Grégory Besson-Moreau : « Les agriculteurs ne seront plus les victimes de la guerre des prix »
Le Parlement a adopté définitivement jeudi dernier, par un ultime vote du Sénat, de « nouvelles règles du jeu » pour protéger la rémunération des agriculteurs dans les relations commerciales avec industriels et distributeurs. Le point sur cette loi Egalim 2 avec son rapporteur Grégory Besson-Moreau (LREM).
Pourquoi avez-vous choisi de vous emparez du sujet agricole en général et de la rémunération des producteurs en particulier dès votre élection en 2017 ?
Je suis élu d’un territoire rural dans l’Aube. Même si je ne suis pas moi-même issu du monde agricole, j’ai une affinité particulière avec ces gens de la terre. J’apprécie leur rudesse, leur franchise, leur bon sens, leur loyauté. Mais leur confiance se mérite, et une fois le contact noué, les postures écartées, j’ai pu travailler très concrètement avec la FDSEA et son président Joël Hospital, qui est devenu un ami, puis avec les syndicats nationaux dans le cadre de la loi Egalim 2.
La loi Egalim 1 n’était-elle selon vous pas suffisamment aboutie qu’il faille la consolider par un second volet ?
Egalim 1 n’est pas une mauvaise loi mais elle n’allait pas assez loin dans l’objectif d’une meilleure rémunération des producteurs. Nous avons créé à la demande des différents syndicats agricoles davantage d’outils : indicateurs de coûts de production, possibilité de se regrouper en organisation de producteurs, contractualisation… Mais l’erreur a été de penser que séparément ces outils seraient suffisants. Il fallait un lien, un chef d’orchestre pour faire fonctionner ces outils entre eux. À l’issue d’une commission d’enquête sur les relations commerciales, nous avons constaté avec Thierry Benoît (ndlr : député d’Ille-et-Vilaine UDI) que personne n’utilisait ces outils, et que l’argent ne redescendait pas dans les cours de ferme. Notre rapport issu de cette commission d’enquête, organisée à huis-clos et sous X, c’est dire le caractère sensible du sujet, a démontré que la loi de modernisation de l’économie (LME) avait été profondément néfaste au ruissellement. En permettant de faire tout et n’importe quoi, de négocier à outrance, cette loi a placé les acteurs de l’amont en difficulté.
De manière très concrète, quelles sont les principales avancées de la loi Egalim 2. Seront-elles suffisantes pour mettre un coup d’arrêt à la guerre des prix ?
La guerre des prix, ce n’est pas mon problème. En revanche, que les agriculteurs en soient les victimes, je ne l’admets pas. C’est pourquoi nous nous sommes battus pour introduire plusieurs garde-fous gage de transparence et de régulation. Premièrement, la loi prévoit de généraliser les contrats écrits entre l’agriculteur et l’entreprise qui va transformer ses produits, sur trois ans minimum, en tenant compte des coûts de production. Et de rendre non négociable, entre l’industriel et le distributeur, la part du prix correspondant au coût des matières premières agricoles. Selon la volonté des sénateurs, ce principe de non‑négociabilité s’appliquera à tous les produits alimentaires, indépendamment du volume des différents ingrédients, et y compris pour les produits alimentaires vendus sous marque de distributeur. Deuxièmement, la commission mixte parlementaire a également validé le principe d’une expérimentation pour exclure certaines filières de fruits et légumes du relèvement du seuil de revente à perte mis en œuvre depuis Egalim 1. Enfin, la loi prévoit de rendre obligatoire l’indication du pays d’origine pour les produits agricoles et alimentaires. Ce sont des avancées considérables qui vont, nous l’espérons, permettre de remettre de l’équilibre et de la transparence entre tous les acteurs des filières, là où régnait déséquilibre, défiance et opacité.