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Bien-être des volailles en Allemagne : "faire simple pour être efficace"

La filière viande allemande a pris à bras-le-corps la problématique du bien-être animal en édictant des règles applicables par la grande majorité des élevages. Les consommateurs lui réservent un accueil favorable.

Au rayon volaille d'un supermarché allemand. Ces barquettes de filet de poulet (15 €/kg mi avril) indiquent que celui-ci a été élevé à moins de 35 kg de chargement vif au mètre carré, entre autres critères.
Au rayon volaille d'un supermarché allemand. Ces barquettes de filet de poulet (15 €/kg mi avril) indiquent que celui-ci a été élevé à moins de 35 kg de chargement vif au mètre carré, entre autres critères.
© C. Reibel

« Faire simple pour toucher le plus grand nombre possible d’éleveurs ». Robert Römer, directeur d’ITW pour Initiative Tierwohl (Initiative bien-être animal), résume ainsi la philosophie du principal programme allemand. Il vise à introduire progressivement plus de bien-être dans les élevages de volailles, de porcs et dernièrement de bovins.

Lire aussi : « Nos poulets moins substituables, et c’est tant mieux ! »

Le pragmatisme guide cette structure créée en 2015 par six acteurs que sont le syndicat général agricole (DBV), la fédération de l’aviculture (ZVG), de la viande (VDF), de la charcuterie (BVWS), le mouvement des coopératives Raiffeisen (DRV) et l’association ZKHL réunissant production, collecte et grande distribution. « Nous avons défini des critères de bien-être acceptables et facilement transposables dans le cadre de la réglementation en place », explique encore Robert Römer.

En pratique, le cahier des charges ITW est en vigueur pour trois ans. Durant cette période, les critères sont révisés pour le plan suivant. « Les adaptations sont mesurées », concède Robert Römer. « Par exemple, la mise à disposition de fourrage grossier est passée d’optionnelle dans le deuxième plan à obligatoire dans le troisième. Cela simplifie notre communication ».

Un comparatif des données d’abattage

Pour faire simple, le principal changement concerne le chargement. Il est limité à 35 kg/m² en poulets, 48 kg en dindes et 53 kg en dindons, là où l’atelier conventionnel autorise respectivement 39, 53 et 58 kg/m². L’éleveur met à disposition du matériel de jeu comme de la paille ou des blocs à picorer. Il s’équipe de moyens d’obscurcissement du bâtiment avant et pendant l’enlèvement.

Le producteur documente la mortalité, les pododermatites, les pertes durant le transport. Il garantit un accès facile à l’alimentation et au point d’abreuvement. Il s’engage à suivre au moins une formation par an. Un organisme indépendant visite l’élevage deux fois par an. Le bon fonctionnement des alarmes, de la ventilation et de la qualité de l’eau dont le pH doit être compris entre 5 et 9 est contrôlé chaque année.

 

 
Robert Römer. "Avancer à petits pas au rythme de programmes de trois ans convient parfaitement aux éleveurs"
Robert Römer. "Avancer à petits pas au rythme de programmes de trois ans convient parfaitement aux éleveurs" © ITW
Chaque abatteur communique à ITW les données sanitaires collectées sur sa chaîne. ITW les exploite en établissant chaque trimestre des comparatifs par type de production. L’organisation les renvoie aux éleveurs comme aux autorités vétérinaires.

 

Le cas échéant, un plan d’amélioration est mis en place chez les éleveurs. Ceux chez qui des manquements sont relevés sont sanctionnés et ceux qui innovent en matière de bien-être peuvent, depuis 2018, présenter leur candidature au prix de l’innovation doté de trois chèques de 10 000, 7 000 et 5 000 euros.

« Le programme ITW est un beau succès ! », se félicite Robert Römer. « En sept ans, il a réussi à orienter beaucoup d’élevages vers plus de bien-être. Toutes espèces confondues, 11 200 ateliers ont déjà franchi le pas. En volaille, on en recense 2 200 en poulet de chair, 700 en dinde et 20 en canard Pékin. Cela correspond à 700 millions de volailles par an, équivalant à 90 % de la volaille fraîche ou transformée vendue par la grande distribution allemande. Aucun autre pays en Europe ne peut présenter un tel bilan ».

 

 
Cuisses de poulets à 6.5 €/kg. Chaque barquette informe que le poulet a bien  été élevé selon les critères ITW, selon un mode de conduite mieux disant variant de 1 à 4 (ici 2).
Cuisses de poulets à 6.5 €/kg. Chaque barquette informe que le poulet a bien été élevé selon les critères ITW, selon un mode de conduite mieux disant variant de 1 à 4 (ici 2). © C. Reibel
Parallèlement, la notoriété d’ITW n’a cessé de progresser dans l’opinion publique. La dernière étude commandée par ITW à l’institut Forsa en décembre 2021 conclut que plus de 90 % des consommateurs jugent son concept « très bon » ou « bon ». « Notre objectif est que chaque consommateur ait accès à une viande produite sous label ITW », insiste Robert Römer.

 

Un cumul de 400 millions d’euros de primes

Les éleveurs sont dans l’ensemble prêts à passer à ITW. « Avancer à petits pas au rythme de programmes de trois ans leur convient. Tous reconnaissent, même si ce n’est parfois que du bout des lèvres, que le bien-être est la voie à suivre », évalue Robert Römer.

Le surcoût lié aux aménagements et à la baisse de densité est compensé par une prime de 2,75 centimes d’euro du kilo de poulet, 3,25 centimes du kilo de dinde et 4 centimes du kilo de dindon. Elle est calculée par un groupe d’experts agricoles avant de passer par une commission réunissant les partenaires de la filière pour validation.

En six ans, 200 millions d’euros ont été distribués aux aviculteurs participant au programme ITW, d’abord via un fonds géré par ITW et depuis 2021, à la suite d’une intervention de l’office des cartels, directement via le décompte envoyé par l’abattoir. « Fin 2023, le montant cumulé distribué aux aviculteurs participant à ITW atteindra quelque 400 millions d’euros », précise Robert Römer.

L’évolution du modèle ITW est en cours de discussion même si ses perspectives sont encore « un peu floues ». Fin 2021, l’arrivée au pouvoir d’une nouvelle coalition gouvernementale a vu la nomination au poste de ministre de l’Agriculture de Cem Özdemir, végétarien, issu des rangs écologistes. Il n’a guère tardé à prendre position pour dire son souhait d’aller vers un label bien-être national et la réduction des cheptels allemands. Les professionnels, tout comme les autorités locales habilitées à accorder des permis de construire, attendent des orientations officielles concrètes avant de préciser leurs choix.

Dans tous les cas, « il n’est pas prévu de transformer en profondeur les bâtiments existants. Cela reviendrait trop cher », lance Robert Römer. Les pouvoirs publics ont certes budgétisé un milliard d’euros sur quatre ans pour aider les investissements permettant aux animaux d’accéder à l’extérieur et de bénéficier de lumière naturelle. Sauf que toutes espèces confondues, le nombre d’élevages allemands est proche des 100 000. Cette aide risque donc de n’avoir qu’un effet marginal à l’échelle de chaque atelier pris individuellement…

Quatre niveaux d’étiquetage bien-être sur la barquette

La viande fraîche vendue dans la grande distribution est étiquetée 1, 2, 3 ou 4 selon le mode de conduite et concerne 80 % du marché.

 

 
Le chiffre indique le niveau de bien-être animal et stallhaltungPlus indique la volaille a été élevée avec plus de surface que le standard minimum
Le chiffre indique le niveau de bien-être animal et stallhaltungPlus indique la volaille a été élevée avec plus de surface que le standard minimum © ITW
Pour la volaille, une dizaine de filières sous signe de qualité sont concernées par la notation ITW en fonction de leur cahier des charges. La visibilité et la lisibilité de l’information sur l’étiquette doivent permettre à l’acheteur de s’informer en un coup d’œil du niveau de bien-être avec lequel l’animal dont il s’apprête à acheter la viande, a été élevé.

 

Le « 1 » correspond au standard : 39 kg/m² en poulet, 52 kg/m² en dinde, 58 kg/m² en dindon et 20 kg/m² en canard Pékin,
le « 2 » à l’ITW de base : 35 kg en poulet, 48 kg en dinde, 53 kg en dindon et 20 kg en canard Pékin,
le « 3 » avec jardin d’hiver : 25 à 29 kg en poulet, 30 % de surface en plus pour dinde et dindon, 20 à 25 kg en canard Pékin,
le « 4 » au premium avec parcours : 21 kg en poulet, 60 % de surface en plus pour dinde et dindon, 20 kg en canard Pékin.

Une étude commandée par ITW à l’institut de sondage Forsa en décembre 2021 confirme que le classement selon le mode de conduite est connu par 65 % de l’échantillon enquêté, soit une notoriété supérieure à celle du label bio européen.

 

 

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