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« Une prairie temporaire détruite sans labour ni chimie »

Au Gaec des deux rives dans les Deux-Sèvres, un essai a montré cette année qu’il est faisable de se passer de labour et de chimie pour implanter un maïs derrière une prairie. L’itinéraire testé met en œuvre un outil animé, le rotavator.

Frédéric Soulard. « Notre objectif est de se passer quand c’est possible du labour, pour des raisons  agronomiques et dans la mesure où cela ne compromet pas la réussite de la culture. »
Frédéric Soulard. « Notre objectif est de se passer quand c’est possible du labour, pour des raisons agronomiques et dans la mesure où cela ne compromet pas la réussite de la culture. »
© Civam du Haut-Bocage

Frédéric Soulard est installé en Gaec avec Bruno Soulard et Thierry Guette à Saint-Amand-sur-Sèvre dans les Deux-Sèvres. Ensemble, ils élèvent 170 blondes d’Aquitaine et vendent des broutards et des vaches finies. « Les prairies occupent 65 % de la surface. Nous avons un peu de prairies naturelles, mais surtout des prairies multiespèces, en majorité composées de fétuque, RGA et TB », décrit Frédéric Soulard.

Il participe à un groupe d’éleveurs animé par le Civam du Haut-Bocage sur « la réduction du travail du sol sans chimie ». « Notre objectif est de se passer quand c’est possible du labour, pour des raisons agronomiques et dans la mesure où cela ne compromet pas la réussite de la culture », explique Frédéric Soulard. La priorité reste de se prémunir de gros échecs. « Pour semer un maïs ensilage derrière une prairie, cela est accessible. Depuis dix ans, nous ne désherbons plus chimiquement le maïs. Cette année, nous avons testé pour la première fois la destruction de la prairie sans labour et sans chimie. Et cela a donné un bon résultat, observe-t-il. Nous avons récolté environ 14 tMS/ha d’ensilage de maïs. Et il n’y a pas eu de battance alors que sur cette parcelle, c’était le risque. »

 

« Une prairie temporaire détruite sans labour ni chimie »

 

La Cuma des éleveurs s’est équipée il y a trois ans d’un rotavator. « Cela nous a ouvert pas mal de possibilités. » Frédéric Soulard est intervenu tôt dans la parcelle. « En débutant entre mi-mars et début avril, les résidus de prairie ont le temps de commençer à se décomposer avant le semis du maïs » explique-t-il. Il faut cependant avoir dix jours de beau temps avant de commencer, pour que la prairie soit encore en phase peu active mais le sol suffisamment sec.

Compter 15 jours à 3 semaines sans pluie

« Le rotavator était réglé pour scalper les plantes entre les racines profondes et le plateau de tallage, à quatre centimètres de profondeur. Pour obtenir cette précision, nous avons utilisé deux roues de jauge à l’avant et deux roues de jauge à l’arrière. » La pignonnerie de l’appareil a également été adaptée pour une vitesse de rotation la plus élevée possible, et les volets ont été ouverts pour que l’herbe soit mieux séparée de la terre en sortie d’outil. Ainsi, les chances pour que les pieds de prairie ne puissent pas repartir sont améliorées. « Il faut quand même compter sur quinze jours à trois semaines sans pluie pour que les plantules ne repartent pas. »

Frédéric Soulard a réalisé ensuite un passage de cultivateur puis un passage de fissurateur – ce dernier pour sécuriser le résultat. Un mulch était présent en surface. « Il faut tenir compte du fait que le sol se réchauffe moins vite que quand il est nu pour fixer la date de semis du maïs. Je l’ai fait le 15 avril, alors que d’habitude c’est plutôt le 1er avril. » Le semoir à maïs a aussi été équipé de chasse-mottes rotatifs (en étoiles) pour éviter les bourrages.

 

 

 

« Cet essai a été fait sur un mélange RGH et trèfles âgé de 3 ans, mais on peut essayer la même chose sur une prairie plus pérenne type pâturage en fin d’exploitation. J’avais fait un ensilage juste avant de passer le rotavator. On aurait pu faire faire un pâturage ras fin février ou début mars », évoque Frédéric Soulard.

D’autres pistes possibles pour contrôler le coût de l’intervention

Le gros inconvénient aux yeux de l’éleveur de cet itinéraire technique est le coût du passage de rotavator. « Les pièces d’usure sont chères. Et il faut un tracteur de 150 CV pour un outil de 3 mètres, à 1 000 tours, il faut compter entre 16 et 25 litres de carburant par hectare et par heure », explique Frédéric Soulard.

Le groupe d’éleveurs du Civam du Haut-Bocage cherche ainsi à réduire cette charge. « Nous réfléchissons à peut-être commencer à dégrader le couvert à l’automne avec une herse, puis semer dans la prairie un seigle qui continuera à fissurer le sol et rendra plus facile le scalpage au printemps suivant. Un passage d’outil mécanique à dents, qui consomme beaucoup moins, pourrait alors suffire pour détruire la prairie. »

Le groupe pense aussi essayer de passer le rotavator à l’automne, puis semer un méteil dans la prairie pour l’étouffer. Celui-ci pourrait être récolté avant semis du maïs, ou bien le maïs semé au strip-till dans le méteil.

Côté biblio

Le programme Praigly, conduit par Arvalis et ses partenaires, livrera ses conclusions en 2022. Une brochure téléchargeable gratuitement présente déjà le résultat d’enquêtes auprès de dix éleveurs de bovins de l’Ouest en 2020. Quatorze itinéraires techniques sont identifiés, décrits et analysés pour se passer de glyphosate et de labour dans la destruction de prairies temporaires.

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