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Choisir son filtre en fonction de la turbidité du vin

L’IFV et la chambre d’agriculture de Gironde ont comparé différentes techniques de filtration. Voici leurs conclusions.

Le choix du média filtrant est souvent un problème épineux. L’IFV et la chambre d’agriculture de Gironde ont donc mis en place une série d’essais dans différentes caves de la région bordelaise, entre 2012 et 2014, pour y voir plus clair. Les chercheurs ont testé le filtre à inox fritté Fabbri (tube inox 36 microporeux), un filtre à cartouches équipé du média filtrant Millichilling Millipore (membrane microporeuse de nature minérale) et le filtre Microflex de Diemme (membrane de fluorure de polyninylidène).

Cartouches et inox fritté, peu efficaces sur des vins chargés

L’inox fritté et les cartouches Millipore ont été testés face à un filtre tangentiel sur un vin rouge en AOC haut-médoc, du millésime 2011. « C’est un vin rouge de garde qui a passé dix-huit mois en fûts. Il s’est déjà clarifié progressivement au cours de l’élevage, ce qui en fait un vin plus facile à filtrer », annonce Emmanuel Vinsonneau, de l’IFV. Du point de vue technique, les trois équipements ont donné des résultats satisfaisants, avec des débits stables et une légère augmentation de la pression, sans pour autant qu’il y ait de colmatage. Turbidité et coefficient de colmatage diminuent de manière significative, rendant le vin apte à une filtration de mise en bouteilles. « Cet essai a donc permis de valider le potentiel technique de l’inox fritté et des cartouches sur un vin déjà clarifié. Cependant, il nous fallait aussi valider l’absence d’impact organoleptique », poursuit Emmanuel Vinsonneau. Et là aussi, le résultat est satisfaisant puisque les dégustations trois mois après l’opération n’ont pas révélé de différence avec le témoin non filtré.

Par la suite, un deuxième essai a été mené pour confronter l’inox fritté et les cartouches Millipore à un filtre à alluvionage continu. Et ce, sur un rouge de 2011, issu d’une vendange chauffée et donc plus difficile à clarifier que dans le cas précédent. Au cours de la filtration, les débits sont restés relativement stables pour les filtres à cartouches et à alluvionage. En revanche, dans les conditions de l’essai, le colmatage progressif des matériaux témoigne bien de la mauvaise filtrabilité du vin. On observe une chute de turbidité, plus importante dans le cas du filtre à alluvionage que des cartouches. L’inox fritté n’a, quant à lui, aucun impact sur ce paramètre. Sur le critère du coefficient de colmatage, l’inox fritté et le filtre à cartouches se révèlent moins performants que l’alluvionage. Quant à la quantité d’oxygène apportée, elle reste modérée. Si le filtre à cartouches et l’inox fritté se montrent donc décevants d’un point de vue technologique, il en va de même pour les paramètres organoleptiques. En effet, la dégustation réalisée trois mois après filtration donne l’avantage au témoin non filtré et à l’échantillon passé par le filtre à alluvionage. Le jury leur attribue une meilleure qualité de l’arôme en bouche et une intensité tannique moins forte. « Sur vins turbides à mise précoce, ces équipements montrent donc leurs limites », conclut Emmanuel Vinsonneau.

Le MicroFlex tient la comparaison sur rouge comme sur blanc

Comme pour l’inox fritté ou les cartouches, le filtre MicroFlex a été testé sur un rouge de garde, après douze mois d’élevage en fûts. Dans le cadre de cet essai, l’équipement a été mis face à de la filtration tangentielle. D’un point de vue technique, il s’en sort bien, puisque les résultats sont équivalents. Tant du point de vue du débit ou de la pression, qui restent stables, que de celui de la turbidité et du coefficient de colmatage. Les niveaux finaux permettent, dans les deux cas, d’envisager une filtration de mise en bouteilles. À l’analyse sensorielle, aucune différence significative ne ressort entre les différents lots. En revanche, la tendance trois mois après mise semble tout de même donner l’avantage au MicroFlex. Le vin ressort en effet légèrement plus fruité et plus épicé que le témoin non filtré ou que celui ayant subi une filtration tangentielle.

En outre, le MicroFlex a été éprouvé sur un vin blanc, issu du millésime 2014. « Un vin jeune, avec une mise précoce, de type bordeaux blanc ou entre deux mers », souligne Emmanuel Vinsonneau. Dans ce dernier essai, les experts ont mis en parallèle le MicroFlex avec un filtre à plaques. Face à une turbidité de départ un peu élevée, les deux équipements se défendent plutôt bien. Dans les deux cas, les débits restent stables tout au long de l’essai. La pression demeure elle aussi stable, et basse, pour le MicroFlex, ce qui traduit l’absence de colmatage. Aucune donnée de ce type n’a pu être relevée pour le filtre à plaques. Les deux matériaux entraînent une diminution significative de la turbidité et du coefficient de colmatage (plus importante pour le filtre à plaques). Quant à l’oxygène dissous, la teneur relevée après passage au MicroFlex est deux fois supérieure à celle obtenue avec le filtre à plaques, mais reste acceptable. Côté aromatique, les dégustateurs ne font là aussi ressortir que des tendances, et aucun écart significatif. Toutefois, comme pour l’échantillon rouge, les jurys tendent à préférer la modalité obtenue avec le MicroFlex, soulignant notamment des notes plus fruitées.

Simuler sa filtration

Afin d’y voir plus clair, le laboratoire d’analyses Zaegel œnologie, situé à Morey-Saint-Denis, propose une simulation de filtration à ses clients. Pour la modique somme de 17 euros par vin, il est possible de faire des essais de filtration, en utilisant différents médias filtrants. Première étape : mesurer la turbidité initiale de l’échantillon. Vient ensuite l’heure des tests, une seule bouteille suffit par média filtrant. « Nous utilisons un appareil de notre invention, qui fonctionne à basse pression », précise Antoine Lardy, directeur général de Zaegel œnologie. Il suffit ensuite de regarder la turbidité post-filtration pour évaluer le différentiel. « Si cela colle aux objectifs du vigneron on essaye un autre média filtrant, moins serré, pour comparer l’impact sur le vin. En revanche, si les résultats ne sont pas satisfaisants on teste une filtration plus serrée », poursuit-il. Surtout, l’œnologue cherche à intégrer les vignerons au maximum dans la démarche. « Ils viennent déguster tous les échantillons pour évaluer le rendu organoleptique. Car les différents process vont être plus ou moins lâches, ce qui se traduit par plus ou moins d’ampleur ou de tension en bouche. Mais là, ce sont des choix subjectifs propres à chaque vigneron », estime Antoine Lardy.

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