Ébene, un outil de mesure et de progrès en France
En concertation avec les professionnels, des chercheurs et des défenseurs des animaux, l’Itavi construit un outil qui devrait permettre d’évaluer simplement le bien-être.
En concertation avec les professionnels, des chercheurs et des défenseurs des animaux, l’Itavi construit un outil qui devrait permettre d’évaluer simplement le bien-être.
Aujourd’hui, la directive européenne sur le logement des poules pondeuses ne verrait pas le jour sous la forme de 1999 qui avait imposé une obligation de moyens, à travers des normes de surface, de longueur ou de présence de dispositifs. « Ce n’est pas pour cette raison que la poule se sent mieux et que cela lui apporte objectivement un meilleur bien-être », commente Laure Bignon, responsable du dossier bien-être à l’Itavi. En termes réglementaires, les autorités européennes et internationales évoluent vers une obligation de résultat. La stratégie 2012-2015 de l’UE prévoyait la simplification du cadre légal et l’emploi d’indicateurs basés sur l’animal.
C’est pour anticiper cette réglementation plutôt que de la subir que l’Institut technique de l’aviculture a lancé en 2014 le projet Évaluation du bien-être en vue d’une norme européenne (Ébene) pour toutes les filières. Les données sont nombreuses en poulet, pondeuse et dinde mais les espèces mineures (caille, pintade, canard) sont aussi concernées. Il associe neuf interprofessions et organisations professionnelles(1), des défenseurs des animaux (CIWF, Welfarm-PMAF) et des scientifiques réunis régulièrement par l’Itavi. Ces groupes de travail ont pour mission d’examiner et de choisir un ensemble d’indicateurs des conditions de vie à mesurer en élevage à partir de l’observation des animaux.
Approche scientifique et observations des animaux
« Pour chaque filière, nous avons d’abord ratissé large, souligne Laure Bignon, avec douze critères issus du projet européen de recherche Welfare quality." Selon quatre grands principes : bonne alimentation, bon environnement, bonne santé, comportement approprié. Les indicateurs ont été déclinés pour chacun des critères. Le groupe de travail a choisi de partir de l’observation des animaux avec une avancée lente de l’observateur dans le bâtiment. On utilise des indicateurs physiques tels que « sale », « immobile », « boiteux », « petit », « déplumé », qui pourraient être retenus. Quelques indicateurs de comportement comme « exploration », « déplacements », « bains de poussière » ont été également utilisés. « On a fait des tests et on a vu ce que cela donnait. Peu à peu, nous resserrons les critères pour atteindre l’objectif prioritaire de rapidité et de fiabilité. » Le stade d’avancement d’Ébene n’est pas le même partout. « D’ici à la fin de l’année, nous pensons parvenir à un outil abouti en poulet et en dinde, avec une évaluation qui serait réalisable en fin de lot. »
Un moteur de l’évolution des pratiques
Concernant les pondeuses, la méthode développée pour les élevages en cages aménagées devrait être disponible en fin d’année. « Nous partons sur une méthode d’échantillonnage sans manipulation des animaux. Elle sera adaptée aux autres systèmes cette année et validée en 2017. » L’évaluation ne sera pas à utiliser tous les jours, mais elle devra donner un repère sur un lot avec des corrections au lot suivant. Elle doit être réalisable en un temps raisonnable (environ une heure) par les professionnels eux-mêmes. Outre l’anticipation réglementaire et la validation d’indicateurs acceptés par les autres parties prenantes du bien-être animal (administration, distribution, défenseurs des animaux), Ébene sera un outil de progrès. Les filières reprendront ces indicateurs afin de les intégrer dans leurs chartes ou guides de bonnes pratiques d’élevage et du bien-être animal.
(1) Cicar, Cidef, Cifog, CIP, CIPC, Clipp, CNPO, Sna, Synalaf.« Une approche scientifique » pour CIWF
CIWF France a participé à une réunion de consultation d’Ébene en septembre 2015. Pour Agathe Gignoux, chargée d’affaires publiques, « Ébene est une démarche positive. Elle montre la volonté de mettre en place un outil de progrès qui ne porte pas uniquement sur la valorisation de l’existant et qui est basée sur une approche scientifique. Notre inquiétude aurait été de voir se créer un système d’évaluation basé sur un niveau minimal d’exigences et sans véritables marges d’amélioration. Le seul bémol est que nous n’avons pas été consultés dès le début. »