Un chai gravitaire pour économiser eau et électricité
La construction d’un chai gravitaire fait partie des voies permettant à François Fabre et à son fils Adrien, de limiter leurs consommations énergétiques.
La construction d’un chai gravitaire fait partie des voies permettant à François Fabre et à son fils Adrien, de limiter leurs consommations énergétiques.
Mieux vaut ouvrir l’œil si l’on veut apercevoir le chai de François et Adrien Fabre, situé à Visan, dans le Vaucluse. Nichée au milieu des genêts, la cave semi-enterrée se fond dans le paysage provençal. « Lorsque nous avons construit le bâtiment en 2001, nous avons réfléchi avec l’architecte à une solution discrète, qui ne dénature pas le cadre naturel, explique François Fabre. Mais nous voulions aussi limiter nos consommations d’énergie. » Profitant de la pente naturelle du terrain, le vigneron a opté pour un chai gravitaire. Il lui a fallu décaisser sur 6,50 mètres de hauteur et faire bâtir une cave en béton, plus solide qu’une structure métallique, pour résister aux poussées du terrain. « Un investissement très important, au moins cinq fois supérieur à ce que nous aurait coûté un bâtiment classique », assure-t-il. Entre deux batteries de cuves en inox, un quai roulant permet d’envoyer la vendange tout droit sortie de la table de tri jusque dans le cuvier de réception. Pour les blancs et rosés, les raisins passent par une goulotte afin d’être acheminés directement dans le pressoir, placé sous le quai. « Il n’y a donc aucun système électrique requis pour pomper la vendange à son arrivée en cave. Même si le gain énergétique n’est pas forcément énorme, ce sont tous les efforts mis bout à bout qui nous permettent de limiter nos besoins », commente François Fabre. De la récolte à l’embouteillage, en passant par le stockage, la consommation électrique annuelle s’élève à 40 000 kilowatts heure (kWh), soit un peu moins de 29 kWh/hl de vin produit. Un chiffre tout à fait raisonnable selon Gérard Gazeau, de la chambre d’agriculture du Vaucluse. À titre de comparaison, sur une dizaine de caves étudiées dans le département, la consommation annuelle varie de 15 à 93 kWh/hl/an. Il faut dire que les Fabre, père et fils, œuvrent sur tous les fronts pour réduire leur facture électrique et n’hésitent pas à sensibiliser leurs salariés. « Nous avons renouvelé notre pompe à chaleur un peu plus tôt que nécessaire pour être sûre qu’elle reste performante et ne consomme pas trop », indique François Fabre. Mais l’appareil ne permet pas de produire du chaud et du froid en simultané. Le vigneron utilise donc également un réchauffeur. « Le pic d’électricité au moment des vendanges vient principalement de cet appareil, mais si nous voulons nous en passer, il faudrait investir dans une deuxième pompe à chaleur », regrette-t-il. Enfin, François Fabre s’est posé la question des luminaires. « Nous avons mis des néons partout pour faciliter le travail mais sur certaines zones où les besoins lumineux sont moins importants, j’aimerais basculer sur d’autres modes d’éclairage. »
Optimiser le nettoyage pour limiter les consommations d’eau
En ce qui concerne l’eau, François Fabre puise dans un forage situé sous la cave. « Nous n’avons pas le relevé exact de nos consommations mais nous sommes très attentifs au gaspillage », commente-t-il. Il faut dire que le quai roulant est très facile à nettoyer. « Il n’y a pas de recoins, seulement un plan incliné en inox à rincer. D’autant plus que les grappes entières salissent beaucoup moins que la vendange éclatée », reconnaît le viticulteur. Ce système lui paraît plus économe en eau que les sauterelles. « Les tapis roulants présentent de nombreux recoins, véritables nids à contaminations. Le nettoyage est bien plus compliqué et demande davantage d’eau », observe-t-il. Mais là encore, l’installation gravitaire n’est qu’un élément parmi d’autres et tous les moyens sont bons pour réduire les quantités employées. « Nous utilisons un jet haute pression qui consomme peu ainsi que des pistolets qui ferment bien sur tous nos tuyaux. De manière générale, nous misons sur du matériel facile à nettoyer », note François Fabre. Des compteurs d’eau, prêtés durant une campagne de vinification il y a quelques années de cela, lui ont tout de même permis de surveiller ses besoins. « À l’époque, nous étions en dessous des valeurs moyennes estimées par la direction départementale de l’agriculture. Mais à quoi correspondent vraiment ces chiffres ? » s’interroge François Fabre. Pour l’heure, le vigneron n’utilise plus de capteur et vise le zéro gaspillage. « Au départ, notre première motivation pour installer un chai gravitaire était purement qualitative. Ce n’est qu’après coup que nous nous sommes rendus compte du confort de travail et de la facilité de nettoyage qui découle d’une telle installation », conclut-il. Une chose est sûre, le choix de cet aménagement s’inscrit dans une réflexion globale quant à l’efficience énergétique de l’exploitation. Réflexion qui a également poussé François Fabre à installer des toitures végétalisées sur une partie de ses bâtiments. Ce qui lui a permis de répondre à des exigences esthétiques tout en apportant une régulation thermique naturelle, en particulier dans le chai à barriques.
SCEA Vallon Notre-Dame
Propriétés domaine la Florane et domaine de l’Échevin
Surface 40 ha
Appellations côtes-du-rhône village visan et côtes-du-rhône village saint maurice
Production annuelle 1 400 hl
Salariés 4 ETP
Prix des bouteilles entre 7,50 et 15 euros TTC
Circuits de commercialisation 50 % France (CHR et vente directe) et 50 % export (USA, Allemagne, Angleterre, Europe du Nord, Japon)
Des économies liées aux bâtiments enterrés ou semi-enterrés
« Les systèmes gravitaires peuvent aider à réduire les consommations énergétiques mais l’effet est souvent difficile à mesurer et surtout, impossible à transposer d’une cave à l’autre. Cela varie énormément en fonction du process de vinification. La diminution est pour partie liée à l’absence de transfert mais le gain n’est pas énorme. En réalité, les économies portent surtout sur la régulation naturelle de température dans les bâtiments enterrés ou semi-enterrés. Or, même s’il n’y a pas de règle générale, ces derniers sont souvent associés au fonctionnement gravitaire. Quoi qu’il en soit, il est important de tout prendre en compte. Car si l’utilisation d’un quai mobile permet de se passer de pompage, il faut néanmoins un moteur pour le déplacer, ce qui consomme de l’électricité. Quant au nettoyage, je ne suis pas sûr qu’il y ait un gain très net dans les chais gravitaires. Cependant, il paraît logique que les systèmes de quais roulants, même s’ils sont plus compliqués à mettre en œuvre, entraînent un bénéfice en termes de qualité et de nettoyabilité, par rapport aux tapis élévateurs. »