Se concerter pour gérer le risque des salmonelles en poule pondeuse
En filière ponte, la mise en œuvre de la directive salmonelle est vécue comme une contrainte par l’ensemble des acteurs, avec un risque de perte de sens de l’objectif commun qu’est la santé publique.
En filière ponte, la mise en œuvre de la directive salmonelle est vécue comme une contrainte par l’ensemble des acteurs, avec un risque de perte de sens de l’objectif commun qu’est la santé publique.
La mise en œuvre de la réglementation européenne sur les salmonelles implique l’intervention de nombreux acteurs : éleveurs, vétérinaires, agents des DDPP [Direction départementale de la protection des populations], laboratoires d’analyse, coopératives. Leur coopération et la compréhension des attentes respectives sont indispensables pour répondre à la fois aux enjeux de la santé publique et de l’acte de production.
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Bien que la réglementation soit unique, chaque acteur a sa propre lecture du risque représenté par les salmonelles et de leur impact individuel ou collectif. C’est ce qui ressort d’entretiens auprès d’acteurs de la filière pondeuse en France.
Une multitude de contextes professionnels
Cette interprétation varie selon la proximité vis-à-vis de l’élevage, directement au contact des animaux (éleveur, vétérinaire) ou non (fabricant d’aliment), le type d’élevage (taille, production, circuit de vente), la relation aux autres acteurs (prestataires, collaborateurs, inspecteurs), la confrontation à des cas de contaminations humaines ou en élevage.
Par exemple, la position des agents de la DDPP est rendue complexe du fait de leurs missions simultanées de surveillance de la mise en œuvre de la réglementation et d’accompagnement des éleveurs en cas de contrôle positif. Pour les éleveurs, la perception de la réglementation salmonelle est impactée par de nombreux facteurs tels que des aspects affectifs vis-à-vis de leur cheptel, le fait que les œufs aient été ou non responsables de salmonelloses humaines, ou encore l’accompagnement d’autres acteurs de la filière.
Un sentiment de manque de considération
L’élaboration du programme de lutte contre les salmonelles se joue principalement entre l’Anses et les instances décisionnaires (éloignées du terrain), et n’inclut pas le « noyau dur » de lutte, représenté par le trio « DDPP-vétérinaire sanitaire-éleveur ».
« De la distance entre les auteurs de la réglementation et les professionnels naît un sentiment de manque de considération et de reconnaissance du travail sur le terrain. Il en découle une perte de sens des efforts de lutte, engendrant un désengagement des acteurs, qui peut freiner la mise en œuvre de la réglementation », analyse Florine Brunner, la vétérinaire ayant réalisé cette étude.
Des mesures indispensables mais contraignantes
Les acteurs interrogés ont conscience de la potentielle gravité des cas humains et de l’importance pour la filière œuf de s’engager à limiter les cas de salmonellose : « On est responsables des œufs qui vont en grande surface », rappelle un intégrateur.
La mise en œuvre de la réglementation se fait sous le poids de nombreuses contraintes, d’ordre technique (manque de moyens adaptés pour la gestion des lots de poules et d’œufs infectés par les salmonelles), économique (indemnisations insuffisantes au regard des pertes engendrées) ou psychologique (sentiment d’échec, découragement).
Les éleveurs sont les premiers à en faire les frais. C’est également le cas des professionnels qui les accompagnent : « Dès qu’on fait un prélèvement, tout le monde a une épée de Damoclès sur la tête donc tout le monde est crispé […] parce que l’enjeu pour un éleveur est colossal ! », fait remarquer un vétérinaire.
Avancer dans l’intérêt de tous
Les protestations d’éleveurs, d’interprofessions ou de vétérinaires depuis la publication de l’arrêté de 2018, ont incité à la formation de groupes de travail en 2022 afin d’engager des concertations entre les administrations, les institutions scientifiques, les interprofessions et les syndicats et associations d’éleveurs. Ces discussions ont abouti à l’arrêté du 27 février 2023.
Les réponses constituent un premier pas vers un travail commun pour que la réglementation réponde mieux aux objectifs et besoins individuels et collectifs. Par exemple, l’autorisation des vaccins vivants qui complète l’arsenal de lutte. Demandée par les éleveurs, cette mesure est la preuve qu’un travail collaboratif représente une réelle opportunité pour atteindre l’objectif commun d’absence de détection de salmonelles.
En savoir plus
Thèse vétérinaire de 2023 - La réglementation de l’union européenne pour la lutte contre les salmonelles en élevage de poules pondeuses : enquête de terrain sur les modalités d’application, les enjeux de santé publique et leur perception par différents acteurs de la filière en France et en Allemagne. VetAgro Sup Lyon.