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Un lot homogène réduit le risque de picage du canard

Viser un lot homogène par un bon démarrage et maintenir des conditions d’élevages uniformes contribuent à limiter le risque de picage du canard de Barbarie, comme l’explique la firme services MG2Mix.

Avec la luzerne, le temps d’exploration du canard est plus élevé qu’avec la paille ou la ficelle, mais il baisse au fil des semaines, le canard se lassant vite.
Avec la luzerne, le temps d’exploration du canard est plus élevé qu’avec la paille ou la ficelle, mais il baisse au fil des semaines, le canard se lassant vite.
© MG2Mix

On aurait pu penser l’inverse mais en matière de picage chez le canard de Barbarie, ce sont surtout les petits individus qui ont tendance à piquer leurs gros congénères. Le picage sévère intervient essentiellement sur deux périodes d’élevage, en lien avec la cinétique d’apparition des plumes. 

Lire aussi : Choyer ses canetons Barbarie au démarrage

La première, vers 21 jours, cible surtout la zone du croupion. La seconde phase à risque, entre 5 et 7 semaines, se traduit par un picage au niveau des ailes. Plus fréquente et plus problématique, elle peut occasionner des taux de mortalité élevés et pénaliser la croissance et l’indice de consommation. Elle correspond à une période où le GMQ est très élevé (et donc les besoins nutritionnels).

 

 
Anaëlle Faouen et Baptiste Ruel, nutritionnistes MG2Mix : « Lorsque le lot est hétérogène, les besoins nutritionnels divergent entre individus. L'écart de poids augmente le risque de picage. »
Anaëlle Faouen et Baptiste Ruel, nutritionnistes MG2Mix : « Lorsque le lot est hétérogène, les besoins nutritionnels divergent entre individus. L'écart de poids augmente le risque de picage. » © A. Puybasset

D’origine multifactorielle, le picage se déclenche à la suite d’une situation de mal-être. Certains stress ont été clairement identifiés comme élément déclencheur : un problème sanitaire de type colibacillose ou une mise à jeun liée à une rupture d’aliment (éviter les vides de mangeoires) … Mais d’autres sont plus subtils. « Un même stress, par exemple un changement de programme lumineux, va déclencher un picage dans un contexte d’élevage donné mais pas dans un autre. C’est 'l’effet débordement de la dernière goutte d’eau' », schématisent Anaëlle Faouen et Baptiste Ruel, nutritionnistes volailles de MG2Mix. Il faut donc agir sur tous les fronts, et le plus en amont possible, pour éviter tout dérapage, dur à maîtriser une fois démarré.

 

Atteindre le poids objectif à 7 jours

Adossée à sa station expérimentale de Domagné, la firme services a développé plusieurs approches, en plus du levier nutritionnel, pour mieux comprendre les troubles du comportement du canard et tenter de les limiter. Elle a réalisé deux enquêtes en élevage pour mettre en évidence les facteurs influençant. Au-delà du statut sanitaire (importance du nettoyage et de la désinfection), de la qualité de l’eau, de la densité (sur lequel l’éleveur peut difficilement agir), la qualité du démarrage est ressortie comme un facteur clé. « Il est primordial d’atteindre le poids objectif à J7 et à J21 et une bonne homogénéité de lot. » Les petits et gros individus n’ont pas les mêmes besoins nutritionnels au même moment. L’écart de poids entre congénères augmente le risque de comportement de picage venant des petits canards, plus nerveux. « Une étude réalisée en 2018 l’a démontré : dans les élevages à risque de picage, le coefficient de variation du lot atteignait 13,8 % à J7 contre 12,6 % pour ceux n’étant pas à risque. L’écart d’homogénéité entre les deux groupes d’élevages se creusait à 2,3 % à 28 jours. »

Attention à la teneur en CO2 au démarrage

La maîtrise de l’ambiance est également ressortie comme un facteur influençant, en particulier lors de la première semaine : maintenir une température adaptée, une concentration en CO2 inférieure à 2 500 ppm, éviter de sous-ventiler… Le nombre de parcs disponibles joue également. « Plus il est élevé, plus le nombre d’animaux par parc est réduit et plus on arrivera à empêcher que le phénomène de picage ne s’étende à tout le bâtiment », justifie Baptiste Ruel. Dans les élevages à risque, il conseille de maintenir les parcs des mâles jusqu’en fin d’élevage, les femelles étant très rarement sujettes au picage.

Éviter les flashs lumineux

Le type de bâtiment clair ou obscur n’est pas ressorti comme un facteur influençant. « Le risque de picage est plus élevé au printemps et durant l’été, mais cela s’expliquerait plus par un effet chaleur (baisse de la consommation et donc risque de carence) que par l’augmentation de la durée du jour. » Il n’y a pas de règles préétablies concernant le programme lumineux, les pratiques sur le terrain étant très diverses. En revanche, mieux vaut ne pas modifier les réglages en cours de lot, tout changement brutal pouvant être source de stress pour le canard (heure d’allumage, vitesse d’allumage, coupure ou pas de nuit).

C’est d’autant plus vrai en début de picage. « Il faut maintenir des conditions d’élevage les plus stables possibles et éviter tout facteur de stress supplémentaire. Mettre la pénombre dans le bâtiment aide à calmer les canards mais la luminosité doit être suffisante pour que l’éleveur puisse surveiller le lot sans avoir à l’augmenter subitement. » De même, il est conseillé de maintenir le même rythme de passage quotidien de l’éleveur. « Le premier canard piqué doit être isolé dans une infirmerie le plus tôt possible. Attirés par le sang, les congénères reproduisent vite le même comportement. Si le picage a pris trop d’ampleur, il faut alors éviter les mouvements de panique liés aux interventions, qui risquent d’amplifier le phénomène. »

Le levier enrichissement à investiguer

En cas de picage sévère, une pratique courante consiste à distribuer un aliment démarrage, plus riche en protéines. « C’est une solution efficace mais coûteuse », poursuit Anaëlle Faouen. À l’inverse de la poule pondeuse, les éleveurs de canards ont peu recours à des solutions d’enrichissement, à titre préventif ou curatif. Pour MG2Mix, ce levier reste à investiguer même si les premiers essais en station se sont révélés peu efficaces pour stopper le picage. Trois enrichissements ont été distribués à partir de 22 jours : de la ficelle suspendue ainsi que la luzerne et la paille. « On a ciblé deux consommables qui s’effilochent, en s’inspirant du comportement naturel du canard qui tire les herbes, qui fouille, mais qui ne picore pas. » Le temps d’exploration a été le plus élevé avec la luzerne, mais il diminue au fil du temps (de 6,5 % à 5 semaines à 2 % à 9 semaines). « Le canard se lassant vite, il faudrait changer toutes les semaines le type ou l’emplacement de l’enrichissement, sans que cela ne soit trop chronophage pour l’éleveur. »

MG2Mix entame aussi des essais en station, sur la modulation des courbes d’alimentation avec cette fois-ci des animaux non débecqués. Les attentes de solutions sont nombreuses de la part des organisations de production, qui doivent se préparer à l’interdiction du débecquage en élevage même si cette pratique est de plus en plus remplacée par un épointage au couvoir.

Un lien entre troubles digestifs et picage

L’outil MGBox permet d’étudier le lien entre la qualité des fientes et la survenue du picage. MG2Mix s’intéresse désormais au rôle du microbiote.

 

 
En récupérant les fientes, le caillebotis MGBox est un bon outil pour détecter bien en amont un trouble digestif et l’anticiper, par exemple en acidifiant l’eau de boisson.
En récupérant les fientes, le caillebotis MGBox est un bon outil pour détecter bien en amont un trouble digestif et l’anticiper, par exemple en acidifiant l’eau de boisson. © MG2Mix

En élevage sur caillebotis, il est plus difficile de surveiller l’aspect des fientes, qui est pourtant un indicateur de la santé digestive des animaux. Pour étudier la cinétique d’évolution de la qualité des fientes et déterminer un lien avec les passages de nervosité ou de picage, MG2Mix a mis au point l’outil MGBox. Il s’agit d’un plateau grillagé d’1 m2 posé sur le caillebotis, comprenant un carton plastifié sur lequel tombent les fientes. Les notations sur l’aspect des fientes ont été réalisées dans une vingtaine d’élevages. Elles ont confirmé le lien entre la santé digestive et la survenue du picage. « On observe deux phases de dégradation des fientes à 3-4 semaines puis à 8 semaines, qui coïncident bien avec les périodes à risque de picage. » Pour aller plus loin, la firme services s’intéresse désormais au lien entre la composition du microbiote et la survenue du picage. Cela aidera peut-être à comprendre pourquoi, avec un même aliment et un même canard, certains bâtiments sont sensibles au picage quand d’autres ne le sont pas du tout. Y aurait-il une explication bactérienne du système digestif ?

 

Le saviez-vous

En canard, la problématique du picage concerne essentiellement l’espèce Barbarie. Le mulard et le pékin sont peu sensibles, du fait d’un effet génétique et probablement de l’enrichissement du milieu.

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