Interview
«Il est nécessaire de mettre en place de nouveaux outils de régulation de marchés»
Patrick Bénézit et Guy Hermouet répondent à nos questions.
Lors du congrès FNB2012, le président de la FNB évoquait des voyants au vert pour l’élevage bovin (hausse des cours, développement de l’export, etc.) mais aussi des difficultés persistantes (hausse des charges, décapitalisation), un an après, où en est-on?
Patrick Bénézit: La stratégie mise en place après le blocage des abattoirs fin 2010 a payé, c’est une réalité. En l’espace de deux ans, nous avons gagné quasiment 1euro par kg. Nous avons été soutenus par les pouvoirs publics qui ont facilité les négociations avec les pays tiers. Aujourd’hui nous exportons massivement du JB et des carcasses. Certes, dans le même temps, les charges ont augmenté et cela a eu pour effet de gommer la remontée des cours. Nous sommes contraints de maintenir la pression pour faire monter encore les prix. Nous devons également continuer d’encourager l’export.
Guy Hermouet: L’année 2012 a été mitigée. On peut se satisfaire de la remontée des cours en particulier sur les femelles qui jusqu’ici étaient à la traîne. Malheureusement les charges ont augmenté plus vite encore et les revenus en ont souffert. L’export a contribué à tirer les prix vers le haut également. Depuis le début d’année en revanche, le ralentissement est sensible et il nous faut travailler à faire redémarrer les exportations.
Le Japon vient d’annoncer la reprise des importations de viande bovine française. Dans le même temps, l’Institut de l’élevage donne des prévisions de production pour 2013 peu encourageantes. Selon vous, Guy Hermouet, quelles sont les perspectives pour l’année à venir?
GH.: Nous espérons que le Japon sera un marché porteur mais il ne faut pas oublier que les quantités exportées ne seront pas énormes. De plus, il va falloir trouver des marchés et s’adapter à la demande des japonais. Concernant l’export, il faut surtout que la Turquie qui a marqué un coup d’arrêt début janvier reprenne ses importations dans les semaines à venir.
Mais nous ne nous intéressons pas seulement aux animaux finis. Il y a de nouveaux marchés à trouver pour les broutards. C’est essentiel car s’il n’y a qu’un seul pays importateur, celui-ci fait pression pour baisser les prix comme l’a fait l’Italie en 2012.
Quels sont les objectifs et les enjeux des trois groupes de travail proposés lors du congrès des 6 et 7 février?
GH.: Ces ateliers sont clairement orientés PAC. L’élevage a besoin d’un soutien spécifique et les surfaces fourragères doivent être prises en compte de manière différenciée. Par ailleurs, il est nécessaire de mettre en place de nouveaux outils de régulation de marchés et c’est aussi vrai pour les céréales ou le lait. Enfin, si on veut favoriser l’installation des jeunes, il faut que l’Etat soutienne la modernisation des exploitations. Nous avons du retard sur ce plan-là.
PB.: Pour atteindre nos objectifs, il nous faut poursuivre notre travail sur les prix, c’est la première des priorités. Les opportunités à l’export doivent également nous permettre d’être mieux rémunérés sur notre propre territoire. Mais il faut aussi une PAC orientée vers l’élevage et qui nous soutienne, notamment par rapport à la fluctuation des charges. Nous devons pouvoir bénéficier de DPU différenciés pour nos surfaces fourragères ainsi que d’une politique renforcée pour nos zones de montagne en plus de la possibilité de maintien d’aides couplées.
Patrick Bénézit, l’institut de l’Élevage et le Sidam réalisent actuellement une étude sur la filière bovine dans le Massif Central. Après les premiers résultats, ils vont maintenant bâtir un plan d’action avec tous les acteurs. Comment voyez-vous l’avenir de la filière bovine dans le Massif central?
PB: Pour que le Massif central bénéficie pleinement des actions menées par la FNB, il faut qu’il produise plus de bovins finis. En 2012, l’Italie a bénéficié de l’embellie sur les prix et en même temps a fait pression sur les prix des broutards. Il faut que nous reprenions la main. Pour favoriser l’engraissement, il faut aussi que les abatteurs acceptent des contrats qui tiennent compte des coûts de production de l’éleveur.