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Un jour avec Fabienne et Jean Laher, éleveurs ovins transhumants dans les Pyrénées

Au Gaec des trois arbres à Aramits dans les Pyrénées-Atlantiques, les brebis transhument à une quarantaine de kilomètres de la bergerie. Chaque année, la montée et la descente d’estive s’organisent soigneusement.

 

Chiffres-clés

430 brebis basco-béarnaises, dont 80 agnelles
70 000 litres de lait produits par an
2 associés, 1 berger salarié en estive
55 ha de SAU dans la plaine
400 ha de pâturage en estive, partagés avec trois autres troupeaux
2007 : création de l’atelier ovin à l’installation de Fabienne sur l’exploitation
2011 : transformation à la ferme

 

 
Un jour avec Fabienne et Jean Laher, éleveurs ovins transhumants dans les Pyrénées
© V.Hervé-Quartier
10 h

 

Départ du siège de l’exploitation à Aramits pour rejoindre l’estive. Pour la cinquième année consécutive, les 430 brebis de Fabienne et Jean Laher ont passé près de trois mois à plus de 1 600 mètres d’altitude. Membre d’un groupement pastoral, le couple basco-béarnais fait estiver ses brebis sur la commune de Borce, dans les Pyrénées-Atlantiques : 400 hectares entre 1 600 et 2 200 mètres au bout de la vallée d’Aspe, à la frontière avec l’Espagne. Quatre cabanes y accueillent les bergers pour garder les animaux, traire et fabriquer les fromages de 2 200 brebis et 40 vaches. Les surfaces sont louées à la commune qui met à disposition les cabanes et la salle de fabrication. En contrepartie, les éleveurs doivent entretenir les pacages en adaptant le chargement aux disponibilités en herbe. Ils pratiquent aussi l’écobuage en cas de besoin, pour lutter contre la propagation du genévrier par exemple.

 

 

 

Les brebis sont en estive à partir du 1er juillet et jusqu’à mi-septembre environ, en fonction des conditions climatiques. « Nous avons fait le choix collectivement de ne pas monter plus tôt pour la préserver, explique Fabienne. Elle est trop en altitude pour y pâturer dès le mois de mai. La transhumance permet de libérer les terres dans la vallée, d’y faire du foin. Ici, les brebis paissent une herbe riche, avec une flore très variée, et il fait plus frais qu’en bas. La ration est 100 % herbe pâturée. Elles aiment y venir et cela produit un fromage avec une vraie typicité. »

 

 

 

11 h

Arrivée à l’estive. Dans les grands espaces de la montagne, les lieux de vie des bergers semblent tout petits et il faut de bons yeux pour repérer le troupeau.

1 : La cabane d’habitation du berger, avec le strict minimum pour cuisiner et dormir.

2 : la salle de fabrication des fromages, partagée à deux. Il faut une bonne organisation pour que chaque matin, chacun puisse fabriquer ses fromages !

3 : le saloir, avec son toit recouvert d’herbe et traversé par un filet d’eau, reste frais et humide : l’ambiance parfaite pour débuter l’affinage des fromages avant la descente à la fin de l’été. Les fromages sont retournés et frottés deux fois par semaine pendant minimum 120 jours. « Nous aimons les fromages bien affinés, et les gardons le plus souvent jusqu’à six mois minimum avant commercialisation. Il y a autant de fromages que de fromagers et il en faut pour tous les goûts ! » sourient Fabienne et Jean.

 

 

 

11h30

État des lieux pour ne rien oublier. Fabienne et Jean reviendront dans quelques jours pour finir de ranger et descendre le matériel. « Nous avons de la chance, l’estive est accessible en 4X4, cela facilite la vie, surtout lorsqu’il faut monter le matériel et les ravitaillements », apprécient les éleveurs. Le lait est transformé en ossau-iraty dans un chaudron en cuivre, spécificité de l’exploitation, puis affiné. Fabienne et Jean transforment ainsi près de 35 000 litres de lait par an, et vendent l’équivalent à la laiterie du pays d’Aramits. Ici l’eau est fournie par les nombreuses sources présentes et des panneaux solaires produisent un peu d’électricité. Pour la fabrication et la cuisine, des bonbonnes de gaz sont utilisées.

 

 

 

Les aires de traite ont été bétonnées il y a deux ans. « C’est beaucoup plus agréable pour nous de traire au sec et c’est aussi mieux pour la qualité du lait », précise Fabienne. Matin et soir le premier mois, la traite manuelle prend jusqu’à quatre heures le temps d’habituer les brebis. Puis elles passent en monotraite et sont progressivement taries. Le cahier des charges de l’AOP ossau-iraty précise que les brebis doivent être au repos pendant au moins 100 jours, comprenant les mois de septembre et octobre. Le couple emploie un berger sur les mois de juillet et août pour aider Fabienne. Et cette année, Alice est venue en renfort en septembre, ce qui a permis à Fabienne de descendre plus tôt.

 

 

 

11h45

Passage par le saloir : les fromages d’estive au goût si particulier sont reconnaissables à la marque de l’edelweiss dans une montagne sur la croute (en plus du poinçon représentant une tête de brebis de face des ossau-iraty fermiers). Ils sont commercialisés à la ferme, sur le marché de Dax, et auprès de crémiers. Fabienne et Jean souhaitent consacrer plus de temps au développement de nouveaux produits (greuilh, fromage frais, fromage blanc) pour répondre à la demande de leurs clients. Pour cela, ils ont investi dans des équipements de la bergerie pour alléger la charge de travail et surtout la pénibilité sur d’autres tâches, tout en passant du temps avec les animaux.

 

 

 

12 h

Démontage du parc de nuit et nettoyage de l’aire de traite. L’estive étant située dans le parc national des Pyrénées, les parcs de traite et de nuit doivent être démontés avant l’hiver, tout comme la cabane vidée entièrement et laissée ouverte. Elle servira peut-être de refuge à des randonneurs. Un peu de matériel est laissé sous clés dans la cabane de fabrication. Seule reste l’aire de traite et l’abri pour les trayeurs.

 

 

 

15h

Début de la descente, rendez-vous a été pris avec le chauffeur du camion de transport à 17h. Il faut entre 1 h 30 et 2 h de marche pour amener le troupeau en bas dans la vallée. Les températures ont baissé la nuit ces derniers jours et les brebis sont contentes de descendre. Les bergers aussi, pour se reposer après trois mois en estive. Côté prédation, l’ours est présent dans la zone et si la pression est peu forte, un troupeau voisin a subi une attaque il y a deux ans. « L’ours est là et nous composons avec. Le problème c’est le climat de peur que cela crée, les nuits de veille, l’agitation des brebis et les potentielles pertes… Étant situés sur un sentier de grande randonnée et à proximité d’un refuge, nous n’avons pas de chien de protection. Les brebis sont dans un parc électrifié la nuit et un berger est présent tout l’été », témoigne Jean. Autre sujet d’inquiétude pour les éleveurs, les dégâts causés par les sangliers, de plus en plus fréquents et étendus en cette fin de saison.

 

 

 

17 h

Les 350 brebis sont embarquées dans le camion et deux bétaillères pour rentrer à la bergerie distante de 40 km. « À pied il faudrait deux jours de marche, et il y a beaucoup de route, ce serait dangereux », explique Fabienne. La semaine suivante, les brebis seront tondues puis elles passeront à l’échographie. Pour les brebis adultes, les inséminations et la lutte ont lieu avant de monter en estive mi-juin. Dans la vallée, les brebis retrouvent une ration composée de foin d’herbe et de luzerne, de maïs grain autoproduit et de concentré acheté.

 

 

 

18 h 30

Arrivée à la bergerie ! Les agnelles et quelques chèvres Pyrénéennes attendent l’arrivée de leurs aînées avec impatience. Elles sont descendues une semaine plus tôt afin d’être mises à la reproduction et tondues. Les 430 brebis basco-béarnaises et leurs bergers vont se reposer avant les agnelages, passer l’hiver à l’abri et profiter des pâturages autour de la bergerie.

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