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Vieilles vignes et grands vins, une affaire de génétique

Les caractéristiques agronomiques des vieilles vignes et la qualité organoleptique de leurs raisins découlent d’une modification de l’ADN de la vigne. C’est ce qu’a découvert un chercheur sud-africain en analysant le génome de vignes de pinotage.

Les travaux de séquençage du génome de vieilles vignes menés par Johan Burger ouvrent de nouvelles pistes pour la création variétale.
© X.DELBECQUE

Pour expliquer le lien entre l’âge avancé d’une vigne et la qualité supérieure des vins qui en sont issus, les arguments ne manquent pas. Il y a la profondeur d’enracinement, et les faibles rendements. « Souvent, les vins issus de vieilles vignes sont décrits comme plus profonds et plus complexes, note Johan Burger, professeur de génétique moléculaire à l’université de Stellenboch, en Afrique du sud. « Je voulais apporter une preuve scientifique à cela », poursuit-il en guise d’introduction à sa présentation lors du premier congrès international du chenin blanc, qui s’est déroulé à Angers en juillet dernier.

925 gènes s’expriment différemment dans des vignes de pinotage

En 2014, Johan Burger et son équipe ont lancé un travail de séquençage du génome de pinotage, principale variété utilisée, avec le chenin, pour la production de vins de vieilles vignes en Afrique du sud. « Nous avons séquencé le génome d’une vigne de plus de 40 ans et d’un cultivar de moins de 7 ans, dans l’objectif d’identifier toute différence significative au niveau de l’expression génétique », témoigne-t-il. Près de deux ans plus tard, les résultats de ce séquençage mettent en évidence que ce sont près de 925 gènes qui s’expriment différemment entre jeunes et vieilles vignes. La plupart sont impliqués dans les voies métaboliques lors de la maturation des baies. « Nous avons observé une tendance générale à une maturation tardive des baies de vieilles vignes ainsi qu’un meilleur équilibre sucre-acidité », complète-t-il.

La génétique pour préparer la viticulture de demain

Pionnière en la matière, cette étude ouvre de nombreuses portes pour la création variétale, via la sélection massale. « Pour continuer à cultiver la vigne, il faut comprendre ce qui se passe au niveau de l’ADN de la plante, insiste Johan Burger. Les modifications chimiques qui s’opèrent constituent une réponse directe à un changement des conditions environnementales. » Une piste à suivre alors que la viticulture mondiale fait face à de nombreux défis, tant sur le plan climatique que sanitaire. « Et puisque les vins issus de vieilles vignes sont tant appréciés par les consommateurs, imaginez qu’un jour il soit possible de modifier le génome d’une vigne pour obtenir ces caractères recherchés… », ose le généticien. Un champ de recherche toutefois plus périlleux !

Avis d’experts : Hugues Daubercies et Gwénael Guérin, consultants indépendants dans le Val de Loire

L'aromatique est modifiée par le décalage des maturités

« Les vieilles vignes d’aujourd’hui sont encore là car elles ont été sélectionnées pour leur haut potentiel qualitatif. De manière tout à fait naturelle, les vignes ayant des difficultés pour mûrir et pourrissant facilement tendent à disparaître car les vignerons n’ont pas d’intérêts à les conserver. À l’inverse, il existe aussi de jeunes vignes avec de réels potentiels qualitatifs. Si la préparation du terrain avant plantation et le travail du sol durant les premières années de culture de la vigne sont corrects, les horizons les plus profonds sont colonisés lors des dix premières années. Il n’y a pas de production de molécules chimiques différentes liées directement à l’âge de la vigne. En revanche, avec un enracinement plus profond, la maturité peut se décaler dans le temps tout en maintenant un état sanitaire très bon. Ainsi peuvent apparaître d’autres molécules, notamment des précurseurs aromatiques (de type norisoprénoïdes) mais aussi des concentrations plus importantes de ces molécules. Dans tous les cas, une vieille vigne ne fait des raisins de haute qualité que si elle est plantée dans un terroir adapté, sous un climat approprié et conduite par le vigneron de façon la plus respectueuse de son potentiel viticole. »

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