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Gérer ses effluents de cave naturellement grâce au système Wetwine

Le projet européen Wetwine, sur la gestion des effluents vinicoles, a débouché sur un système de traitement des eaux écologique et à coût maîtrisé.

Le traitement des effluents vinicoles par lits plantés de roseaux permet de réduire l'impact environnemental de la cave par rapport à d'autres système. © Aimen
Le traitement des effluents vinicoles par lits plantés de roseaux permet de réduire l'impact environnemental de la cave par rapport à d'autres système.
© Aimen

Donner aux entreprises vinicoles du sud-ouest de l’Europe une solution innovante pour la gestion des effluents de cave, c’est ce qui anime depuis 2014 les partenaires du projet Wetwine. En ce mois de juin, ce programme transnational tire ses conclusions, et propose aux acteurs de la filière un système de traitement à coût maîtrisé, efficace et facile à gérer, à l’issue duquel est obtenu un fertilisant naturel pour le vignoble. « L’économie circulaire a été au centre de nos préoccupations. Nous avons adapté les technologies naturelles de traitement des eaux usées aux besoins spécifiques du secteur vitivinicole », commente Laure Gontier, en charge du projet à l’IFV Sud-Ouest. Le procédé retenu par les chercheurs est celui de l’épuration par des lits plantés de roseaux. Ces végétaux cumulent plusieurs caractéristiques facilitant la dégradation des déchets organiques, puisque leur chevelu racinaire abrite de nombreuses bactéries épuratrices, leur tissu cellulaire permet le transfert d’oxygène des parties aériennes à celles souterraines, et l’oscillation des tiges sous l’effet du vent évite le colmatage du lit.

Le système accélère les mécanismes qui se passent dans la nature

En pratique, les effluents de caves sont préalablement traités dans un digesteur anaérobie qui capte les parties solides et opère une sédimentation. Cela permet de séparer le rejet en deux phases, solide (boues) et liquide, qui seront gérées séparément. « L’idée de ce réacteur, qui marche à température ambiante, est de réduire le volume total de boues, grâce à l’hydrolyse des composés », explique Laure Gontier. La phase liquide est ensuite dirigée vers une ligne de traitement des eaux composée de deux systèmes de lits plantés successifs. Ces eaux circulent de façon souterraine dans une couche de gravier, où elles sont en contact avec les racines et les rhizomes des plantes. C’est là que se produisent les mécanismes physiques, chimiques et biologiques naturels tels que l’élimination de la matière organique par la filtration et la dégradation par les micro-organismes, l’élimination des organismes pathogènes par les bactériophages ou encore celle de l’azote et du phosphore qui sont absorbés par les plantes pour assurer leur croissance. « Lors des essais sur l’installation pilote de la Bodega Santiago Ruiz en Espagne, nous avons réussi à supprimer 90 % des solides et 75 % de la DCO, la demande chimique en oxygène, relate l’ingénieure IFV. L’analyse des eaux de sortie a montré qu’elles étaient aptes à être rejetées dans le milieu naturel et même à être réutilisée pour l’irrigation en Espagne. » Les rejets solides du digesteur sont également dirigés vers une ligne de traitement dédiée, reposant elle aussi sur le principe des lits plantés de roseaux. Le système comprend plusieurs cellules dans lesquelles les boues s’accumulent dans la partie supérieure. Ces dernières se déshydratent alors sous l’effet de l’évapotranspiration des plantes. « Il faut compter deux à trois ans pour que les boues se stabilisent », détaille Laure Gontier. À l’issue du processus, on obtient un produit final à plus de 25 % de matières sèches, utilisable directement en tant qu’amendement pour la vigne. « C’est un substrat dont on a démontré l’innocuité, puisqu’il respecte les normes sanitaires et celles d’éléments traces », précise l’ingénieure. Ce sous-produit a d’ailleurs fait l’objet de tests agronomiques. Il a été utilisé en application localisée sous le cep dans des parcelles en Espagne et dans le sud de la France, en comparaison avec un engrais commercial. « L’intérêt est variable mais non nul, témoigne Laure Gontier. Il y a quelques effets sur la vigueur et l’azote assimilable, mais c’est moins marqué qu’avec des amendements commerciaux. »

Un guide pour construire pas à pas sa station d’épuration

L’analyse du cycle de vie réalisé par les scientifiques a mis en évidence que l’impact environnemental du procédé Wetwine était systématiquement plus faible que pour des systèmes de boues activées ou une gestion par des tiers. À quoi s’ajoutent la réduction des odeurs et des moustiques, puisque l’eau n’est pas visible, et une intégration paysagère plus facile.

Les chercheurs ont également édité un manuel de bonnes pratiques, pour que les structures vinicoles puissent s’approprier facilement le système, de la petite cave particulière à la grosse structure coopérative. On trouve dans cet ouvrage une description détaillée du procédé Wetwine, expliquant plus précisément les processus mis en œuvre lors des étapes de traitements primaire, secondaire et de traitement des boues. Mais surtout, le manuel fournit les recommandations pour la conception et la construction du système Wetwine, ainsi que pour la maintenance. La marche à suivre y est explicitement listée, depuis le dimensionnement des structures jusqu’aux espèces végétales à utiliser, en passant par le placement des tuyaux et les épaisseurs de gravier. Tout ce qui est nécessaire pour se lancer chez soi en somme. Un logiciel est également disponible en ligne pour simuler la configuration optimale du système (dimensionnement, coût, etc) pour sa propre structure, en entrant quelques paramètres sur la cave et la caractérisation des effluents. « Pour une cave produisant 40 000 hectolitres de vin par an, il faut compter environ 300 m2 de surface totale, pour un investissement de 116 000 euros », illustre Laure Gontier.

Phytobarre traite les effluents phytosanitaires

D’autres chercheurs se sont lancés dans le développement d’une solution concrète pour le traitement des effluents de la filière viticole. Daniel Garcia et Camille Escoffier, forts de 25 années de recherches en biologie cellulaire au CEA (Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives), ont créé l’an dernier la société Adequabio, qui commercialise le Phytobarre. Ce procédé de traitement biologique des effluents phytosanitaires repose sur l’évaporation naturelle couplée à l’action de bactéries photosynthétiques, qui utilisent la lumière du soleil comme source d’énergie et dégradent les molécules de matières actives. Le seul entretien nécessaire est l’ajout d’un sachet de bactéries lyophilisées une fois par an dans le bassin de traitement. Phytobarre, qui a obtenu l’agrément du ministère, permet de traiter les bouillies de pesticides non utilisées et les eaux de lavage des pulvérisateurs. Il affiche un taux moyen d’épuration de 95 %. Son coût d’installation est compris entre 5 000 euros et 35 000 euros selon le dimensionnement, hors montage.

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