éco-conception
Les bouteilles de vin se passent de capsules
Depuis le 1er juin 2019, la capsule représentative de droit (CRD) n’est plus obligatoire en France. Soucieux de limiter leurs emballages, quelques-uns osent s’en passer, au prix de lourdeurs administratives supplémentaires.
Depuis le 1er juin 2019, la capsule représentative de droit (CRD) n’est plus obligatoire en France. Soucieux de limiter leurs emballages, quelques-uns osent s’en passer, au prix de lourdeurs administratives supplémentaires.
La société de négoce EthicDrinks, basée à Bordeaux, est spécialisée dans la vente de vins qu’elle présente comme éthiques, issus de pratiques durables et certifiées. Elle revendique par ailleurs une activité neutre en carbone. Pour atteindre cet engagement, Mickaël Alborghetti, le fondateur, a étudié l’impact environnemental d’une bouteille de vin à partir de la méthode d’analyse du cycle de vie (ACV), allant jusqu’à visiter les usines de tri et de recyclage. Il s’est donc penché sur la capsule.
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La grande distribution est plutôt réticente
« Au début, on a cherché une capsule green car pour la plupart des supermarchés, elle est indispensable. Ils ont peur de perdre des clients, car a priori beaucoup sont habitués à regarder les informations sur le dessus de la capsule. Elle présente en plus l’avantage de cacher les petites différences de niveau dans le goulot, dont le consommateur n’a pas conscience », expose-t-il. Mais la plus verte des capsules, courte et en aluminium recyclé, est aussi la plus chère du marché. « On a pensé au cirage pour travailler l’aspect visuel. Mais la plupart des cires contiennent des composants d’origine pétrochimique. Donc finalement, on a choisi de se passer de capsules », poursuit le dirigeant. Avec un poids moyen d’environ 2 g par capsule, Mickaël Alborghetti estime avoir ainsi économisé près de 200 kg de déchet par an.
La volonté de casser les codes
Les vins EthicDrinks s’adressent à une clientèle jeune et urbaine, sensible à la réduction des emballages. S’il estime que l’absence de capsules « n’est pas faite pour tout le monde », Mickaël Alborghetti assure que sa démarche a été bien comprise par la clientèle qu’il cible. « Pour nous ça fonctionne car ça s’inscrit dans une démarche globale de réduction de l’empreinte environnementale de notre activité. On cherche à casser les codes. Refuser la capsule c’est casser un code supplémentaire, donc c’est cohérent », analyse le dirigeant, dont les vins sont vendus chez Monoprix. Se passer de capsule est clairement un choix nécessitant d’avoir un distributeur convaincu. Éric Reppert, fondateur du site vins-etonnants.com, orienté sur les vins bio, biodynamiques et nature, confie que « certains domaines nous demandent si ça nous dérange. Nous acceptons toujours et nous l’indiquons sur le site ». Il ne relève pas de freins de la part de ses clients. Autre son de cloche chez Nicolas, qui n’en propose pas, considérant que la capsule a pour le consommateur un double rôle, d’aider à la conservation du vin et de porter diverses informations légales sur la bouteille.
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Un choix peu encouragé par l’administration
En France, les contraintes administratives restent un fort obstacle. « Il est quasiment impossible de joindre les douanes et parfois selon les services, il y a des discours contradictoires. Globalement, je trouve que le fait que la capsule ne soit plus obligatoire n’est pas encore bien assimilé par les professionnels de la filière vin », soulève Mickaël Alborghetti. En Alsace, le vigneron Florian Beck-Hartweg confirme l’obstacle administratif. Engagé en bio, biodynamie et vin nature et soucieux d’améliorer sans cesse l’impact environnemental du domaine, lui et sa femme Mathilde ont décidé de supprimer la capsule pour les bouteilles exportées. « Les retours sont excellents, pour la démarche comme pour le visuel qui passe bien. Il faut dire que nous avons une clientèle ouverte et 'progressiste'. Serait-ce le cas avec une clientèle classique ? », s’interroge le vigneron. En France, il constate que « la CRD n’est plus obligatoire, mais cela oblige à faire un DAE à chaque client pro et une facture plus complète pour chaque client particulier. C’est trop compliqué à gérer au vu de notre structure. Nous avons demandé aux douanes de pouvoir apposer simplement un autocollant avec la Marianne comme pour les capsules couronne, mais c’est refusé. Sans motif pratique, simplement parce que ce n’est pas prévu. C’est très dommage », regrette-t-il. S’il admet que « nos yeux sont habitués » à la capsule, il trouve très positif que cela permette de voir le bouchon personnalisé du domaine.
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