L’Anses-Ploufragan au service des filières animales
Comme tous les deux ans, l’entité bretonne de l’Anses a présenté aux professionnels avicoles les avancées de ses activités de recherche en matière de santé animale, de systèmes d’élevage ainsi que de qualité hygiénique des produits.
Comme tous les deux ans, l’entité bretonne de l’Anses a présenté aux professionnels avicoles les avancées de ses activités de recherche en matière de santé animale, de systèmes d’élevage ainsi que de qualité hygiénique des produits.
Initialement créé au début des années soixante pour accompagner le développement des productions animales bretonnes hors sol (porc et volaille), le site de recherche vétérinaire de Ploufragan a beaucoup évolué. Mais il a conservé l’esprit pionnier et défricheur de ses fondateurs proches du terrain. Toujours installé en périphérie de Saint Brieuc dans les Côtes-d’Armor, il regroupe plus de 190 personnes mobilisées sur trois types d’activités qui se complètent et interagissent. Son directeur Gilles Salvat insiste sur ce trépied qui fait l’originalité et la force du centre, rattaché à l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses). Il y a tout d’abord la recherche scientifique réalisée par plusieurs unités spécialisées par pathogène et sur des investigations de pointe (plateforme de séquençage génétique à haut débit, laboratoires nationaux de référence pour influenza, salmonella, campylobacter et clostridium botulinum). S’ajoutent des experts en épidémiologie qui étudient l’incidence et la prévention des pathologies dans les élevages, notamment avec l’Itavi (unité commune Sanivol), ainsi que les systèmes d’élevage (angle santé-bien-être). Enfin, l’Anses-Ploufragan dispose d’installations expérimentales qui permettent d’expérimenter des méthodes d’élevage, d’étudier des pathologies, de tester des vaccins… Ce trépied produit des connaissances et fournit une expertise aux autorités, comme ce fut le cas lors des deux épizooties d’influenza. Bien que le site de Ploufragan conduise des recherches programmées et à long terme, sa mission est aussi de réagir à l’actualité sanitaire. Ces deux dernières années, l’influenza a très fortement mobilisé les équipes, jusqu’à 24 heures sur 24 pour les analyses du terrain. Voici quelques sujets développés depuis 2015.
La bactérie Mycoplasma synoviae (MS) peut être responsable du syndrome des œufs à extrémité de verre (EAA) chez les poules pondeuses. Une enquête réalisée en 2015-2016 dans une centaine d’élevages avait montré une prévalence de l’EAA de 7,3 %. Elle soulignait également le faible recours aux analyses de laboratoire pour identifier la bactérie MS. Le second volet de l’étude en cours a pour objectif de récolter les différentes souches de MS et de mieux comprendre leur lien avec l’apparition du syndrome EAA. Aucun test PCR n’étant disponible jusqu’à présent, l’Anses a utilisé la technique Maldi-Tof, en collaboration avec Labocéa 22. Un outil rapide et moins coûteux qui s’est révélé intéressant. Sur les 26 élevages touchés par l’EAA entre 2015 et 2017, 18 espèces de M. synoviae ont été isolées. Les chercheurs s’interrogent sur le rôle de Mycoplasma pullorum, présent dans 56 % des cas où MS était détectée. Il pourrait jouer un rôle de facilitateur auprès de MS pour développer le syndrome.
Depuis le 1er janvier dernier, un règlement européen oblige les abattoirs de volailles à contrôler la présence du germe Campylobacter jejuni. Il conseille également d’envisager des mesures de contrôle dans les exploitations. En effet, près de 80 % des volailles en portent à haute dose et Campylobacter se retrouve sur la viande commercialisée. Inoffensif pour les volailles, le germe l’est moins sur les humains. En France, il provoquerait de l’ordre de 500 000 troubles digestifs (deux fois plus que les salmonelles) alors que sont recensés 6 000 cas de tiac (toxi-infections alimentaires collectives). La campylobactériose est une maladie invisible et sous-estimée constate Gilles Salvat. Avec la biosécurité, les additifs (dans l’eau et l’aliment), la vaccination est un possible moyen de réduire le portage et la contamination. Dans le cadre du programme européen Campybro (cofinancé par la profession), Marine Meunier a fait la preuve d’un nouveau concept de vaccin en utilisant la vaccinologie inverse. Ce vaccin a été fabriqué sous deux formes (à ADN et à protéines) à partir d’antigènes candidats sélectionnés par des techniques de séquençage génétique et de bio-informatique. Sur les 1 758 qui constituent le génome de Campylobacter jejuni, quatorze gènes ont été retenus, six ont été testés sur des poulets et quatre se sont révélés prometteurs. Ces résultats sont à confirmer et les huit autres vaccins candidats à tester. Le vaccin finalisé devra être ingérable par voie orale, ceux testés ayant été administrés en intramusculaire à J5 et J12.
Parmi les nombreux travaux de l’unité épidémiologie et bien-être figure la gestion du jeune âge, en lien avec la prévention des colibacilloses et la diminution de l’usage des antibiotiques plus important les dix premiers jours de vie. L’étude Jeune Avi + (2014-2016), réalisée par l’entité Sanivol (Anses et Itavi), a suivi les conditions de démarrage de 50 élevages bretons en vue d’identifier celles qui peuvent influencer l’utilisation d’antibiotiques et la mortalité à 10 jours. 47 % des lots ont reçu un traitement (portage de E. coli constaté sur 43 lots à J1) et la mortalité moyenne a été de 1,9 % jusqu’à 10 jours. L’étude distingue deux catégories d’élevages opposées. Ceux utilisant plus d’antibiotiques et ayant une mortalité supérieure à J10 cumulent les facteurs défavorables : portage d’E. coli à J1, poussins boiteux à J3, taux de CO2 élevés (plus de 3 000 ppm à J1), températures de préchauffage de moins de 32 °C, bâtiments lavés sans détergent et éloignés du couvoir (plus de 200 km). En conclusion, Rozenn Souillard rappelle l’importance du nettoyage et de la maîtrise de l’ambiance. Sur le thème de la réduction de l’usage des antibiotiques, Sanivol a lancé cet été une étude (Colisee) dans 100 élevages de poulets qui porte sur les facteurs déclenchant la colibacillose.
L’Anses poursuit ses travaux de rénovation des installations expérimentales avicoles non confinées (élevage conventionnel). Elle se dotera en 2018 d’un nouveau bâtiment de volailles de chair, en plus des deux existants de 1 000 et 1 400 m2. Il sera équipé pour la première fois à Ploufragan de matériels associés à l’élevage de précision, permettant de préparer l’avenir du bien-être et de la santé des volailles. D’une surface de 1 500 m2, divisée en six salles avec accès partiel à un parcours extérieur, il associera chauffage au sol et aérothermes, lumière naturelle et éclairage leds, échangeurs de chaleur, ventilateurs progressifs ainsi que de nombreux équipements de mesure dont un logiciel d’analyse du comportement des animaux.