Ne baissez pas la garde contre la pyrale du maïs !
La présence de pyrale sur maïs est souvent sous-estimée et ses dégâts sont facilement confondus avec ceux de la sésamie. Efficace, la lutte en végétation n’est pourtant pas systématisée.
La présence de pyrale sur maïs est souvent sous-estimée et ses dégâts sont facilement confondus avec ceux de la sésamie. Efficace, la lutte en végétation n’est pourtant pas systématisée.
Ces dernières campagnes, les dégâts de pyrale sur maïs focalisent l’attention à l’automne. « Dans les comptages, on n’observe pas de grosse évolution des populations. Mais le climat chaud et sec de fin d’été qui sévit depuis plusieurs années dessèche les plantes et favorise l’expression des dégâts de pyrale », commente Jean-Baptiste Thibord, responsable du pôle ravageurs et méthodes de lutte d’Arvalis. Résultat : la présence de la pyrale est plus visible. Ce phénomène s’accompagne d’une progression de l’aire touchée par le lépidoptère en France.
Pyrale et sésamie, une association de malfaiteurs
Toutefois, les dégâts observés sont parfois ceux de la sésamie et non de la pyrale. « Cet autre insecte foreur, parasite du maïs, occasionne des dégâts similaires à la pyrale mais se développe beaucoup plus rapidement », rappelle Jean-Baptiste Thibord. Cantonnée jadis au grand Sud-Ouest, la sésamie est aujourd’hui présente au sud de la région Pays de la Loire, et même au sud de la région Centre. « Dans ces régions, les dégâts de sésamies se conjuguent à ceux de la pyrale », indique Jean-Baptiste Thibord.
La présence de la pyrale ampute le rendement du maïs grain à hauteur de 7 % en moyenne par larve et par plante à l’automne. « L’impact peut être deux fois plus fort en conditions de stress élevé, ou bien moindre si les conditions climatiques sont douces », explique Jean-Baptiste Thibord. La présence de l’insecte peut dégrader la qualité sanitaire du maïs : les insectes foreurs augmentent les risques de mycotoxines.
Viser le bon stade pour limiter les dégâts
Pour lutter contre la pyrale, la première mesure consiste à broyer les cannes du maïs précédent au champ. Dans les secteurs où de fortes populations sont observées, une protection en végétation est à envisager, pour traiter le premier ou le deuxième vol selon le secteur géographique. Dans les secteurs où une seule génération de pyrale opère, une application fin juin-début juillet suffit.
La difficulté consiste à traiter au bon stade et contre la génération qui réalise les dégâts. Le traitement doit être positionné au pic de vol, entre le stade œuf et le premier stade larvaire. « La fenêtre est d’une à deux semaines selon la météo », précise Jean-Baptiste Thibord.
Cette information est communiquée par les réseaux de surveillance régionaux, notamment via les BSV (Bulletins de santé du végétal), qui piègent les insectes foreurs. Autre difficulté : une application au pic de vol de la deuxième génération correspond à des stades où les maïs mesurent plus de 2 m. Pour réaliser le traitement, il faut donc disposer d’un enjambeur.
Biocontrôle ou produits chimiques classiques
La palette de produits homologués est assez large. Elle se compose de produits de biocontrôle et d’insecticides de synthèse. Très médiatisés, les trichogrammes couvrent un quart des surfaces de maïs grain protégés (autour de 120 000 ha). « L’efficacité des trichogrammes n’est plus à démontrer, même si quelques déconvenues sont à déplorer, liées le plus souvent à l’association d’à-coups climatiques, durant lesquels les parasites sont mis en défaut, et de réductions de doses », détaille Jean-Baptiste Thibord.
D’autres produits de biocontrôle sont également autorisés : Success 4 (Corteva), à base d’une bactérie, ainsi que trois spécialités à base de BT (Bacillus thuringiensis) : Dipel DF (Philagro), Xentari (Philagro) et Costar WG (De Sangosse). Ces produits sont facilement lessivables. Ils perdent en efficacité si de fortes pluies surviennent dans les dix jours qui suivent l’application.
Une sole en sous-protection
Les insecticides conventionnels protègent les trois quarts des surfaces protégées. Deux insecticides de synthèse dominent : Coragen (chlorantraniliprole) et Karaté Zéon (lambda-cyhalothrine). Leurs efficacités sont réelles (autour de 75 %) et ils ciblent à la fois les populations de pyrale et de sésamie alors que les trichogrammes ne ciblent que les pyrales.
Vu l’évolution de la pression de ces deux insectes, la lutte en végétation devrait prendre de l’ampleur et permettrait de limiter les risques qui pèsent sur la qualité sanitaire des récoltes. On estime à 2 millions d’hectares les surfaces contaminées par les insectes foreurs quand les surfaces protégées avoisinent aujourd’hui les 500 000 ha.
Plusieurs générations de pyrales par an
Depuis 2018, l’Alsace a rejoint la liste des régions où une population de pyrale plurivoltine a été constatée. Le terme s’applique aux populations d’insectes qui effectuent plusieurs générations par an. L’expansion géographique des populations semble expliquer ce plurivoltisme : la présence de pyrales du maïs réalisant deux générations par an a été mise en évidence en Allemagne et en Suisse depuis les années 2000. Le phénomène complique la lutte contre l’insecte. « Les populations se régénèrent davantage, les effectifs de fin d’hiver sont importants et l’absence de froid maintient les populations jusqu’en sortie hiver à des niveaux importants. La lutte contre la pyrale en présence de population plurivoltine est plus compliquée à mettre en œuvre », commente Jean-Baptiste Thibord.
L’amélioration de la surveillance, à l’aide de pièges à phéromone, de pièges à nasses ou de pièges lumineux, permet de mieux cerner les périodes de vol des insectes. L’apparition de pièges plus efficaces et moins coûteux que les pièges disponibles jusqu’alors a, depuis deux ans, permis d’affiner la connaissance des populations d’insectes.