Après le gel, la filière viticole face aux intolérances de l’opinion publique
Après une semaine de lutte contre le gel, vignerons et vigneronnes doivent maintenant affronter l’opinion publique. Sur la toile comme sur le terrain, les plaintes face aux gênes occasionnées par les dispositifs antigel se multiplient, et mettent les nerfs de la profession à rude épreuve.
Après une semaine de lutte contre le gel, vignerons et vigneronnes doivent maintenant affronter l’opinion publique. Sur la toile comme sur le terrain, les plaintes face aux gênes occasionnées par les dispositifs antigel se multiplient, et mettent les nerfs de la profession à rude épreuve.
Le grand n’importe quoi des réseaux sociaux s’est encore illustré cette semaine sur la toile. Alors que les fils d’actualité se paraient de photos de bougies, éoliennes et autres dispositifs antigel, on a vu fleurir au fil des jours des commentaires en totale opposition avec la détresse que connaissent actuellement les professions viticole, arboricole et maraîchère.
Certains propos, parfois cocasses, auraient pu prêter à sourire dans un autre contexte. À l’image de cet internaute qui explique que « tous ceux qui cultivent savent qu’il ne faut rien planter avant les saints de glace. Ils n’avaient qu’à pas semer aussi tôt », sous un article du parisien. Un message qui témoigne de l’incroyable méconnaissance des internautes sur les questions agricoles, mais qui n’ont pour autant aucun complexe à donner leur avis.
Des propos qui franchissent la barrière de l’outrage
D’autres, ont parfois eu des réactions nettement plus virulentes, provoquant en retour la colère des viticulteurs et des viticultrices. « Demander à être reconnu catastrophe naturelle, c’est absolument intenable d’entendre ce genre de propos en pleine pandémie. […] Les faiseurs d’alcool, dehors ! », commentait un internaute sous un article du Midi Libre.
Un autre écrivait sur la page Facebook « Tu es de Beaume de Venise si… » : « encore un inconscient, un égoïste ou un jemenfoutiste qui allume un feu et qui empeste tout le village juste pour son bien être [….] Nous sommes tout le village à respirer cette incivilité. » C’est vrai enfin, allumer un feu par -6°C à 3h du matin pour faire griller des marshmallows, il y en a marre…!
Quant aux articles sur les vols d’hélicoptères, inutile de préciser que ce sont ceux qui ont provoqué les réactions les plus violentes, franchissant clairement la barrière de l’outrage.
Des critiques sur les fumées provoquées par les bougies antigel
Sur le terrain, la situation est elle aussi extrêmement tendue. « Il y a eu de vives critiques de la part de riverains à la suite des fumées provoquées par les bougies antigel cette semaine », confirme Christine Monamy, responsable agro-méteo au Bureau interprofessionnel des Vins de Bourgogne (BIVB). Alors que la pénurie de bougies se profile à la veille d’un second épisode annoncé la semaine prochaine, le brûlage de paille est une possibilité de plus en plus envisagée. « Encore faut-il avoir les dérogations, pose Christine Monamy. Vu le contexte avec les riverains, il est peu probable que ça arrive ».
Appel à la tolérance
Rappelons quelques faits sur l’enjeu que représente la protection des vignes contre le gel. L’avenir de la récolte se joue sur quelques nuits de grands froids, car une fois grillés, les bourgeons fructifères ne redémarreront pas. Des conséquences sur le rendement l’année qui suit l’épisode de gel sont même parfois constatées. C’est donc somme toute le revenu annuel du ou de la chef∙fe d’exploitation qui est en jeu.
Ces chef∙fes d’exploitations viticoles, en plus de cultiver la vigne et de faire du vin sont aussi bien souvent comptables, responsables commercial, marketing, œnotourisme, qualité, approvisionnement, ressources humaines... Donc effectivement, quand les températures annoncées passent sous la barre de 0°C, ils renoncent au sommeil et font ce qu’ils ont à faire pour sauver leur récolte. Qu’est-ce qu’une poignée de nuits de sommeil perturbées face à une année de travail gravement compromise ? Que chacun prenne le temps de remettre les choses en perspective.
Sans attendre de celles et ceux qui s’offusquent un quelconque soutien, il serait raisonnable d’espérer un minimum de tolérance et de compréhension.