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La thermorégulation, un gouffre énergétique

Dans le chai, le poste le plus consommateur en énergie serait la thermorégulation. Elle pèserait même pour 71 % des consommations totales, selon un bilan d’audits réalisés en région Paca par les Chambres d’agriculture 13 et 84 et le cabinet d’études Solair.

Comment réduire ses émissions de gaz à effet de serre (GES), abaisser sa consommation d’énergie et d’eau ou son empreinte carbone ? « Ce sont des questions que l’on nous pose de plus en plus et il est normal que l’on prenne le temps de réfléchir à nos pratiques, pour voir quels moyens de progression mettre en place », confie Jean-Louis Galucci, directeur et maître de chai du domaine du Chêne Bleu, à Crestet, dans le Vaucluse. Le 27 juillet dernier, son domaine a donc accueilli une réunion sur la réduction des consommations énergétiques, organisée par les Chambre d’agriculture du Vaucluse et des Bouches-du-Rhône. Elles ont présenté les résultats de diagnostics énergétiques réalisés auprès de cinq caves particulières de la région, en partenariat avec le bureau d’études Solair. Ces données complètent les références régionales acquises auprès de onze autres caves, ainsi que des informations acquises au niveau national dans différents bassins viticoles (Bourgogne, Aquitaine, Occitanie). « L’audit énergétique, qui complète le diagnostic, permet d’affiner les postes de consommation, notamment électrique, dans la cave, indique Gérard Gazeau, de la chambre d’agriculture de Vaucluse. Ensuite, des préconisations sont faites pour permettre à l’exploitation de réduire sa consommation énergétique et d’améliorer son impact environnemental. »

La vendange ne pèse que 11 % de la consommation énergétique

Suite à un appel des Chambre d’agriculture du Vaucluse et des Bouches-du-Rhône, cinq caves ont ouvert leurs portes au bureau d’études Solair. « Les différences constatées entre les cinq caves peuvent s’expliquer par les choix mis en œuvre, comme le fait de gérer en propre ou non l’embouteillage, d’avoir un caveau, de produire de l’azote, ou bien encore par la conception même du chai avec une cave enterrée ou un puits canadien qui permettent de réduire les consommations énergétiques », introduit Adam Kozlow, de Solair. Et les résultats acquis sur ces cinq caves sont étonnants. Contrairement à ce que l’on pourrait croire, ce n’est pas la vendange qui mobilise l’essentiel de la consommation énergétique annuelle. « Non, insiste l’expert. La vendange et l’utilisation de tous les matériels qui y sont liés ne représentent que 11 % du total. Ce n’est donc pas forcément sur les machines employées pendant cette période – pressoir, fouloir, égrappoir, pompe à vendange, pompe à vin – que l’on fera le plus d’économies. » Et ce n’est pas non plus sur la mise en bouteille, qui ne pèse que 8 % de la consommation énergétique globale. « Le premier poste sur lequel il faut jouer si l’on veut vraiment améliorer sa consommation énergétique, c’est la thermorégulation et tout ce qui est lié à la vinification, au chauffage et au refroidissement, annonce Adam Kozlow. Avec, en ligne de mire, le groupe froid et toutes les machines liées, comme le circulateur qui distribue le froid et le chaud et fonctionne toute l’année. » Et pour cause ! Ce poste représente 71 % de la consommation totale, avec une variation comprise entre 59 et 89 % dans les cinq caves auditées. Redimensionner sa chaudière, modifier l’énergie de chauffage, remplacer les aérothermes et les circulateurs, ajuster les températures, isoler les bâtiments à la construction, ne chauffer/refroidir que certaines zones, réorganiser/compartimenter les volumes de stockage, en séparant par exemple les espaces de vinifications blanc et rosé des espaces dédiés à la vinification des vins rouges « pour réduire les échanges thermiques entre pièces ». Telles sont quelques-unes des actions qui auront un vrai effet sur la réduction de la consommation énergétique.

Eco-conduite et emballage éco-conçus

De manière plus générale, outre l’investissement dans du matériel qui peut bénéficier de certaines aides, plusieurs pistes de travail peuvent être engagées pour diminuer les consommations. Citons le passage du tracteur au banc d’essai pour vérifier sa puissance réelle (des études récentes montrant que cette simple vérification permet en moyenne d’économiser 10 % du carburant), la réalisation de stages d’éco-conduite, la simplification des itinéraires techniques en mettant en place des outils combinés pour réduire le nombre de passages, ou encore l’enherbement des vignes (effet positif sur le stockage du carbone). Pour les énergies indirectes, le vigneron peut avoir recours à des emballages éco-conçus (bouteilles allégées, grammage des cartons… afin de réduire les émissions liées au transport), régler et entretenir son pulvérisateur, utiliser des buses antidérive, adapter les doses de produits phytosanitaires ou vérifier son réseau d’irrigation.

Pour faire son autodiagnostic énergie/GES, pensez à l’outil www.jediagnostiquemaferme.com

L’électricité, premier poste de consommation énergétique

Les audits sont réalisés à l’échelle de l’exploitation, autour de trois ateliers, sur la base des factures émises : la culture (vigne), la transformation (vinification) et la commercialisation (embouteillage, stockage, caveau, bureaux…), et sur le périmètre de l’exploitation uniquement. Côté données, sont intégrées les énergies directes (électricité, fioul) et indirectes « c’est-à-dire mobilisées pour la fabrication d’intrants », illustre Gérard Gazeau, de la chambre d’agriculture de Vaucluse. Bien évidemment, le diagnostic énergétique est propre à chaque exploitation et varie en fonction des choix réalisés (embouteillage sur le domaine ou non, présence d’un caveau, etc.).

Dans les énergies directes, l’électricité (200 Gj/ha soit en moyenne 40 % sur les 16 caves) est le premier poste de consommation énergétique, loin devant le fioul (environ 50 Gj/ha soit 16 % en moyenne) et les autres produits pétroliers (gasoil routier essentiellement, environ 35 Gj/ha soit en moyenne 9 %).

Les énergies indirectes arrivent largement plus loin. Les bâtiments (environ 25 Gj/ha), premier poste, représentent à peine 1/10e de la consommation totale d’électricité, devant les autres intrants hors verres (cartons, BIB, bouchons…) avec 18 Gj/ha, les matériels (13 Gj/ha) et les produits phytosanitaires (8 Gj/ha) ou encore l’énergie d’irrigation (3 Gj/ha).

Au niveau des émissions de gaz à effet de serre, la moyenne des 16 caves atteint 2,5 teq CO2/ha (avec verre), avec une variation comprise en 1,5 et 6 teq CO2/ha sur les cinq caves auditées. « Les postes principaux sont les intrants verre, les cartons, les bâtiments et les énergies directes carbonées », détaille Gérard Gazeau.

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