Analyse
Manque de concurrence entre les transformateurs, industrie concentrée...
Une chargée de mission du ministère de l’agriculture a mis en évidence les défaillances du marché qui justifient la mise en place de régulations.
C’est dans le cadre de cette table ronde que Marie-Sophie Dedieu, du ministère de l'agriculture, est intervenue sur le thème des enjeux de la régulation du secteur laitier. Ce thème a fait l'objet d'une étude réalisée par le service de la statistique et de la prospective du ministère de l'agriculture. L'analyse conduite sur le secteur laitier a permis d'identifier plusieurs défaillances du marché laitier qui justifient le recours à des régulations qui, demain, associeront probablement marché, contractualisation et intervention publique.
Marché défaillant
La première défaillance réside dans l'instabilité endogène (qui s'explique par une cause interne) des marchés laitiers : « La demande de produits agricoles est de manière générale relativement inélastique (possibilités de substitution aux produits laitiers limitée). Une faible variation de l'offre de lait induit une forte variation de prix », a souligné Marie-Sophie Dedieu.
A court terme, la réponse des éleveurs à une variation de prix est également un facteur d'instabilité : « La capacité de réponse des éleveurs laitiers à une hausse de prix peut être rapide » alors que « la production s'ajuste difficilement à une baisse des prix ». Ces contraintes hypothèquent un retour rapide à une situation d'équilibre où le prix d'équilibre égalise les coûts de production complets.
La marché laitier souffre de l'absence d'une situation de concurrence pure et parfaite entre les producteur et la première transformation. Les caractéristiques du lait (produit périssable et pondéreux), induisent des contraintes pour sa collecte. De plus, il n'existe bien souvent qu'une usine de transformation qui collecte l'ensemble de la production du bassin environnant : « Cette contrainte imposée par la nature du produit rend quasiment impossible la mise en place d'un marché concurrentiel ».
Les producteurs apparaissent très atomisés face à une industrie laitière de plus en plus concentrée. Les relations entre éleveurs et entreprises de première transformation relèvent donc davantage d'un schéma du marché captif (les producteurs sont en situation de dépendance économique) que de la concurrence pure et parfaite. « Cette défaillance de marché a de lourdes implications, que ce soit en termes de formation des prix que de partage de la valeur ajoutée », conclut Marie-Sophie Dedieu.
Le secteur laitier est par ailleurs soumis à une autre défaillance liée aux externalités environnementales (pollutions engendrées par la concentration géographique de la production, etc.) et sociale (rôle positif de l'élevage dans le dynamisme du territoire rural, herbe puit de carbone, etc.). Selon Marie-Sophie Dedieu : « L'intervention publique est nécessaire pour prendre en compte l’ensemble de ces défaillance ». Pour pallier cette absence de marché concurrentiel, les Etats-Unis ont recours à une intervention forte. En France, le dispositif de recommandation du prix au producteur discuté au sein de l'interprofession laitière peut être considéré comme un palliatif à cette défaillance du marché.
Intervention publique
« Une analyse structurelle de la filière laitière met en évidence que la régulation de ce secteur ne peut reposer sur la seule coordination par la marché. L'intervention publique se justifie », a indiqué Marie-Sophie Dedieu. Pour corriger ces défaillances, le ministère de l'agriculture pense qu'il faudra faire appel aux modes de régulation suivants : le marché, le contrat (entre producteur et entreprise) et les politiques publiques.
... et producteurs atomisés
- 82 600 livreurs de lait en 2008 ;
- Les 4 premières entreprises laitières françaises représentaient près de 41,1 % de la collecte et les 9 premières 50,4 %