Quelle place pour l’Aube dans la production ovine française
Entre vignes champenoises et grandes cultures des plaines crayeuses, la filière ovine de l’Aube bataille pour trouver sa place. Néanmoins, l’élevage se maintient et une dynamique est créée entre les éleveurs.
Avec un peu plus de 311 000 habitants (d’après l’Insee, 2021), l’Aube se place au cinquième rang des départements les plus peuplés de la région Grand Est. Mais qu’en est-il de sa population ovine ? Le cheptel reproducteur aubois compte 15 900 brebis et agnelles, ce qui place le département en huitième position au sein de la région Grand Est, loin derrière la Moselle et ses 50 000 brebis. La région Grand Est, et par extension le département de l’Aube, ne recense pas d’élevages de brebis laitières.
Au niveau français, on comptabilisait 3,4 millions de brebis et d’agnelles saillies allaitantes en novembre 2023. Rappelons que la première région ovine est la Nouvelle-Aquitaine avec 763 000 brebis et agnelles saillies suivies de l’Occitanie avec 720 000 têtes. La région Grand Est vient en cinquième position, avec ses 250 000 brebis allaitantes comptabilisées en 2021.
58 éleveurs ovins dans l’Aube
« La tendance baissière à l’œuvre depuis les années 1980 (le cheptel national approchait les 10 millions de têtes), s’est accélérée en 2022 sous l’effet de la sécheresse estivale couplée à la hausse du prix des aliments et poursuivie, bien que plus modestement, en 2023, avec une amélioration des conditions météorologiques » (Institut de l’élevage-Idele, Dossier annuel ovins 2023). Les abattages d’agneaux et de réformes ont également reculé, en conséquence du repli du nombre de reproductrices fin 2022.
Revenons dans l’Aube, où 58 éleveurs sont inscrits à l’aide ovine, possédant donc un troupeau de 50 brebis minimum. Trois coopératives se partagent la production d’agneaux départementale, la Sicarev, la Cobevim et Feder. Il n’y a pas d’abattoir spécialisé ovin dans l’Aube, mais au moins un abattoir multi-espèces est en activité à Troyes.
Grandes cultures et ovins historiquement liés
« Historiquement, il y avait très souvent des troupes ovines dans les fermes, gardées par des bergers communaux qui allaient glaner dans les champs après la moisson », rappelle Jean-Roch Lemoine, éleveur ovin dans le nord du département et président de la section ovine de la FDSEA de l’Aube. Dans les années cinquante, l’Aube se reposait encore sur un cheptel de près de 200 000 ovins. À partir des années 1980, la faible rentabilité de la production d’agneaux et l’explosion de celle des grandes cultures ont induit une forte baisse du cheptel.
« Depuis la reconnaissance des zones vulnérables, il y a une quinzaine d’années, les brebis sortent pâturer à nouveau. Avant cela, on était très souvent sur un système de bergerie intégrale », souligne l’élu syndical. Les complémentarités entre ovins et grandes cultures trouvent un public parmi les cultivateurs.
Des élevages de plus en plus techniques
Ainsi, depuis environ 20 ans, « les ateliers ovins se spécialisent et se professionnalisent, avec la technicité des pâturages de couverts, des intercultures et des échanges avec le voisinage pour l’accès à leurs parcelles. Les effectifs ovins du département se maintiennent à peu près, nous avons la chance d’avoir beaucoup de reprises des exploitations familiales par des jeunes motivés », se réjouit Jean-Roch Lemoine, lui-même en Gaec avec son fils.
L’éleveur et syndicaliste se laisse à penser que la technicité demandée par la conduite des grandes cultures ruisselle sur la gestion des troupeaux ovins. « Tant qu’à avoir des ovins, autant faire cela bien et faire en sorte que l’élevage rapporte de l’argent. Si on joue sur la complémentarité entre les ateliers, il y a vraiment le potentiel pour gagner sur les deux tableaux », appuie Jean-Roch Lemoine.