Savoir lire le tableau de bord ne suffit plus, il faut élaborer des stratégies
Gérer à la fois une gestion entrepreneuriale et la transition d'un système s'avère d'une rare complexité pour les producteurs de lait, comme l'a souligné Jean-Marie Séronie, l'invité de Cantal conseil élevage.
Dans quel monde vit-on ? Comment cela se traduit sur la production laitière ? Et qu'est-ce qui change dans les métiers du conseil ? Voilà les questions qui ont servi de trame à Jean-Marie Séronie pour articuler son propos. L'agro-économiste indépendant intervenait jeudi 6 décembre face aux salariés et adhérents de Cantal conseil élevage, réunis en assemblée générale. En introduction, il précise avoir relevé quatre « révolutions ». La première est économique avec les quotas qui appartiennent au passé et des prix capables de passer du jour au lendemain - ou presque - du simple au double, comme fin 2017 sur le beurre, générant une « soi-disant pénurie orchestrée par les transformateurs qui préféraient vendre à l'export ». Un autre bouleversement serait lié au réchauffement climatique et à la protection de l'environnement qui imposent une nouvelle approche technique, moins chimique et beaucoup plus systémique. Accepter une économie de marché S'ajoutent la révolution numérique et le déploiement de nouveaux outils qui apparaît comme une évidence. « Mais c'est la révolution commerciale qui est sans doute la plus importante », prévient Jean-Marie Séronie. Il pense nécessaire de bannir l'expression « de la fourche à fourchette », pour s'emparer de... « la fourchette à la fourche ». En clair, produire pour une demande. Dans un langage sans langue de bois, le spécialiste pointe du doigt le manque de lien entre la brique de lait et le travail du producteur. Surtout dans un contexte où, parfois de manière irrationnelle, priment le rapport à la santé (sans gluten, sans lactose, etc., alors que très peu sont intolérants) et l'envie de consommer local. « Si parce qu'il écrit sur l'emballage le nom d'un département ou d'une région et que le consommateur est prêt à payer plus cher, il ne faut pas s'en priver. Sans compter qu'avec vos AOP, vous avez plein de belles histoires à raconter aux consommateurs... » Voilà déjà quelques pistes pour s'adapter dans un contexte de mutation des politiques publiques : réforme de la Pac, politiques territoriales, etc. « Car même si on a du mal à l'accepter, c'est la fin de la gestion publique des marchés. Avant, avec les taxes ou aides à l'import/export, la puissance publique gérait les marchés. Le fameux slogan syndical « des prix pas des primes » se traduit par faire payer davantage le consommateur que le contribuable. La logique du président de la République est celle-là. »
Suite de l'article à lire dans le Réveil Lozère n°1489, du 20 décembre, en page 7.