Antoine Thibault, éleveur, évoque ses dettes : émotion sur twitter
Dans une série de messages sur Twitter, l’éleveur laitier plus connu sous le pseudonyme d’AgriSkippy a brisé un tabou dans l’agriculture : évoquer ses difficultés financières. Elles viennent de se tarir avec la dernière échéance d’un prêt trésorerie. Une situation que partagent beaucoup d’éleveurs émus par son témoignage.
Dans une série de messages sur Twitter, l’éleveur laitier plus connu sous le pseudonyme d’AgriSkippy a brisé un tabou dans l’agriculture : évoquer ses difficultés financières. Elles viennent de se tarir avec la dernière échéance d’un prêt trésorerie. Une situation que partagent beaucoup d’éleveurs émus par son témoignage.
Voilà trois mois qu’Antoine Thibault, éleveur laitier plus connu sous le pseudo d’AgriSkippy sur Twitter, réfléchissait à cette publication.
Le 20 janvier dernier, il poste ce tweet : « chaque 20 janvier est une victoire, chaque 20 janvier est dur à passer, chaque 20 janvier je rembourse 12 800 euros d’un emprunt de plus de 60 000 (le prix d’un petit tracteur) contracté pour payer… des dettes. Et aujourd’hui c’est la dernière échéance ». Un message vu 500 000 fois, partagé 1200 fois et ayant reçu 6800 likes. Emu, l’éleveur laitier normand qui a gagné 600 abonnés depuis sur le réseau social, s’étonne d’une si forte réaction. L’objectif de cette communication : partager sur les réseaux sociaux les difficultés financières que connaissent nombre d’éleveurs laitiers malgré un travail acharné. Et surtout expliquer à ses nombreux abonnés non agriculteurs un pan de la réalité d’un métier sur lequel les éleveurs s’épanchent peu.
Chaque 20 janvier est une victoire
— Antoine Thibault (@AgriSkippy) January 20, 2022
Chaque 20 janvier est dur à passer
Chaque 20 janvier je rembourse 12 800 euros d'un emprunt de plus de 60 000 (le prix d'un petit tracteur) contracté pour payer... des dettes.
Et aujourd'hui c'est la dernière échéance.
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Comment en est-il arrivé là ? « Quand depuis 2009, pire année du prix du lait, (rappelez vous la grève du lait et les épandages blancs au Mont saint Michel) on a 2 années moyennes où l’on boucle juste les comptes et une très mauvaise de déficit, les pertes cumulées deviennent énormes », explique-t-il dans un thread sur Twitter. « Je galère à boucler les fins de mois depuis 2010 », confie-t-il voyant dans cette échéance du 20 janvier dernier un « gros soulagement ».
J’ai souvent payé plus d’intérêts d’emprunt que mon propre salaire
Fin 2014, l’éleveur finit de rembourser son emprunt de reprise mais « en 2015-2016 je me suis pris une claque monumentale alors que j’essaie d’être plutôt bon techniquement », se remémore-t-il. Les banques refusent de le soutenir et il est à deux doigts d’engager une procédure pour agriculteur en difficulté. « Alors que je n’ai pas fait de grosses erreurs », commente-t-il. Bien qu’installé sur « une ferme difficile, avec des contraintes de sol, de climat, d’arbres et de haies », il confie que « la fierté en prend un coup ».
Le métier d’éleveur demande beaucoup d’investissement : en 20 ans, Antoine Thibault confie avoir injecté plus de 550 000 euros en matériel bâtiments, ne se jugeant pas pour autant suréquipé.
« J’ai souvent payé plus d’intérêts d’emprunt que mon propre salaire », confesse l’éleveur sur twitter, reconnaissant avoir néanmoins réussi à passer d’un salaire de 900 à 2500 euros par mois « au fil des ans et des enfants ».
Hommage à ceux qui n’ont pas résisté à la pression
Aujourd’hui « après 20 ans de métier, 20 ans à rechercher à optimiser, toujours dans les meilleurs de mon groupe lait, cette période est derrière moi. Je n’ai quasi plus de dettes fournisseurs ni de prêt trésorerie, mais 20 ans c’est long, très long » témoigne encore Antoine Thibault sur Twitter. Il termine son thread avec une pensée émue pour ses collègues (« plus de mille anonymes à être tombés depuis 2010 », selon lui) qui n’ont pas supporté cette pression et ont mis fin à leurs jours.