Des canards non épointés, déplumés et moins performants
Testé sur des canards non épointés, l’apport d’un aliment enrichi a permis de réduire sans le supprimer le phénomène de picage. Les performances économiques se sont dégradées.
Testé sur des canards non épointés, l’apport d’un aliment enrichi a permis de réduire sans le supprimer le phénomène de picage. Les performances économiques se sont dégradées.

Dans sa station expérimentale de Domagné (Ille-et-Vilaine), la firme services MG2Mix a étudié l’impact de différents régimes alimentaires pour combler les besoins de canards mâles de Barbarie non épointés et réduire les phénomènes de picage.
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Deux courbes ont été testées : un régime R2 très enrichi en protéines brutes (+3 points en aliment croissance, soit l’équivalent d’un aliment démarrage sous forme de granulés, et +2 points en finition) et un régime R3, à un niveau intermédiaire avec +1 point en aliment croissance et +2 points en finition.
Un écart de performances dès 49 jours
Première observation, les canetons épointés au couvoir avaient à l’arrivée à l’élevage un poids plus léger (3 g) et plus hétérogène que ceux non épointés, s’expliquant probablement par l’impact de leur manipulation à 1 jour. L’écart de poids se creuse à 30 g à 21 jours, alors que tous ont reçu un même aliment de démarrage. La tendance s’inverse par la suite. Le régime intermédiaire moyennement enrichi R3 décroche dès 49 jours en termes de croissance et d’indice de consommation. Le régime très enrichi R2 a permis de soutenir la croissance avec un poids élevé de 5,03 kg à 77 jours d’abattage, identique à celui du témoin. En revanche, l’indice de consommation s’est dégradé à 2,70 à 77 jours contre 2,53 pour le témoin. « Les animaux non épointés ont davantage consommé d’aliment, pour répondre à des besoins énergétiques plus élevés du fait d’un moindre emplumement et d’une forte mobilité dans la case pour fuir leurs congénères piqueurs », suggère Anaëlle Faouën, ingénieur volailles de MG2Mix.
Une part de picage plus élevée
Dans cet essai, l’absence d’épointage n’a pas occasionné de mortalité mais s’est traduite par une augmentation du pourcentage d’animaux déplumés et de la gravité du picage (sans traces de sang). À 49 jours, pendant la période la plus à risque de picage, le taux d’animaux piqués était de 0 % pour le lot épointé, contre 28 % pour les canards non épointés avec un régime très enrichi en protéines et de plus de 90 % pour ceux avec un régime intermédiaire. « L’épointage reste la meilleure solution pour éviter le picage mais il est toutefois possible de réduire le phénomène avec des apports nutritionnels renforcés. » Cela sous-entend d’accepter d’investir dans un aliment plus coûteux (jusqu’à 14 euros la tonne d’aliment d’écart). La distribution d’un aliment démarrage pendant la période de croissance a limité les troubles de picage au-delà de 49 jours, pendant la période de finition.
Un « effet individu » élevé
Autre enseignement, le phénomène de picage était limité à certaines cases de 40 animaux, d’autres étant complètement indemnes de picage (c’est-à-dire 12 à 50 % des cases du régime enrichi R2 selon l’âge des canards). « Quand la problématique de picage ne se déclare pas, il est possible d’élever les animaux dans de bonnes conditions, qu’ils soient épointés ou non », poursuit Baptiste Ruel, de la firme services. « Cela laisse penser qu’il y a un effet 'individu fort' dans le déclenchement du phénomène. Dans les élevages à risque de picage, le fait d’augmenter le nombre de parcs peut avoir un effet positif en cloisonnant le phénomène et en évitant sa dispersion à l’ensemble du bâtiment. »
L’amélioration du bien-être doit évidemment être vue dans sa globalité. Dans cet essai, le surplus protéique dans les régimes enrichis a entraîné une dégradation de la qualité des pattes des canards. La note de pododermatites était plus élevée du fait de fientes plus irritantes.

Un épisode de picage dégrade de 4 % le poids à 72 jours
La firme services a calculé l’impact technico-économique du picage sur des animaux non épointés en comparant les performances des cases avec ou sans aucun picage. Un épisode de picage entraîne une perte de poids d’environ 4,1 % à 72 jours d’abattage et une dégradation de l’indice de consommation d’environ 6,2 %. La perte économique sur le coût alimentaire a été estimée à 52 euros la tonne de poids vif, dans le contexte de prix de matières premières de fin 2021 (soit 0,773 euro par de poids vif à 72 jours sans picage, contre 0,825 euro avec picage).