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« Nous faisons du 100 % plein air et de la vente directe avec nos ovins et nos porcs »

Entre production biologique, vente directe, utilisation de races rustiques et projet agroforestier, Léo et Barbara inscrivent La Ferme du Troglo dans son écosystème naturel et territorial, sur la côte nord du Finistère.

C’est après avoir longé la paisible rivière de Morlaix que Léo nous accueille à La Ferme du Troglo, à Plouezoc’h, dans le Finistère. Avec sa compagne Barbara, ils se sont installés il y a quatre ans en polyculture élevage, elle sur l’atelier porc et lui du côté des ovins. « Pour nous, c’était important de s’installer avec un projet cohérent de polyculture élevage, où chaque espace est valorisé au mieux et de façon complémentaire entre monogastrique et ruminant. » Léo et Barbara ont tout d’abord travaillé dans la gestion d’espaces naturels, puis ils sont passés par plusieurs exploitations agricoles. Tous deux titulaires d’un brevet professionnel responsable d’entreprise agricole, ils s’installent en 2019 sur la ferme vide, précédemment en vaches allaitantes. « J’ai fait en plus un parcours proposé par l'Adear des Côtes-d’Armor, le “stage paysan créatif”, mentionne Léo. Sur un an, nous avons l’opportunité de faire des stages en exploitation, entrecoupés de périodes de formation et d’échanges sur nos différentes expériences. C’était très enrichissant et cela permet d’affiner son projet sur une année, de s’installer plus sereinement ! »

L’élevage ovin, autonome et économe

Entre le potentiel de productivité des sols, le climat et la rotation des cultures, seul un quart de la surface de l’exploitation peut être raisonnablement cultivé en céréales. Une partie est consacrée à la culture d’orge brassicole, l’autre est semée de mélanges céréales/protéagineux pour l’alimentation des porcs. Restent donc les prairies temporaires, les prairies permanentes et les parcours, que l’élevage ovin est particulièrement adapté à mettre en valeur. « Nous avons pensé l’atelier ovin de façon qu’il soit le plus économe et autonome possible. Pour cela, il repose entièrement sur le pâturage, nous ne récoltons rien. » Ainsi leur fallait-il des pâturages productifs toute l’année et une race adaptée. Les prairies permanentes et parcours présentent une végétation caractéristique des landes bretonnes. C’était donc une évidence pour le couple de se tourner vers la race si bien nommée Landes de Bretagne. « C’est une race rustique et peu conformée, il a donc fallu aiguiser nos arguments envers les bouchers et clients pour assurer les ventes. Même si la conformation n’est pas standard, la qualité de la viande est au rendez-vous. Nous produisons une viande rouge et persillée, que nous pouvons faire maturer jusqu’à trois semaines afin de développer les arômes. »

Assurer un pâturage de qualité toute l’année

Léo groupe ses agnelages et conduit ses brebis et agneaux ensemble jusqu’au sevrage, en un seul lot. Les ovins paissent rarement plus de trois jours la même parcelle, ce qui permet d’éviter le surpâturage et d’optimiser la production des prairies. Cependant les parcelles ne sont clôturées qu’au filet électrique, « et cela peut nous prendre bien jusqu’à 25 heures de travail par semaine, confie Léo, donc nous réfléchissons à clôturer en dur dans les années à venir ». L’hiver, brebis et agneaux paissent sur des couverts végétaux de type « biomax ». Cette année, Léo teste avec le groupement des agriculteurs biologiques (GAB) une nouvelle alternative économisant un passage de tracteur : le sous-semis d’un mélange trèfle, lotier et plantain dans la céréale en place. Les agneaux, une fois sevrés, sont finis sur prairie temporaire composée de luzelle (luzerne adaptée à la pâture), dactyle, ray-grass anglais, trèfle blanc, plantain et lotier. Ces deux dernières sont des plantes à tanin, ayant des propriétés anti-météorisantes. Ainsi les éleveurs bénéficient des plantes riches en protéines tout en maîtrisant les dangers. Léo et Barbara ont aussi pour projet de planter des essences fourragères, de bois d’œuvre et des pommiers dans certaines parcelles. « Les atouts sont multiples. Déjà, cela apporte de l’ombre et du fourrage pour nos animaux. De plus, cela décale le pic de pousse de l’herbe sur ces parcelles, sans parler des bienfaits écosystémiques que nous connaissons de l’agroforesterie. Cela permet de continuer à diversifier la ferme et à tirer encore plus parti de notre milieu en valorisant le bois d’œuvre et les pommes. »

Profiter du contexte touristique pour la vente directe

L’ensemble des ventes se fait en direct, que ce soit pour la viande ovine ou porcine. « Les animaux sont amenés à l’abattoir intercommunal de Lannion (environ 35 km de la ferme), découpées par le boucher de la ferme de Saint Laurent (15 km) puis nous récupérons les pièces sous vide étiquetées, explique Barbara. Cela nous coûte environ 35 000 euros par an donc nous essayons de démarcher pour vendre en carcasse entière ou grosses pièces. » La viande de La Ferme du Troglo se retrouve en restaurant, en épicerie et en conserverie mais surtout sur les trois marchés hebdomadaires tenus par Barbara ; dont un le vendredi soir directement sur la ferme. « L’agneau se vend très bien, il y a très peu de concurrence ici, et nous ne vendons pas plus cher qu’en grande surface, parfois même moins cher ! Et le marché à la ferme a tellement bien pris que nous vendons davantage ici qu’au marché de Morlaix », se réjouit-elle. En parallèle du marché à la ferme s’est monté un bar associatif tenu par un couple d’amis, qui vendent notamment la bière fabriquée avec l’orge cultivée au Troglo. Étant proches de la côte, l’activité touristique est à son pic l’été, « nous organisons des projections de films, des concerts et autres événements sur la ferme. C’est une façon de plus de s’inscrire dans la dynamique territoriale et faire vivre l’exploitation. En revanche, avec cela viennent les problématiques pour accueillir du monde. Cela nécessite d’avoir de la place pour se garer, des infrastructures pour délimiter les parties professionnelles, privées et publiques. Nous voulons que les gens puissent en profiter sans danger. » La production de viande est calée sur la vente estivale aux touristes. Les agnelages ont donc lieu entre novembre et janvier. « Je surveille fréquemment les mises bas mais j’essaie d’être le moins interventionniste possible, expose Léo. Je pars du principe que si un animal n’est pas adapté à mon système, je ne pourrai pas raisonnablement le garder, donc la réforme est mon meilleur outil de sélection. » Suivant le même principe, Léo réforme brebis et agnelles au printemps afin d’entamer ses ventes en attendant que les agneaux soient prêts (plutôt en juillet et août).

Chiffres clés

57 ha : 13 de culture, 12 de prairie temporaire, 32 de prairie permanente et parcours.

200 brebis Landes de Bretagne pour 240 agneaux de 8 mois (15 kg carcasse)

6 truies Bayeux, Duroc, Mangalitza

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