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Estimer son bilan carbone : agir à l’échelle de son exploitation

Quelles sont les émissions carbones de mon exploitation ? Comment les limiter ? Nombreux sont les apiculteurs qui engagent des réflexions écologiques sur leur activité. Au-delà de la limitation de leur impact carbone, ils se questionnent aussi sur la diminution de leurs dépendances aux principaux intrants (carburant, verre, sucre) et donc sur la résilience globale de leurs exploitations.

Des apiculteurs engagés

Céline et Julien, du Gaec Avelye, en Haute-Savoie (74) font partie de ceux-là : « Ce qui se passe au niveau climatique est une préoccupation majeure d’un point de vue personnel ». Avec d’autres, ils ont sollicité leur ADA (Aura) pour chiffrer leur impact environnemental. « Nous avions besoin de nous rendre compte de notre impact réel, pour cibler les postes les plus émetteurs, et ainsi diminuer nos émissions. »

Un outil : le bilan carbone

Développé par l’Ademe en 2002, le « bilan carbone » est une méthode de comptabilisation qui couvre en réalité toutes les émissions de gaz à effet de serre (GES), notamment : le dioxyde de carbone (CO2), le méthane ou encore le protoxyde d’azote. Dans le calcul, les émissions sont toutes ramenées à un équivalent CO2, selon un indice proposé par le Giec (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat), qui tient compte du potentiel de réchauffement global. Cette méthode a été simplifiée et adaptée par l’ADA Aura à l’activité apicole, pour fournir un outil d’autodiagnostic aux apiculteurs.

Pour calculer son bilan carbone, il faut étudier l’ensemble des flux de l’exploitation, sur une année. Ainsi, toutes les consommations de l’exploitation sont passées à la loupe : produits de nourrissements, produits vétérinaires, véhicules, emballages, matériel de ruche, bâtiment, … À chaque consommation est associée une émission de GES, selon un « facteur d’émissions ». L’ADA Aura a choisi d’utiliser ceux de la Base carbone, de l’Ademe, en libre accès sur leur site internet. Ce facteur correspondant à l’ensemble des émissions directes et indirectes de toute la vie d’un procédé, d’un produit ou d’un service.

Combien consomme la production d’un kilo de miel ?

Sept exploitations apicoles se sont prêtées à l’exercice mais toutes sont dans une dynamique de résilience, leurs émissions sont donc probablement inférieures à la moyenne. Chez ces apiculteurs, produire 1 kilo de miel émet environ 4 à 8 kilos d’équivalent CO2.

Le carburant est une des principales sources d’émission, il est responsable de 17 à 35 % du CO2 émis. Vient ensuite le sucre, pour 10 à 20 % des émissions. Les investissements (matériel et bâtiment) sont aussi un des principaux postes d’émissions, et peuvent représenter jusqu’à 40 % des émissions sur certaines exploitations. Les emballages en verre pour les pots de miel sont aussi à prendre en compte, puisqu’ils sont responsables de 5 à 8 % des émissions dans les exemples collectés.

Ils adaptent leur exploitation

Témoignage de Céline et Julien, Gaec Avelye, Haute-Savoie (74)

Moins de carburant

« Pour le carburant, le plus gros effort que l’on fait depuis deux ans consiste à diminuer et rationaliser le nombre de ruches transhumées sur la lavande. Au lieu de faire cinq allers-retours, on en fait plus que deux, on économise ainsi environ 3 000 km. On organise aussi mieux nos tournées de livraison, en faisant des tournées par secteurs. C’est vrai qu’avant, quand un magasin appelait et que le gasoil n’était pas cher, même si tu es conscient des choses, tu ne fais pas tant d’effort, car ça ne coûte pas tant que ça. Nous avons l’avantage d’avoir toutes nos ruches proches de l’exploitation, donc peu de gros déplacements. Maintenant, le gros point à améliorer est de baisser le coût carbone lié au carburant dans le quotidien. Pour cela, on essaie de regrouper les opérations. »

Moins de sucre

« On travaille sur notre génétique. On a mis en place un rucher de fécondation dirigée pour travailler sur nos propres critères et même les souches qu’on achète sont testées. Nous cherchons à avoir une abeille qui ne consomme pas trop en hiver et une abeille avec un bon ratio production de miel et économie en sucre en saison. Cette année, seulement 50 % des ruches ont pris du candi et pour une partie ça n’aurait pas été nécessaire. Il y a quatre à cinq ans en arrière, 100 % des ruches prenaient du candi. L’objectif est d’atteindre rapidement 25 %. On sélectionne aussi sur une abeille pas trop gourmande en saison, en travaillant plutôt à maintenir la production de miel et diminuer la consommation de sucre. Nous sommes en bonne voie mais c’est un travail exigeant. »

Réemploi des emballages

« Le réemploi des pots de miel, c’est compliqué parce que malgré la bonne volonté, il y a peu de magasins qui veulent le mettre en route. On l’a initié sur nos ventes directes, mais ce n’est que 20 % de notre chiffre d’affaires. Quand on livre, on récupère aussi les cartons quand les magasins les gardent. Cet hiver, on a aussi récupéré des cartons de mandarines, c’est costaud et on met deux hauteurs de pots dedans. Mais bon, pour faire de la récup’, il faut que certains fassent du neuf ! Ça viendra progressivement, il faut convaincre les magasins. »

Captages des émissions

« Dans un petit effort de compensation carbone, on a planté 400 arbustes et arbres mellifères avec des amis éleveurs. Mais c’est un clin d’œil, c’est anecdotique. C’est plutôt pour nous rappeler que climat et biodiversité sont intimement liés. »

Moins d’investissements

Céline et Julien sont installés dans un ancien bâtiment, qui a donc un faible impact par rapport à un bâtiment neuf. Partager son bâtiment, s’associer… les solutions sont multiples pour diminuer le coût carbone de la construction miellerie et de la fabrication du matériel apicole. Partager sa miellerie à deux, c’est réduire le coût carbone, mais aussi réduire ses investissements, et donc son coût de production. Réparer son matériel et améliorer sa durée de vie plutôt que d’acheter du neuf permet aussi d’éviter de précieuses émissions carbones liées à la fabrication de nouvelles machines.

Julien et Céline, grâce à ce bilan carbone, projettent leur réflexion plus loin encore : « Ce travail est à mettre en corrélation avec la résilience globale de notre exploitation. Comme énormément de choses sont dépendantes du pétrole et que l’on souhaite anticiper le moment où il sera plus cher ou plus rare, il est stratégique de connaître les postes sur lesquels on doit travailler dès maintenant pour être moins dépendants et donc moins exposés aux fluctuations futures ».

Aller plus loin

Ces sujets vous parlent, vous souhaitez réagir ? Contactez l’ADA Aura pour nous partager vos témoignages et faire avancer les réflexions.

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