Tech & Bio
Remettre l’agronomie au coeur des pratiques
La première déclinaison régionale du salon, qui a eu lieu fin juin dans le Maine-et-Loire, a eu pour objectif de favoriser les techniques respectueuses de l’environnement, avec comme base essentielle l’agronomie.
Avec le désherbage mécanique, l’allongement des rotations, les couverts végétaux et le non-labour sont utilisés en agriculture biologique pour préserver la fertilité des sols et maîtriser l’enherbement. Indispensables en bio, ils peuvent être utilisés en conventionnel pour notamment réduire l’utilisation de pesticides. L’allongement des rotations présente des avantages pour l’azote. Il limite le lessivage (absorption puis restitution), la volatilisation et la dénitrification (travail du sol) et donc les pertes d’azote. Toutes les espèces ne prélevant pas l’azote au même moment, plusieurs cultures réduisent aussi les fuites. Et l’introduction de légumineuses permet un apport d’azote. Autre intérêt : une meilleure maîtrise de l’enherbement et des bio-agresseurs. En variant les cultures, en alternant semis de printemps, été et automne, on en limite le développement. Le semis à différentes périodes et inter-rangs variables permet aussi d’intervenir plus efficacement avec divers outils. Et l’introduction de cultures annuelles étouffantes ou de cultures pérennes réduit également l’enherbement. La minéralisation se faisant surtout à l’automne, un couvert végétal en interculture limite aussi les fuites d’azote. Il favorise la vie biologique (vers de terre…) et la structuration du sol, améliore la portance et limite battance et tassement du sol. Il protège le sol de l’impact des gouttes d’eau et réduit le ruissellement et l’érosion. Et, en prenant la place des adventices, il limite l’enherbement.
La précocité d’implantation est essentielle pour capter les nitrates et permettre une levée rapide. Le choix des espèces dépend de l’objectif recherché : captage des nitrates, amélioration de la structure du sol, valorisation par les animaux… Un mélange d’espèces se développant plus ou moins selon les conditions ou présentant des intérêts variés (couverture rapide, action en profondeur, apport d’azote, etc.) est souvent judicieux, de même que le choix d’espèces détruites par le gel ou par mort physiologique. La destruction doit intervenir assez tôt pour que le couvert ne perturbe pas la culture suivante (réserve en eau, etc.) mais assez tard pour qu’il joue son rôle de piège à nitrate et d’ameublissement du sol.
Remuer le sol le moins possible
Les techniques sans labour peuvent inclure un travail en profondeur avec des dents ou ne comporter qu’un travail superficiel, sur toute la surface ou sur le rang (semis direct). L’objectif est de gagner du temps et de réduire les charges de mécanisation. Mais à long terme, les bénéfices agronomiques sont une autre motivation. Le non-labour implique en effet deux changements : la non-inversion des couches et moins de fragmentation. Outre qu’elle évite de ramener en surface des graines d’adventices dormantes et des cailloux, la non-inversion des couches concentre la matière organique en surface. Cette concentration protège le sol de l’impact des gouttes de pluie et de l’érosion. En améliorant le stockage de l’eau, du carbone, elle favorise aussi la vie biologique et améliore la stabilité structurale du sol. Et si la porosité diminue d’abord, elle augmente au-delà de 10 ans grâce aux vers de terre qui créent des galeries vers la surface. Le non-labour limite ainsi la battance, le tassement et améliore l’infiltration de l’eau. Il réduit le ruissellement de 1 à 5, l’érosion de 1 à 10 et limite les fuites de phosphore et nitrates. En hiver, quand un cumul de pluies entraîne des risques de prise en masse du sol, un travail en profondeur s’impose toutefois pour recréer de la porosité.
Entretien avec Guy Vasseur, président des chambres d’agriculture.
« Favoriser les transferts de technologies »
Quel est l’objectif de Tech & Bio ? L’objectif de Tech & Bio est de montrer les techniques utilisées en bio et qui peuvent l’être en conventionnel. Il s’agit notamment de ce qui touche l’agronomie, qui doit être remise au coeur des pratiques. Et cela fonctionne puisque au Tech&Bio des éleveurs de l’Ouest, qui a eu lieu fin juin dans le Maine-et-Loire, 80 % des visiteurs étaient des conventionnels. L’expérience d’un salon régional, en alternance avec le salon national qui a lieu dans la Drôme tous les 2 ans, sera à renouveler.
Comment se développe l’Agriculture biologique ? Elle se développe car elle répond à une demande. Et le fait que l’on puisse aujourd’hui convertir une partie de l’exploitation est un atout car cela permet de ne pas tout changer d’un coup. Les chambres d’agriculture et coopératives sont les mieux placées pour favoriser les conversions car elles s’adressent aux conventionnels. Toutefois, l’État devra y mettre plus de moyens car il manque actuellement la moitié des budgets nécessaires aux conversions.
La production française peut-elle contrer les importations ? Aujourd’hui, les cahiers des charges sont harmonisés en Europe. L’importation devrait donc devenir moins intéressante et laisser plus de place à la production française.
Propos recueillis par V. Bargain
Le compost pour préserver les sols
Outre que le compostage allège les contraintes d’épandage, un compost doit être utilisé comme amendement, pour entretenir le statut organique et la structure du sol. Des composts normés sont proposés à des prix de 10 à 60 euros/t. Mais le moins coûteux (5 à 15 euros/t) est de faire soi-même son compost. Divers déchets sont disponibles : effluents d’élevage, déchets verts (à broyer), sous-produits de l’agro-alimentaire, biodéchets (attention à la qualité de la collecte). En plus de règles d’implantation (35 m des cours d’eau, 50 à 200 m des habitations…), certains critères doivent être respectés. Un rapport C/N de 20 à 50 et une humidité de 50 % sont nécessaires. Si l’humidité est insuffisante, on peut arroser le tas ou y injecter de l’eau lors d’un retournement. Au moins deux retournements s’imposent, 1-2 semaines après l’andainage puis 2-3 semaines après. Et, une température de 50-55 °C étant nécessaire au compostage, un suivi de la température est obligatoire.