Quels freins à l’installation des porteurs de projet en élevage ovin ?
Malgré les dispositifs incitatifs et d’accompagnement des porteurs de projet, l’installation en élevage est encore aujourd’hui confrontée à de trop nombreux freins.
Il existe de nombreuses structures et dispositifs pour accompagner les porteurs de projet d’installation en élevage en France. Des points accueil installation (PAI) existent dans chaque département métropolitain, ainsi qu’en Corse et dans les départements et régions d’outre-mer (Martinique, Guadeloupe, la Réunion, Guyane, Mayotte). Les chargés de mission de ces PAI vont permettre aux porteurs de projet d’affiner celui-ci, par une première étape d’autodiagnostic, orientent sur les démarches et aides financières possibles (dotation jeunes agriculteurs, abattement fiscal, politique agricole commune, etc.) et aiguillent vers les structures et organisations agricoles professionnelles adaptées selon les besoins (répertoire Départ-Installation, centres d’élaboration des plans de professionnalisation personnalisés, etc.). Les PAI sont ouverts à tous et comptent autour de 5 000 bénéficiaires par an, toutes filières agricoles confondues.
Un investissement de départ autour de 138 500 euros
En dépit de cet accompagnement déjà existant, les porteurs de projet d’installation en production animale doivent relever de nombreux défis, certains d’entre eux constituant de réels freins à la dynamique d’installation. L’investissement de départ est généralement le premier obstacle mentionné. Bien qu’en ovin allaitant le montant moyen d’investissement à l’installation soit le moins élevé des quatre productions de ruminants (bovins lait, bovins viande, caprins, ovins lait et viande confondus), il ne s’en élève pas moins à 138 500 euros, avec un minimum à 30 000 euros et un maximum à 350 000 euros. Plus de la moitié (53 %) des installations se fait en individuel, contre 37 % en Gaec et seulement 5 % en EARL. Cependant, le financement du cheptel n’est pas, lui, considéré freinant.
La difficulté d’accès au foncier est un obstacle commun à quasiment toutes les régions de France et en production ovine, observe un faible recours au fermage à l’installation, ce qui engendre des difficultés supplémentaires pour trouver des surfaces, malgré un prix du foncier qui se veut relativement encadré et contenu, en comparaison aux autres pays européens.
Des tailles d’exploitations qui ne conviennent pas aux projets
Le repérage des exploitations potentiellement reprenables par le porteur de projet et en cohérence avec ses besoins semble être une difficulté. En productions de petits ruminants notamment, la taille des exploitations dans certaines régions peut poser un problème aux porteurs de projet qui souhaitent commencer doucement avec un cheptel et un foncier réduit. En élevage ovin lait et viande, on remarque que le manque de connaissances techniques des structures d’accompagnement dans les régions où il est moins développé engendre des difficultés supplémentaires, avec le manque de disponibilité voire l’absence d’un technicien formé et spécialiste. De plus, en production ovin lait et caprin, de plus en plus de projets de transformation à la ferme voient le jour, mais la transversalité entre conduite de troupeau et transformation n’est pas encore suffisamment acquise et développée dans les structures d’accompagnement technique.
Incertitude face à l’avenir de l’élevage
Les crises à répétition, telles celle que nous traversons aujourd’hui avec une détresse généralisée à l’ensemble des producteurs agricoles, alimentent le manque de confiance des porteurs de projet face à l’avenir de l’élevage. Comment se projeter dans les cinq, dix, vingt prochaines années lorsque l’on manque de visibilité sur l’évolution des prix, des volumes à produire, du coût des matières premières ? Cette angoisse de l’avenir constitue un des freins majeurs pour l’installation en élevage. À cela s’ajoute la faible rémunération des exploitants agricoles, au regard des sommes et du temps investis. Enfin, et pas des moindres, les démarches administratives, les mises aux normes et les évolutions très fréquentes de la réglementation peuvent décourager les futurs installés. Entre méconnaissance de l’existence de certaines aides, lenteurs de versements et manque de transversalité entre les différents services de l’État, les éleveurs se retrouvent fréquemment désemparés sur la marche à suivre. Spécifiquement en élevage ovin, la question de la prédation du loup, qui s’étend à l’ensemble du territoire métropolitain, est une source d’inquiétude et de remise en question de certains projets.