysages ruraux. Ils permettent de caractériser les régions tout en rappelant aux différents observateurs le rôle de la présence et du travail des éleveurs dans la formation du paysage. L´harmonie qui se dégage du parc de bâtiment d´une exploitation contribue à en donner une bonne impression aux visiteurs. Elle va également participer à la bonne impression générale que ce dernier va pouvoir avoir d´une localité ou une région. « Les nouvelles générations d´agriculteurs tendent à être plus sensibles à ces aspects et à l´importance d´avoir un cadre de vie agréable. Il faut aussi souligner le rôle positif de leurs épouses. Beaucoup travaillent à l´extérieur et conçoivent l´exploitation d´abord comme un lieu de travail, séparé du lieu d´habitation. Pas question dans ces conditions de vivre avec un tracteur garé sous les fenêtres de la maison et de négliger les abords de cette dernière. »
En matière d´intégration paysagère, les principes de base à respecter pour un projet de construction concernent d´abord et dans l´ordre le lieu d´implantation, la nature du bâtiment, les matériaux utilisés, leur couleur et enfin l´accompagnement végétal déjà existant ou à prévoir pour en améliorer l´intégration paysagère. Le souci premier doit être la cohérence de la future construction avec les bâtiments déjà existants. Pour cela, l´organisation extérieure doit être traitée avec la même rigueur que l´intérieur. Autant commencer par mettre la topographie des lieux à son profit. Sur un terrain en légère pente, il est préférable d´implanter les axes de faîtages parallèles à la pente. L´esthétique va alors dans le sens de l´économique puisque cela limite à la fois l´impact visuel du projet et les mètres cubes de terrassement.
Autre point-clé, l´utilisation des replis de terrain pour tapir le bâtiment dans les creux du relief et non le mettre en avant et l´exposer à la vue et aux vents en le disposant sur une arête. Penser bien sûr aussi à la circulation des engins autour du (des) bâtiments et aux possibilités et éventualités d´extension de ces derniers. « Il faut s´interroger sur la pérennité de ce que l´on va construire. On est souvent coincé pour construire un nouveau bâtiment par un autre déjà érigé à un endroit peu opportun une dizaine d´années auparavant. Les éleveurs se disaient alors que ce serait le dernier qu´ils allaient construire. Même chose pour l´ancienne maison d´habitation. Elle peut être aménagée plus tard comme gîte ou logement de salarié. Il est donc prudent de la préserver en ne construisant pas au ras de ses fenêtres. »
Côté plan d´ensemble, les formes simples sont à privilégier, mais pour les grandes longueurs, il est préférable de découper les volumes. Des petites modifications qui peuvent paraître insignifiantes mais sont pourtant susceptibles de modifier beaucoup de choses dans la perception extérieure du bâtiment.
Cohérence des couleurs
Cette bonne perception est également conditionnée par la cohérence des couleurs choisies et par leur équilibre entre elles et les teintes dominantes du paysage extérieur et tout particulièrement celles des bâtiments déjà existants. Il est à cet égard important de respecter une harmonie de ton avec l´architecture traditionnelle de la région avec le souci d´établir une bonne cohérence entre le nouvel édifice et son environnement, qu´il soit architectural, végétal ou minéral. Dans la plupart des cas, la sobriété est un bon fil conducteur en optant pour la simplicité et le refus des contrastes violents. La couleur est un élément essentiel de la perception lointaine des bâtiments. « Et changer la couleur ne coûte rien, » souligne Anne-Claire Marie-Jeanne qui déplore certaines erreurs faites à une époque où le beige clair presque blanc et le vert amande étaient privilégiés, aboutissant à des contrastes violents pas vraiment du plus bel effet. Depuis les tons retenus ont bien évolué. « Maintenant on est davantage sur des tons plus sombres et mats rappelant la couleur des enduits traditionnels. »
Même si le problème concerne davantage les bâtiments d´élevage hors sol, le cas des silos d´aliment est à souligner. Ces derniers sont pratiquement toujours d´une couleur claire qui jure fortement dans le paysage.
Rappelons également que les couleurs des matériaux naturels évoluent au fil du temps. Par exemple le bois grisonne en prenant des tons variables suivant la nature de l´essence utilisée. Pour la couverture, le fibrociment est le produit le plus utilisé. Même si cela renchérit l´addition, le fait de choisir des fibrociments teintés dans la masse que ce soit couleur ardoise ou terre cuite permet de mieux respecter le site. Les bâtiments anciens ont pour la plupart des toits de l´une des deux couleurs précitées. Si ce sont les fibrociments non teintés qui sont retenus, la couleur claire lors de la construction va s´atténuer et foncer et paraîtra donc plus discrète au bout de quelques années. Quant à l´option des tôles type bacacier, leur coloration est indispensable puisqu´à l´inverse des fibrociments elles ne se terniront que très peu avec le temps.
©CAUE 03 |
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Avant/Après. Le métal gris argenté n´est pas ce qu´il y a de plus heureux ! Dans le cadre de l´extension de ce bâtiment situé juste à côté d´une route, il a été préconisé d´opter pour un bardage bois pour l´extension, tout en supprimant le stockage de paille en plein air à proximité et en plantant quelques arbres ou arbustes d´essences locales le long de la route.