Région : Prédation du loup, la Région passe à l’attaque
Le fléau du loup menace non seulement le pastoralisme mais également le tourisme dans les zones de montagne.
vice-présidente de la Région Auvergne-Rhône-Alpes
en charge de l’agriculture : «Le loup et le pastoralisme ne peuvent pas cohabiter».
Yann Souriau est épuisé. Le maire de Chichiliane, dans le Vercors isérois, a vécu un été cauchemardesque ponctué d’attaques répétées du loup sur les troupeaux de sa commune mais aussi d’un accident majeur entre une promeneuse et deux patous. C’est toute la population qui se mobilise aujourd’hui pour protéger les éleveurs et leurs troupeaux. «Ce sont nos nuits debout», ironise l’élu.Quand bien même le cadre de lutte national contre le prédateur s’est renforcé cette année, «nous sommes dans une impasse», résume-t-il. Il a rejoint les rangs de l’USAPR, (Union pour la sauvegarde des activités pastorales et rurales), le regroupement des élus concernés par ce problème devenu un enjeu majeur de développement rural. «Le loup, c’est des petites exploitations qui arrêtent et avec elles les circuits courts qui disparaissent ; des paysages qui se ferment et le tourisme qui recule à cause de la dangerosité de la randonnée».
«La coexistence ? Un mythe !»
La vice-présidente de la Région en charge de l’agriculture, Émilie Bonnivard, avait choisi de mettre à l’ordre du jour le sujet lors de la commission agricole du 16 septembre en invitant témoins et experts pour un débat qui se voulait dépassionné mais réaliste. «Oui, les troupeaux sont mieux protégés mais le loup s’adapte. Les attaques de jour se sont multipliées. Et elles s’ajoutent à celles de nuit», insiste l’élue. «L’autre nouveauté c’est que le loup descend de plus en plus loin dans la plaine», constate le maire de Chichiliane.Dommage collatéral, la multiplication du nombre de patous dans les alpages entraîne une augmentation du nombre des incidents, parfois graves, avec les randonneurs. En l’état actuel des choses, difficile de trouver une issue comme le rappelait Laurent Garde, coordinateur régional du Cerpam (Centre d’études et de réalisations pastorales Alpes-Méditerranée). «Dire que dans les autres pays comme l’Espagne et l’Italie, la coexistence entre loups et moutons se passe bien, c’est un mythe ! Dans les Abruzzes nous avons aujourd’hui d’énormes troupeaux gardés par 15, 20 ou 30 patous. Veut-on en arriver là ?» s’interroge-t-il. La seule option efficace semble être la régulation pratiquée dans des pays comme la Suisse, la Norvège ou les États-Unis.
Agir à différents niveaux
Le conseil régional Auvergne-Rhône-Alpes a donc décidé de préparer un plan d’action pour aider des éleveurs de plus en plus démunis. Il comportera un volet juridique, en lien avec d’autres régions européennes concernées par le fléau, pour évaluer la possibilité de sortir de la convention de Berne et de la directive européenne Habitats qui fait du loup une espèce protégée et donc, non régulable. Un accompagnement juridique des éleveurs propriétaires de patous, menacés pénalement en cas d’incident avec les randonneurs, devrait faire partie du dispositif.La Région souhaite par ailleurs modifier les clefs de comptage du loup pour obtenir des évaluations de population plus en phase avec la réalité. (NDLR : les chiffres officiels font état d’une population d’à peine 300 loups en France ce qui, selon certains experts, est tout à fait sous-estimé).Une réflexion sera menée sur la possibilité d’expérimenter l’utilisation de chiens «créancés» loup, autrement dit, des chiens chasseurs de loups.
Vote en novembre
Le plan inclura aussi des aides à l’investissement de matériels pour les lieutenants de louveterie souvent sous équipés pour réaliser leur prélèvement. Enfin, des actions de communication et de sensibilisation seront déployées auprès du grand public. «Le loup et le pastoralisme ne peuvent pas cohabiter», rappelle fermement Émilie Bonnivard.Ce plan devrait être voté à la session plénière du mois de novembre et l’enveloppe financière qui lui sera affectée n’est pas encore connue.
D.B. - Apasec