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Atelier complémentaire : « La cohabitation entre les bovins et les équins booste la productivité de mes prairies »

Frédéric Busarello, à Ceyrat dans le Puy-de-Dôme, élève des traits comtois aux côtés de ses vaches limousines. Passionné de chevaux, la gestion des pâturages aux retombées économiques indirectes est le second motif d’intérêt pour cette association.

La ferme de Bonant illustre à merveille l’association des chevaux de trait avec les bovins allaitants pratiquée dans le Massif central. Converti à l’agriculture biologique en 2016, Frédéric Busarello y exploite un troupeau de 70 mères limousines et seize juments comtoises dans un environnement de moyenne montagne, entre 650 et 800 mètres d’altitude.

Deux élevages, une seule conduite

Les équins et les bovins se conduisent de manière similaire, ce qui facilite le travail en élevage mixte. Seule spécificité de l’élevage équin, l’éventuel dressage pour l’utilisation des chevaux (traction agricole ou de loisirs, débardage…) qui demande un investissement en travail plus conséquent. Les poulinages ont lieu de janvier à mai et les vêlages de février à avril pour faire profiter au maximum poulains et veaux du lait produit par leurs mères à l’herbe.

Les lots se retrouvent chaque année sur le même parcours parcellaire. « Pour trente vaches, je mets au minimum deux juments suitées pour qu’elles ne s’ennuient pas », indique Frédéric. Le chargement de 0,7 UGB/ha (unité gros bovin par hectare) témoigne d’une gestion économe et autonome des surfaces fourragères. « Il faut être précautionneux lors de l’introduction des juments au printemps en évitant de les mettre avec des vaches prêtes à vêler ou suitées de très jeunes veaux, précise l’éleveur. L’ensemble acquiert une docilité naturelle qui facilite les déplacements d’un parc à l’autre. Instinctivement, les chevaux prennent la tête de la troupe, suivis des veaux puis des vaches. »

La cohabitation des deux espèces herbivores induit un « effet dilution » des œufs de parasites : ceux des bovins et des équins étant spécifiques, chacune des espèces agit comme un cul-de-sac pour les parasites de l’autre. « Grâce à une surveillance par coproscopie, j’utilise de façon plus ciblée les vermifuges et aujourd’hui, je ne traite plus les adultes », détaille Frédéric. « De plus, je remarque moins de mouches sur les chevaux, se plaît-il à observer. Les hirondelles les chassent en suivant les troupeaux dans les différentes parcelles. Cela a un effet apaisant sur les animaux. »

 

 
Les chevaux comtois et vaches limousines paissent de façon complémentaire, les chevaux valorisant les refus bovins, estime Frédéric Busarello, éleveur de bovins viande ...
Les chevaux et vaches paissent de façon complémentaire, les chevaux valorisant les refus bovins, observe Frédéric Busarello. © G. Gapihan

Le plein de matière organique

La cohabitation des chevaux avec les vaches bénéficie également aux prairies. « S’il n’y a pas de mixité au pâturage, nos prairies ne sont pas à l’optimum de leur rendement », estime Frédéric. L’éleveur constate chaque année une amélioration du couvert végétal et de sa biodiversité.

Les chevaux et les vaches paissent de façon complémentaire, les chevaux valorisant les refus des bovins. « L’hiver, les chevaux pâturent seuls l’ensemble des parcelles pour nettoyer les refus et préparer les prairies pour le printemps. Le fait de brouter plus ras permet aux plantes non dominantes de recevoir davantage de lumière et de s’épanouir », relève Frédéric. Coté engrais, « j’apprécie que le fumier et le crottin maintiennent à eux seuls la matière organique et laissent une grande place aux légumineuses. Les crottins et l’urine des chevaux sont plus riches en azote, calcium et potasse que ceux des bovins. De plus, ils sont répartis sur les zones que le cheval ne consomme pas induisant ainsi un transfert de fertilisation rendant la pelouse plus homogène », développe l’éleveur.

Un revenu complémentaire

Pour Frédéric, la conduite raisonnée de poulinières génère un revenu complémentaire qui avoisine les 24 000 euros par an entre 2021 et 2024. Établie sur une moyenne de trois ans, la marge brute sur charges opérationnelles directes (hors carburant, matériel, charges locatives… non spécifiquement affectables) de la troupe de poulinières s’élève à 1 200 euros par jument à la saillie, grâce notamment à des coûts alimentaires faibles. Ces atouts sont cependant grevés par des frais d’élevage et vétérinaires (identification, puçage, concours, vaccinations, échographies…) nettement plus élevés, d’où un différentiel de 300 euros au profit des bovins, qui dégagent une marge brute de 1 500 euros par vache à la saillie.

Une étude menée sur 140 élevages du Massif central, qui pèse pour 30 % des effectifs nationaux de chevaux de trait, montre qu’économiquement la commercialisation des produits de l’élevage de chevaux de trait s’apparente beaucoup à de la cueillette, car, eu égard aux faibles effectifs, un quart des élevages peut ne pas réaliser de ventes sur une année. Pour les autres, le chiffre d’affaires moyen annuel s’établit à 6 225 euros et constitue un revenu d’appoint. Pour le quart supérieur, ce chiffre s’élève à 14 750 euros. Un certain nombre d’éleveurs tirent donc un revenu non négligeable de cette activité. Les débouchés sont soutenus tant en élevage (34 %) qu’en utilisation (15 %) où la demande est forte. Pour la boucherie (51 % des débouchés), le Massif central reste une terre d’animaux maigres (poulains laitons ou repoussés, le pendant équin des broutards) qui sont le plus souvent finis en Espagne ou en Italie.

« La repousse de poulains valorise les pâturages d’altitude »

 

 
Au Gaec Des Éoliennes dans le Puy-de-Dôme, une dizaine de poulains accompagnent les vaches salers en estive.
Au Gaec Des Éoliennes dans le Puy-de-Dôme, une dizaine de poulains accompagnent les vaches en estive. © G. Gapihan

Au Gaec Des Éoliennes, à Mazoires dans le Puy-de-Dôme, Gérard Verdier a opté pour la repousse des poulains pour valoriser ses pâturages d’altitude sans se préoccuper de la gestion de la reproduction équine (monte, poulinage). À 1 100 mètres d’altitude, ses 70 vaches aubracs et salers conduites en système naisseur sont accompagnées chaque année par des poulains bretons et comtois. Ces derniers sont achetés entre fin février et début mars à 7 ou 8 mois pour être repoussés et vendus à l’automne, à destination de l’Espagne. « J’en passe une dizaine par an qui est conduit entièrement à l’herbe avec les vaches. J’ai en général dans les lots d’estive un poulain pour dix vaches. Les résultats économiques sont très variables d’une année sur l’autre, mais se situent en moyenne à 350 euros net par poulain. En 2022, j’ai réalisé un très bel exercice, car les poulains avaient bien poussé sans apport au champ et les cours à l’automne se situaient à un bon niveau. En 2023, avec la sécheresse, j’ai dû les complémenter, les croissances ont baissé. Je les ai donc vendus un peu plus tard à des cours moindres et la marge s’en est ressentie », explique-t-il. 

Dans ce système, s’il y a peu de travail du fait de la conduite mixte, les poulains en croissance ont les mêmes effets bénéfiques sur les prairies que les juments. Les marges sont toutefois tributaires du climat et des ressources fourragères, d’éventuelles mortalités et de l’évolution des cours à la vente.

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