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Élevage laitier : 42 heures par semaine avec des vêlages groupés

Choisir un système en vêlages groupés structure le travail en séquences fortes sur l’année. Enregistrements à l’appui, c’est 42 heures par semaine en moyenne ! Les éleveurs herbagers gèrent bien les pics de travail grâce à la rationalisation et la simplification des tâches.

<em class="placeholder">Au premier plan, les génisses de 7-8 mois, au second les génisses de 19-20 mois et au fond les vaches traites. </em>
Les vêlages groupés réduisent la surveillance à trois troupeaux. ici, au premier plan, les génisses de 7-8 mois, au second les génisses de 19-20 mois et au fond les vaches traites.
© I. Pailler

Vingt vêlages en une semaine, pour certains, c’est simplement inenvisageable. Pour ceux qui ont fait le choix des vêlages groupés, c’est un aboutissement. Ils attendent avec impatience le redémarrage de l’activité. L’étude Velbio, coordonnée par la chambre d’agriculture des Pays de la Loire, montre un léger développement de cette pratique dans le Grand Ouest. Elle recense 17 % d’élevages laitiers biologiques en vêlages groupés sur une ou deux périodes : principalement au printemps (centrée sur mars) et à l’automne automne (centrée sur septembre), ou les deux.

42 heures par semaine en moyenne

Dans le Finistère, vingt-cinq éleveurs bio très herbagers travaillent en groupe pour améliorer les résultats de leur système en vêlages groupés. Les périodes retenues pour les naissances sont principalement la sortie d’hiver–printemps pour profiter ensuite de la pleine pousse de l’herbe, mais aussi l’automne ou une double période dans les situations d’accessibilité limitée au pâturage. Ils ont enregistré leur temps de travail pendant dix semaines réparties sur l’année et chiffré les conséquences de cette répartition des vêlages sur le calendrier de travail annuel.

En extrapolant les résultats sur l’année, les exploitants travaillent en moyenne 2 204 heures par an, soit 42 heures par semaine. Ce chiffre varie du simple au double : de 30 à 62 heures. Les pics de travail, avec les périodes intenses de vêlage et/ou les récoltes d’herbe au printemps, comptent en moyenne 30 % de travail de plus que les horaires habituels. Ces semaines les plus chargées comptent alors de 40 à 70 heures de travail.

Un tiers du temps consacré à la traite

Les éleveuses et éleveurs du groupe sont en agriculture biologique avec des exploitations très herbagères qui comptent seulement 2,5 % de maïs dans la surface fourragère. Les surfaces en cultures de ventes sont quasi inexistantes. La conduite des prairies est faite pour maximiser le pâturage, quitte à valoriser des stocks sur pied en été et en hiver. Ils veulent réaliser le moins de stocks fourragers possible et distribuent seulement 100 kilos de concentrés et minéraux par vache et par an. Cela se traduit par une part importante du temps de travail dédiée à la traite, avec 33 % du temps, et aux soins des animaux (alimentation, gestion du pâturage, reproduction, gestion des lots…), avec 26 % du temps. Le reste du temps est réparti entre les travaux des champs (13 % du temps), l’entretien des bâtiments, matériel et clôtures (16 % du temps) et les travaux administratifs, rendez-vous et réunions (12 % du temps). Le temps de travail est supérieur pour ceux qui travaillent seuls ou qui emploient un salarié. Les éleveurs prennent en moyenne 19 jours de congés par an et disposent d’une demi-journée libre par semaine.

Simplification et rationalisation les tâches

La répartition du travail sur l’année est très liée à la taille du troupeau (43 vaches par exploitant en moyenne, de 20 à 86 vaches dans le groupe) et la durée de la période de vêlage (de 1,5 mois très groupé à 4 mois groupé « cool »). Pour parvenir à économiser du temps, le travail est rationalisé avec des conduites par lot et une spécialisation des tâches par période. « L’avantage d’avoir des vêlages très groupés est que, chaque mois, il est facile de savoir sur quelle tâche il faut se concentrer. Les travaux à réaliser se superposent peu. Nous ne nous dispersons pas avec un temps pour les naissances, un temps pour la surveillance des chaleurs et la reproduction, un temps pour les récoltes. Nous limitons aussi les lots à suivre avec des animaux au même stade physiologique », explique le groupe d’éleveur.

<em class="placeholder">vaches laitières nourrices</em>
Une fois l’adoption bien en place, les vaches nourrices simplifient l’élevage des veaux en vêlages groupés de printemps. © A. Guillou

Les choix techniques de simplification influent aussi beaucoup sur le temps de travail : fermeture de la salle de traite, recours à la monotraite tout ou partie de l’année (trois exploitations sur quatre), élevage collectif des veaux au milk bar ou vaches nourrices, faible renouvellement, croisement de races pour améliorer la fertilité et la rusticité du troupeau, assolement tout herbe ou non, quantité et qualité des stocks fourragers à réaliser et valorisation des stocks sur pied en été et en hiver… Plus la simplification est poussée loin, plus l’économie de temps de travail est au rendez-vous : 14 heures de travail sont nécessaires pour produire 1 000 litres de lait (de 8 à 26 heures pour les extrêmes).

Ces choix de simplification ont bien entendu des répercussions sur les volumes de lait vendu : 162 000 litres par exploitant et par an en moyenne (de 115 à 363 000 l) avec des vaches à 3 670 litres de lait vendus par an (de 2 500 à 6 000 l/VL/an) et donc sur les performances économiques.

Rémunération de 22 €/h

En 2023-2024, dans ce groupe, le revenu annuel disponible moyen est de 48 000 euros par exploitant. Il cache une forte disparité avec des revenus annuels allant de 8 000 euros à 125 000 euros par personne. Quand les éleveurs comparent la rémunération horaire permise par leur système, ils sont marqués par sa grande variabilité : 22 euros en moyenne avec des variations de 5 à 42 euros de l’heure. Et ce n’est pas forcément ceux qui travaillent le plus qui gagnent le plus. Au sein du groupe, cette étude ouvre la réflexion sur les conditions pour limiter le temps de travail en production biologique tout en conservant un volume de production suffisant, une rémunération conforme aux attentes et une bonne qualité de vie.

La reproduction est la période cruciale

Même si la période de reproduction est condensée dans ces systèmes en vêlages groupés, c’est le moment du plus gros stress de l’année. « C’est la période où il ne faut pas se rater. Les résultats de la saison suivante se jouent là », témoignent les éleveurs du groupe finistérien. Les deux tiers se sont formés pour réaliser eux-mêmes les inséminations. « En inséminant juste après la traite, les vaches ne sont pas isolées longtemps et pas stressées, ce qui est favorable pour le taux de réussite. »

En termes d'organisation, ils souhaitent faire naître les génisses de renouvellement sur les trois à six premières semaines. Sur le premier et éventuellement le second cycle, les IA se font en race laitière, parfois sexées pour les races à faible valorisation bouchère. Le relais est ensuite assuré par les inséminations en croisement viande ou les taureaux. Les échographies permettent de s’assurer que les vaches sont pleines pour la saison suivante et de prévoir les réformes. Le mid-point calving ou nombre de jours nécessaires pour atteindre la moitié des vêlages est le critère des anglo-saxons pour qualifier cette performance. Abaisser ce nombre autour de 20 jours est un gage de réussite économique, surtout en cas de fermeture de la salle de traite.

« La meilleure organisation possible pour avoir du temps pour nos trois enfants »

Aurélie Cheveau, en Gaec dans le Finistère

« Avec Madeg Join-Lambert, mon conjoint, nous étions auparavant animateurs techniques dans les réseaux GAB Civam où nous avons eu l’occasion de découvrir les vêlages groupés de printemps. Convaincus par la cohérence technique et les performances économiques de ces systèmes, nous avons décidé de nous installer. Chose faite en janvier 2018 ! Nous avons trouvé une structure de 85 hectares, dont 75 hectares accessibles, dans le sud du Finistère. Nous avons mis en place rapidement des changements : conversion bio, arrêt des concentrés, monotraite deux mois après l’installation, fermeture de la salle de traite au bout de deux ans d’installation. Aujourd’hui, nous sommes toujours en recherche de simplification du travail : tous les animaux hivernent à l’extérieur, notamment en bale grazing. Les vêlages sont très groupés en mars-avril (90 % des vêlages en mars). Nous cherchons à maximiser le pâturage et à minimiser les stocks consommés. Ainsi, en 2024, le pâturage représentait 85 % de la ration des animaux. Avec 76 vaches croisées et 260 000 litres de lait vendus, notre système est rentable et économe en temps de travail. Comme, depuis l’installation, nos trois enfants sont nés, c’est bien de disposer de temps pour s’occuper d’eux et de vivre au rythme des saisons. »

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